« Un abîme appelle un autre abîme, » une affliction une autre affliction. Hier, tu me frappais, Seigneur. Aujourd’hui, tu me frappes encore, et ton dernier coup me semble toujours plus rude que le précédent. N’y a-t-il aucune provocation de ma part dans l’épreuve que tu m’envoies ? Hélas ! je le crains bien, ou plutôt j’en suis convaincu ; quand, remontant dans ma vie, j’y cherche le fil des événements qui ont amené tes châtiments, je me retrouve moi-même au point de départ : c’est moi qui me suis préparé jadis le chagrin qui me ronge maintenant. Ah ? si j’avais voulu te croire, quand tu me parlais dans ma conscience ! Si j’avais su reconnaître ta patience dans ta longue attente ! mais non, ton support m’a semblé une approbation, ou plutôt, c’est moi qui ai voulu m’y méprendre. Oh ! mon Dieu, aujourd’hui, mes yeux sont ouverts. J’ai compris ta leçon ; retire ta main appesantie sur ma tête, et surtout donne-moi de profiter de tes corrections. Donne-moi de trembler à la pensée que tu peux encore me les envoyer plus rudes, plus terribles, et de te bénir de ce que tu m’as épargné. Mais peut-être ne suis-je pas au terme ? peut-être, demain, me réserves-tu quelque chose de pire qu’aujourd’hui ? Oh ! prends pitié, Seigneur, je n’aurais pas la force de le supporter ! non, non, mais fais-moi trouver une issue à toutes mes angoisses, que je puisse voir ton nom écrit en traits d’amour, après l’avoir contemplé en traits de colère. Mais non ; ta colère est encore de l’amour ; tu me frappes, parce que tu m’aimes, je le sais ; je voudrais t’en rendre grâce, et toutefois, je te prie encore de me soulager au milieu de l’épreuve. Tu l’as dit : tu n’éprouves personne au delà de ses forces. Seigneur, les miennes sont épuisées ; cesse de m’éprouver, ou du moins viens me fortifier, afin que je puisse dire avec ton Fils, à Géthsémané : « Père, que ta volonté soit faite, » car je sais que si Jésus est mort, il est enfin ressuscité.