Malheur à celui… qui augmente le fardeau de ses dettes.
La Bible est catégorique : Pas de dettes ! Ne devez rien à personne si ce n’est de vous aimer (Romains 13.8).
Prenant au sérieux et à la lettre cette parole de Paul, certains chrétiens s’abstiennent, non seulement de contracter des dettes, mais encore de recourir à un emprunt indispensable au développement de leur entreprise ou à l’acquisition de leur maison.
Leurs scrupules sont-ils fondés ?
Sans doute convient-il de préciser ce qu’il faut entendre par dette et chercher à discerner en quoi une dette diffère d’un emprunt.
Ces termes sont-ils totalement synonymes ?
Une personne est endettée lorsqu’elle doit de l’argent à un particulier (facture non réglée, prêt non restitué…). L’emprunt est plus généralement souscrit auprès d’un organisme (Banque, Crédit Foncier, P. et T…) qui avance la somme demandée et fixe les modalités de son remboursement. S’endetter et emprunter sont, à première vue, des termes équivalents car la démarche est la même, quelle que soit la nature du créancier.
Cependant, un emprunt n’est pas une dette aussi longtemps que l’emprunteur est en mesure de tenir ses engagements. Il devient une dette lorsque la personne :
Je puis emprunter avec bonne conscience :
Je ne devrais jamais agir sans avoir le feu vert de Dieu. Si j’éprouve quelque malaise à souscrire un emprunt d’une certaine importance, je remettrai l’opération à plus tard : Ce qui n’est pas le produit d’une conviction est péché déclare l’apôtre (Romains 14.23).
Ne te détourne pas de celui qui veut emprunter de toi (Matthieu 5.42). Emanant de Jésus lui-même, cette injonction a culpabilisé nombre de chrétiens scrupuleux. En effet, dois-je systématiquement répondre aux sollicitations de tous les mendiants qui tendent la main dans le Métro ou à chaque coin de rue ? A tous les clochards qui frappent à ma porte (et les pasteurs en accueillent souvent !) ? Ne sont-ils pas des professionnels de la misère qu’on encourage au vice en accédant à leur requête (1) ?
(1) Habitant en plein Paris, j’ai pu observer un mendiant qui s’installait, jour après jour, devant une église, sous ma fenêtre. J’ai compté combien de pièces tombaient dans sa grande boîte en un quart d’heure et me suis approché pour considérer la valeur moyenne de ces pièces. Je pus conclure que cet homme gagnait 7 à 8 fois mon salaire. Ce calcul m’a été confirmé par une sergente de l’Armée du Salut qui avait reçu les confidences d’un clochard. Par ailleurs, il faut aussi constater que le nombre des clochards a nettement augmenté avec le développement du chômage, soulignant ainsi l’importance du facteur économique.
La loi de Moïse faisait un devoir à l’enfant d’Israël de porter secours à l’indigent, sans prélever d’intérêt lorsqu’il s’agissait d’un compatriote (Deutéronome 15.7, 11 ; Exode 22.25 et Lévitique 25.35, 37). Il était condamnable de presser son débiteur et de l’accabler d’usure (Exode 22.15). Durant l’année sabbatique, le créancier ne devait rien réclamer de l’Israélite (la terre n’étant alors pas cultivée). A l’approche de cette année, le prêteur, que pouvait faire hésiter un trop long délai pour recouvrer son avance, devait se montrer charitable et considérer les intérêts de l’indigent (Deutéronome 15.1, 3, 7, 10).
Si l’on replace cette parole de Jésus dans son contexte (Matthieu 5.38-48) il apparaît, semble-t-il, que le Sauveur encourage ici moins un acte d’entraide qu’un geste d’apaisement et de patience en réponse à une sollicitation violente, brutale. De fait, de quoi Jésus entretient-il ses auditeurs sur la montagne ? Des persécuteurs, des méchants qui s’acharnent contre les enfants de Dieu, aussi leur conseille-t-il de « ne pas résister au méchant » (v. 39) mais de « riposter » par l’amour (v. 44). L’évangéliste Luc, qui reprend ce discours, paraît confirmer cette façon de voir : Ne réclame pas tes biens à celui qui les prend (6.30).
Je ne sais si cette explication est la bonne. Il serait dommage d’en faire un prétexte pour ne jamais ouvrir sa bourse à qui réclame aide et secours. Avec quelle insistance Jésus invite les siens à prêter sans espoir de retour, à fonds perdus ! Il préconise la pratique d’une charité désintéressée appelée tôt ou tard à recevoir sa récompense ; en tout cas dans l’Au-delà. Gardons constamment les yeux fixés sur la rémunération à venir, c’est important.
Je pense qu’il faut avoir été « roulé » bien des fois pour discerner quand il convient de résister à certains quémandeurs. Si une personne réputée dépensière, accumulant les dettes, me demande un chèque pour faire des achats somptueux, je resterai sourd à sa requête en lui donnant les raisons de mon refus. Il m’est arrivé d’inviter un clochard (à qui je proposai un sandwich plutôt que de l’argent) à cesser de vivre aux crochets des autres, d’être oisif et adonné à la boisson (la plupart d’entre eux puent le vin). Paul dit sans ménagement : Si quelqu’un ne veut pas travailler, qu’il ne mange pas non plus. (2 Thessaloniciens 3.10). Ne pas céder à certaines sollicitations est une autre façon de ne pas se détourner de celui qui cherche à emprunter.
Cependant, à côté des « faux miséreux » à qui je dois résister, il y a d’authentiques détresses, des familles sans ressources méritant assistance. Je serais grandement coupable de me détourner de telles gens. Avec joie et empressement je me porterai plutôt au devant d’eux pour les « dépanner » et leur témoigner un peu de l’amour du Seigneur.
Il est bon de s’examiner sérieusement sous le regard de Dieu.
Ai-je dans le passé confié des sommes importantes à des personnes démunies ne pouvant faire face à certaines échéances ? Avec ou sans intérêt ? Ai-je au contraire opposé un refus alors que j’en avais les moyens ? La crainte de perdre mon argent m’a-t-elle fait reculer ? Suis-je vraiment détaché des richesses ?
QUESTIONS