Le but persévérant des docteurs de la synagogue, dans les siècles qui précédèrent Jésus-Christ fut toujours d’élargir l’abîme que la différence des religions devait creuser entre Israël et les Gentils. On s’occupa d’abord de la manière la plus méticuleuse d’interdire toutes les images, avec une rigueur que ne prescrivait pas le commandement originel. Qui pourrait être surpris qu’on préférât tout souffrir plutôt que de permettre que l’image de Caligula fût placée dans le Temple de Jérusalem ? Mais on ne voulait plus entendre parler, au temps d’Hérode, de représentations imagées, de trophées au théâtre, ou de l’aigle romaine à la porte du Temple. Lorsque Pilate fît entrer ses troupes à Jérusalem, avec les aigles des Légions il souleva par ce seul fait, un tumulte populaire, et dès le début de la dernière guerre les Juifs de Tiberiade n’eurent rien de plus pressé que de renverser le palais d’Antipas, qui était orné de statues.
Il paraît qu’en Palestine circulaient des monnaies frappées à l’image de l’empereur (Matthieu 22.20 s.), mais les pièces fondues en Judée même en étaient dépourvues par égard pour les Juifs. A l’époque d’Adrien, il est vrai, le célèbre Rabbin Gamaliel II justifiait son habitude de se rendre à Ptolémaïs dans un bain public, orné de la statue de Vénus, en disant que la statue était là pour l’établissement, et non l’établissement pour la statue, mais ce jugement impartial était celui d’un bien petit nombre d’esprits distingués.
L’emploi de toutes les choses qui pouvaient dans la moindre mesure servir au culte des idoles était interdit. Ainsi, non seulement on devait ne faire aucun usage du vin qui avait servi aux libations devant les faux dieux, mais encore il était défendu d’en tirer aucun profit. « Si l’on a pris du bois dans une haie consacrée aux fausses divinités, il n’est pas permis d’en faire usage Si l’on s’en est servi pour chauffer un four, celui-ci, s’il est neuf, doit être démoli et s’il est ancien il faut le laisser refroidir. Si l’on y a fait cuire du pain il est interdit de le consommer et même d’en tirer une utilité quelconque. Le pain a-t-il été mélangé avec d’autre pain, tout usage en devient coupable. Il faut se garder non seulement d’entrer en contact avec les idoles et leur culte, mais de favoriser celui-ci en aucune manière. « On ne peut vendre aux païens ni ours, ni lions, ni rien qui puisse causer du dommage à la nation ; et il n’est pas moins défendu de les aider à bâtir une basilique (tribunal), un stade, un échafaud. »
Ainsi l’abîme qui séparait le peuple élu d’avec les Gentils, était rendu plus profond encore par cette circonstance, que le païen n’observant pas les lois de la pureté lévitique, était par cela même atteint d’une irrémédiable souillure. (Schürer, o. c. 385 s.) (G.R.)