Nous abordons ici la partie spécialement encyclopédique de notre travail, qui est comprise, comme nous l’avons dit en commençant, dans la Méthodologie.
Nous avons établi dans l’article précédent que l’existence même de la théologie est solidaire de la définition du Christianisme, comme d’un fait et d’un fait surnaturel. Mais on a vu des églises ou des individus qui admettaient le caractère surnaturel du Christianisme, contester ou nier la valeur normative du fait chrétien originel, en se jugeant autorisés à étendre, pour ainsi dire, uniformément ce caractère surnaturel à toutes les réalisations ou manifestations du fait chrétien dans le cours des âges.
Nous accordons à l’opinion que nous venons de rapporter, que les réalisations actuelles du fait chrétien ne s’expliquent pas plus que les premières par le concours pur et simple des forces humaines, et qu’elles doivent être rapportées comme elles à une causalité surnaturelle et divine. La conversion, la nouvelle naissance, la sanctification d’un pécheur, sont encore aujourd’hui et sous nos yeux des miracles de l’Esprit qu’aucun règne de l’ancienne nature ne saurait enfanter ; mais il n’en résulte pas que les faits et les paroles qui nous ont été transmis de l’époque originelle du Christianisme, n’aient pas une tout autre portée dans l’organisme de la religion chrétienne que ceux dont nous sommes les témoins ou les auteurs. Ceux-ci ne sont en effet, selon notre opinion, ni normatifs, ni canoniques pour la foi chrétienne. Comme ils ne portent pas en eux-mêmes le critère essentiel du Christianisme, ils ne sauraient non plus servir devant l’intelligence ou la conscience de mesure à la vérité chrétienne, puisqu’ils seront toujours suspects d’être le résultat du mélange de l’élément chrétien et de parties hétérogènes apportées à ce premier élément par le cours des faits et des choses.
Nous appliquons la dénomination de mysticisme à toutes les conceptions qui tiennent le Christianisme pour un fait également surnaturel et normatif dans tout le cours et à toutes les époques de sa réalisation ; et nous réunissons sous cette appellation la théorie du Catholicisme romain, qui attribue l’autorité canonique à la tradition ; celle de certaines églises protestantes qui attribue cette même autorité aux symboles ecclésiastiques, et celle enfin des églises ou des théologiens qui assignent un rôle analogue aux déterminations actuelles de la conscience chrétienne, soit collective, soit individuelle (Quakers, Irvingiens, etc.).
La critique de ces diverses théories au fond fera l’objet de la troisième Section de la Propédeutique ou Canonique ; nous n’avons qu’à exposer ici les conséquences qui en dérivent dans l’Encyclopédie des sciences théologiques. Nous nous efforcerons de montrer en particulier dans ce qui va suivre, l’influence que l’une ou l’autre des conceptions mystiques du Christianisme exercera sur la détermination de l’objet et du rang de la Théologie systématique au sein des autres disciplines théologiques.
L’Encyclopédie des sciences théologiques que nous allons exposer repose donc sur un second principe qui s’ajoute au premier énoncé dans l’article précédent. Et après avoir dit que le Christianisme est un fait historique et surnaturel, puisque, sans cela, il n’y aurait pas même de théologie, nous posons en fait maintenant que si le Christianisme originel n’est pas le Christianisme original, normatif et canonique, la Théologie systématique a disparu comme discipline spéciale, de l’organisme des sciences théologiques.
Cela étant, il sera a priori très vraisemblable que les théologiens seront loin d’être d’accord soit sur le nombre, soit sur la qualification des grandes disciplines théologiques.
Quant au premier point, tandis que la division en quatre branches, ainsi que le remarque Hagenbach, était généralement recommandée par les anciens encyclopédistes, les modernes, surtout depuis Schleiermacher, ont paru préférer la trichotomie.
Dans l’opuscule cité plus haut, Kurze Darstellung des theologischen Studiums, et à la suite de la définition générale de la science, Schleiermacher divise la théologie en trois grandes sections : la Théologie philosophique, la Théologie pratique et la Théologie historique. Voici la définition qu’il donne de chacune de ces disciplines particulières :
« Tout ce qui est nécessaire, étant données les bases ci-dessus, pour mettre en évidence aussi bien l’essence du Christianisme, ce qui en fait une croyance particulière, que la forme de la communauté chrétienne, et en même temps la manière en laquelle toutes les deux se partagent et se différencient, tout cela réuni forme la partie de la théologie chrétienne que nous nommons la Théologie philosophique.
Le but du gouvernement de l’Eglise chrétienne est de la maintenir et de la développer dans un sens tout à la fois intensif et expansif ; et la science de cette activité constitue une technique que nous désignons en y comprenant toutes les sections particulières, par le terme de Théologie pratique.
Le gouvernement de l’Eglise requiert cependant aussi la connaissance du tout dans chacun de ses états respectifs ; mais comme le tout est historique de sa nature, il ne peut être conçu que comme le produit du passé, et c’est là la définition de la Théologie historique, conçue dans le sens le plus large de ce mot.
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La Théologie historique forme dès lors le corps principal de l’étude théologique, lequel, par la Théologie philosophique, se rattache à la science proprement dite, et par la Théologie pratique à la vie chrétienne active.
Cette trilogie de la Théologie philosophique, historique et pratique, comprend la totalité des études théologiques ; et l’ordre le plus naturel de cette exposition est sans contredit de commencer par la Théologie philosophique, et de terminer par la Théologie pratique. »
L’auteur répartit comme suit, dans ces trois grandes parties, les différentes disciplines théologiques particulières.
« La Théologie philosophique comprend deux branches particulières : l’apologétique dont l’activité est dirigée au dehors, et la polémique, qui est dirigée au dedans.
La Théologie historique est tout entière comprise dans les trois sections suivantes : connaissance du Christianisme primitif ; connaissance du Christianisme dans son développement historique, et connaissance de son état présent. »
En d’autres termes, la Théologie historique se décompose dans l’exégèse, l’histoire ecclésiastique du passé, et l’histoire ecclésiastique du présent, qui comprend elle-même la dogmatique, ou l’exposé de la doctrine existant à un moment donné, soit dans l’Eglise en général, soit dans une église particulière, et la Statistique.
On remarquera que l’auteur varie dans l’ordre des deux dernières parties, plaçant la Théologie historique, tantôt avant, tantôt après la Théologie pratique.
Enfin la théorie du gouvernement de l’Eglise au sens étroit du mot (Kirchenregiment), et celle du service ecclésiastique ou du culte (Kirchendienst), forment les éléments de la Théologie pratique.
Nous disons que cette division des sciences théologique est parfaitement conséquente avec les prémisses du système de Schleiermacher, et connexe en particulier à la définition qu’il nous donne de la théologie et de son objet.
Elle accuse d’un bout à l’autre l’absence d’un critère du fait chrétien qui permette d’en reconnaître l’essence au sein de la multiplicité et de la diversité des formes historiques qui revendiquent un droit d’appartenance au Christianisme, et de classer avec sûreté ces formes. La norme du Christianisme se dégage dans cette conception de la donnée historique elle-même, qui n’est autre que la série successive des modifications de la conscience chrétienne depuis les temps primitifs au moment actuel. L’idée est ici identifiée avec le fait.
Cette absence d’un critère applicable aux réalisations diverses et successives du fait chrétien dans l’histoire, se trahit dès l’abord dans la définition de l’apologétique, qui forme la première section de la Théologie philosophique.
La conception déterministe de Schleiermacher lui interdisait déjà d’attacher au terme apologétique le sens que ce mot exprime dans le langage ordinaire, et d’y voir la défense ou la justification du fait chrétien devant la raison ou la conscience de ses adversaires ; car au point de vue déterministe, tous les faits ont leur légitimité relative, comprise dans celle de l’ensemble. Mais encore cette question préliminaire étant mise hors de cause, on eût pu concevoir l’apologétique comme la détermination exacte du fait chrétien considéré à ses origines, c’est-à-dire à l’état pur et avant les altérations qu’il a dû subir au cours des siècles. On eût pu admettre la nécessité d’une distinction à faire entre le Christianisme primitif et authentique et le Christianisme postérieur, de plus en plus chargé d’éléments hétérogènes, et confier ce travail de discernement à l’apologétique. Mais comme l’essence du Christianisme se détermine, selon Schleiermacher, par un procédé critique consistant à dégager dans le développement du Christianisme ce qui est l’expression pure de son idée, de ce qui doit en être considéré comme une déviation maladive, l’apologétique du Christianisme se trouve privée d’un critère de l’idée chrétienne transcendant aux faits, puisqu’au contraire le seul critère que l’on nous indique résulte de l’histoire et de la comparaison des faits.
Cette absence d’un critère suffisant de ce qui est ou n’est pas essence ou idée chrétienne, se révèle plus manifestement encore dans la détermination de la Théologie dite historique. En effet les documents primitifs du Christianisme qui sont la matière de la Théologie exégétique, ne figurent dans le système que comme les premiers facteurs d’un développement historique, dont ils font partie au même titre que les faits ou documents postérieurs, ceux-ci étant, du même droit que ceux-là, les expressions normales et authentiques de la conscience chrétienne. C’est pour cette raison que la dogmatique, entre autres, confondue elle aussi avec les disciplines historiques, se trouve réduite à être l’exposé des dogmes de l’Eglise ou d’une église ; et la Morale, privée à son tour de sa valeur normative et de tout caractère impératif, n’est que la description des diverses activités individuelles et collectives issues des états divers de la conscience chrétienne.
La définition que Rothe nous donne de la dogmatique, et qui est déterminée, dit-il, par l’étymologie même du mot, se rapporte à celle de Schleiermacher, et se rattache au même courant de conceptions : « La Dogmatique est l’exposé systématique, ou — ce qui revient au même, — scientifique de la doctrine ecclésiastique publiquement reconnue dans une communauté ecclésiastique déterminée ; ou plus exactement : L’exposé systématique, dans leur connexion mutuelle, des propositions dans lesquelles une communauté ecclésiastique déterminée a exprimé d’une façon authentique et intelligible, sa conscience religieuse particulière.
Hagenbach, dans son Encyclopédie et Méthodologie des sciences théologiques, qui est devenue, pour ainsi dire, un livre classique en Allemagne, est revenu à la division de la théologie en quatre branches : la Théologie exégétique, historique, systématique et pratique.
Mais l’influence de Schleiermacher se trahit ici encore dans le rang assigné à la Théologie systématique à la suite de la Théologie historique ; la dogmatique étant considérée, à l’exemple des deux auteurs précédents, comme une section et la dernière de l’histoire des dogmes.
Frank, bien que partisan de la trichotomie, est dans l’essentiel, d’accord avec Hagenbach, en ce qu’il décompose la matière en Théologie historique, systématique et pratique. Comme Schleiermacher, il fait rentrer l’exégèse dans la Théologie historique et risque par là de compromettre gravement le caractère des documents primitifs du Christianisme, et de l’époque même dont ils sont issus.
C’est ce même point de vue, devenu général d’une façon plus ou moins inconsciente, qui a donné naissance aux dénominations usuelles de dogmatique luthérienne et de dogmatique réformée ; elles supposent toutes les deux que l’objet de la systématisation est, non pas la donnée chrétienne primitive, telle que le sujet la conçoit, mais telle ou telle forme particulière, telle manifestation historique et collective de la conscience chrétienne. La conséquence la plus fâcheuse de ce rapport de subordination attaché à la Théologie systématique à l’égard de la Théologie historique, est d’aliéner les droits de la science, de compromettre la recherche impartiale et désintéressée du vrai ; de laisser limiter et primer d’avance les droits du sujet par une autorité de fait, d’ailleurs toute locale et temporaire, celle des symboles de l’Eglise dont l’individu fait partie.
Cet inconvénient qui dure depuis des siècles, n’est encore que trop sensible aujourd’hui, et les dogmaticiens luthériens de Leipzig et d’Erlangen semblent être là pour prouver que l’union de la faculté de théologie avec l’Etat, dont les dangers sont connus, n’offre pas même les garanties d’impartialité scientifique qu’on se plaît à lui attribuer.
Une question, et nous pouvons bien l’appeler une difficulté préalable, se présente à nous dans le sujet qui nous occupe. En rassemblant sans discernement sous un même caractère tous les faits et toutes les doctrines qui durant le cours des âges sont issus du Christianisme, et en leur attachant à tous indistinctement la qualification de chrétiens, comme le font les tendances mystiques mentionnées plus haut, nous courrions le risque, avons-nous dit, de confondre des éléments étrangers au Christianisme, avec ceux qui sont spécifiquement chrétiens, et nous resterions privés de tout critère nous permettant de faire jamais le départ des uns et des autres. Mais ce critère lui-même, par quelle autorité me sera-t-il fourni, si ce n’est par une de celles qui sont accréditées par la science elle-même ? Ce critère une fois formulé et justifié comme tel, sera un des résultats de l’apologétique, par exemple, qui est déjà une discipline théologique proprement dite, et je puis me croire jeté dans cette contradiction de faire de la théologie avant d’en faire et pour pouvoir en faire.
Heureusement que la question se simplifie beaucoup à nos yeux, en ce que le Christianisme est un fait, une institution historique, dont l’appréciation est soumise, par conséquent, aux analogies de l’histoire et aux règles du bon sens. Or le bon sens m’enseigne, indépendamment de tout préjugé dogmatique et avant toute apologétique, que l’essence authentique d’une institution historique ne peut être trouvée qu’à ses origines ; que c’est seulement au fondateur de cette institution et à ses collaborateurs immédiats, que nous devons aller en demander la définition. Encore une fois il s’agit ici, non pas de la conformité de la chose à la vérité absolue, mais de la notion véritable de la chose elle-même.
Cette règle constante de critique historique, que nous pourrions illustrer en l’appliquant au cartésianisme, au mahométisme, à toute forme religieuse ou philosophique rattachée par son nom même à un fondateur, s’applique de même au Christianisme, et nous en tirons la conclusion immédiate que ce sont le ou les fondateurs de la religion chrétienne, et les documents émanant des origines de cette religion, qui devront avoir pour nous une autorité normative, non pas encore dans le domaine universel de la vérité, mais en matière de vérité chrétienne.
Disons par exemple, que le paulinisme lui-même, dans lequel on a prétendu absorber le Christianisme primitif, et qui en est certainement une des interprétations les plus fidèles, n’est pourtant encore qu’un des types particuliers de la vérité chrétienne ; et l’on ferait tort au Maître, l’on ferait tort même au disciple qui eût protesté avec une sainte indignation contre cette entreprise, en substituant dans la science ou dans la reconnaissance des hommes l’œuvre et la personne de Paul à l’œuvre et à la personne de Jésus-Christ.
Le principe que nous venons d’établir condamne d’avance toute théorie scientifique et ecclésiastique, et par conséquent aussi toute méthode encyclopédique, consistant à faire rentrer la donnée chrétienne primitive dans la série des réalisations historiques du fait chrétien ou de l’idée chrétienne, fût-ce en tête de cette série ; car soit qu’on nous présente ensuite un Christianisme surchargé d’éléments adventices, ou un Christianisme censé épuré et perfectionné, que cette donnée nouvelle soit, disons-nous, plus ou moins que le Christianisme de fondation, qu’elle soit plus ou moins que lui rapprochée de la vérité absolue, elle n’est plus en tout cas la forme religieuse répondant au nom de Christianisme.
Mais comment les faits et les doctrines qui constituent le Christianisme primitif nous ont-ils été transmis à travers les siècles ? Si cette transmission s’était faite par voie de tradition orale, et cela d’une manière authentique et suffisamment accréditée, ce serait à cette tradition aussi que nous demanderions la notion et la définition du Christianisme authentique. Mais le cas que nous venons de supposer ne s’est pas produit, ou du moins les chances d’erreur qui eussent affecté nécessairement ce mode de transmission, l’ont rendu de très bonne heure insuffisant. Ces chances d’erreur ont dû être écartées par la rédaction de documents faits à une époque assez rapprochée des faits pour mériter eux-mêmes la qualification de primitifs.
Nous n’avons pas pour le moment à instituer une enquête anxieuse sur l’authenticité ou l’ancienneté de tel ou tel des écrits reçus depuis quinze siècles dans le recueil du Nouveau Testament. Si même la critique sévèrement interrogée devait enlever l’un ou l’autre d’entre eux à la date ou à l’auteur que la tradition lui a attribués, il resterait pourtant dans nos mains un fonds d’informations suffisant pour nous permettre d’asseoir une science traitant de la personne et de l’œuvre de Jésus-Christ, et de ses premiers témoins autorisés dans le monde.
Les considérations qui précèdent et qui s’opposent aux conceptions dites mystiques du Christianisme, nous étaient, disions-nous, préalablement nécessaires pour déterminer le nombre et l’ordre des principales disciplines théologiques. S’il est vrai que la théologie est la science du Christianisme, que le Christianisme authentique ne se reconnaît qu’à ses origines, et que cette donnée originelle n’existe pour nous que sous la forme de documents écrits, ce sont ces derniers qui seront l’objet premier de l’étude scientifique dans le domaine de la théologie. Une fois ces documents reconnus par la critique, la théologie procédera à leur égard, comme toute science le ferait à sa place, par voie d’analyse d’abord, puis de synthèse. Par l’opération analytique, la théologie s’efforce d’extraire toute la donnée chrétienne des documents qui nous l’ont transmise à travers les siècles ; elle fouille, pour ainsi dire, la mine dans toutes ses veines ; après quoi, passant à sa seconde opération principale, elle ordonne sous certains chefs, sous certains principes, tous ces matériaux épars, et elle s’efforce de ramener enfin, s’il est possible, ces principes eux-mêmes à un terme qui soit la raison téléologique de toutes les données acquises dans l’opération précédente.
Nous venons de désigner la Théologie exégétique qui est l’opération première, empirique ou analytique, dans le système théologique, et la Théologie systématique, qui est la seconde, l’opération synthétique.
Mais si le Christianisme authentique doit être recherché et peut être reconnu seulement à ses origines, le Christianisme tout entier n’y est point renfermé.
Il a eu son cours dans l’histoire, et chacun devra reconnaître qu’il est encore une des puissances du jour. La théologie d’ailleurs a, comme toute science, une visée pratique qui doit se réaliser dans l’état présent et dans la vie de l’Eglise. Mais la conduite à tenir dans le présent résulte pour une bonne part des expériences de tout le passé. L’histoire de tous les siècles traversés par l’Eglise chrétienne depuis l’époque de sa fondation à l’époque actuelle, doit éclairer les sentiers que nous suivons aujourd’hui. Comment et par quelles voies diverses le principe chrétien est-il parvenu jusqu’à nous en triomphant de toutes les difficultés et de tous les dangers qui s’opposaient à ses succès ? Comment les représentants et les défenseurs de ce principe doivent-ils s’y prendre pour le faire prévaloir au sein de la génération contemporaine ? C’est à ces deux questions connexes l’une à l’autre que sont appelées à répondre deux nouvelles disciplines : la Théologie historique et la Théologie pratique ; et dans chacune d’elles devront se rencontrer et se combiner à leur tour le procédé empirique ou analytique et le procédé synthétique.
Conformément aux principes que nous venons d’exposer, nous diviserons les quatre disciplines principales de la théologie que nous venons d’énumérer, en deux groupes déterminés par la nature spéciale de l’objet d’étude dans chacun d’eux ; et nous passerons successivement en revue les disciplines théologiques relatives au fait chrétien considéré : 1° dans sa réalisation primitive et normale ; 2° dans ses réalisations successives, de l’époque de fondation à l’époque actuelle.
Dans le Bulletin théologique de la Revue chrétienne (année 1863), M. le professeur Godet propose une division des sciences théologiques toute différente de la nôtre, mais qui ne l’exclut point. La matière de la théologie se décompose, selon lui, dans la connaissance du fait du salut, ou Théologie spéculative ; et dans la théorie de l’art de sauver, ou Théologie pratique. Nos réserves faites sur les termes employés ici, nous constatons l’accord possible de ce point de vue avec les principes que nous avons exposés.