Vie de Saint Antoine

SAINT ANTOINE SE REND À ALEXANDRIE PENDANT LA PERSÉCUTION

Après ce que nous venons de raconter, survint la persécution de Maximin. Comme on conduisait à Alexandrie les saints confesseurs, Antoine quitta son monastère pour les accompagner. Allons combattre aussi, dit-il, si l’on nous appelle, ou du moins allons contempler ceux qui combattent. Il désirait le martyre, mais ne voulant pas se livrer lui-même, il servait les saints et dans les mines et dans les prisons ; il mettait un grand zèle à les encourager dans leurs combats lorsqu’ils étaient cités devant les tribunaux et lorsqu’ils avaient confessé la foi ; à les recevoir et à les accompagner jusqu’à ce qu’ils eussent consommé leur sacrifice. Le juge, voyant l’intrépidité d’Antoine et de ceux qui étaient avec lui, fit défense qu’aucun moine parût au tribunal, ni même restât dans la ville. Tous les autres pensèrent qu’ils devaient se tenir cachés pendant ce jour-là, mais Antoine fit si peu de cas de cette défense qu’il lava son manteau et vint le lendemain dans son plus beau costume se placer sur un lieu élevé pour se montrer au gouverneur. Pendant que tout le monde s’étonnait de son audace et que le gouverneur, les yeux fixés sur lui, passait avec sa cohorte, lui se tenait debout sans trembler et montrait quel est le courage de nous autres chrétiens, car, comme je l’ai dit, lui aussi désirait le martyre. On voyait qu’il était fâché de ne pas avoir eu l’occasion de confesser la foi, mais le Seigneur le conservait pour notre avantage et celui des autres, afin qu’il enseignât à une multitude de chrétiens cette vie spirituelle dont il avait lui-même appris les secrets dans les saintes Écritures. En effet, la seule vue de sa conduite déterminait un grand nombre de personnes à imiter son genre de vie. Quand la persécution eut enfin cessé, et lorsque le bienheureux évêque Pierre eut quitté la terre, Antoine sortit de la ville et retourna dans son monastère où il continua ses exercices avec la plus grande ferveur. Il jeûnait continuellement ; son vêtement était de poil en dedans, de peau en dehors, et il le garda jusqu’à sa mort. Jamais il ne prenait de bains pour cause de malpropreté ni ne se lavait les pieds ou ne les mettait dans l’eau que par nécessité ; jamais on ne le vit se déshabiller et personne ne vit son corps nu, excepté après sa mort quand on l’ensevelit.

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