Propos sur le temps

À TEMPS PLEIN

Une bonne mesure, serrée, secouée, et qui déborde.

Luc 6.38

Le saviez-vous ? Napoléon, dit-on, était en mesure de dicter plusieurs lettres à la fois, sans perdre le fil de ses idées, sans demander à ses secrétaires de revenir sur les phrases précédentes pour enchaîner la suite. Brillant stratège, il mena à terme une foule de projets et surtout édicta un nombre considérable de lois touchant les domaines les plus divers de la vie publique. Tout cela, en quelques années de pouvoir. Sans être exceptionnellement doué comme ce chef d’État, il faut convenir que les possibilités d’un homme qui se donne avec passion à sa tâche sont immenses, surtout s’il s’agit d’un croyant réellement consacré au Maître de la moisson.

Un homme, et de loin, a dépassé un Napoléon ou les gens de sa trempe. C’est Jésus. Son temps, parfaitement rempli, était selon sa propre expression, telle « une bonne mesure serrée, secouée, et qui déborde » (Luc 6.38). Si l’on écrivait en détail les choses que Jésus a faites, je ne pense pas que le monde même pourrait contenir les livres qu’on écrirait (Jean 21.25). Magnifique témoignage d’un homme qui l’observait de près. Jésus n’avait rien des Pharisiens qui couraient la terre et la mer pour faire un prosélyte (Matthieu 23.15). Son activité débordante n’était ni fébrile, ni survoltée. Il n’a jamais essoufflé son entourage, ni craqué sous le poids d’une tâche démesurée. Parce qu’il possédait le temps, il accomplissait sans hâte les œuvres – toutes les œuvres – demandées par le Père. Quel modèle !

Oui, le Fils de l’homme a beaucoup donné, s’étant d’abord donné lui-même, Il est venu, non pour être servi, mais pour servir et donner sa vie en rançon pour beaucoup (Marc 10.45). Le premier chapitre de l’évangile selon Marc décrit une journée de sabbat (donc de repos) du Sauveur. Jugez plutôt : elle débute à la synagogue par une prédication qui étonne (1.22). Là, il livre un combat avec les puissances adverses et délivre un homme possédé d’un esprit impur (1.23-26). Aussitôt après, Jésus se rend dans la maison de Simon, mais sûrement pas pour s’y détendre : il guérit la belle-mère de Pierre (30-31). Il est tard (32). On s’apprête à fermer les portes lorsqu’on entend au-dehors une foule bruyante (33). Le Fils de l’homme l’aime trop pour songer au repos. Il sort au-devant d’elle, circule dans les rangs, s’occupe de chacun avec compassion. Il guérit toutes sortes de maladies et chasse les démons (34). Le lendemain, aux aurores (35), Pierre trouve Jésus en prière, à l’écart dans un lieu désert… alors qu’il aurait pu, légitimement et avec bonne conscience, s’attarder au lit pour refaire ses forces.

Quel était donc le secret du Seigneur qui sut pareillement maîtriser le temps ? Il était triple si je considère l’Évangile :

PREMIÈRE CONDITION : Une parfaite et constante communion avec le Père. C’est bien connu : Jésus vivait en relation étroite et sans faille avec celui qui l’avait envoyé. Les regards du Fils ne le quittaient pas. Semblable au parfait serviteur dont les yeux se tournent vers la main de son maître (Psaumes 123.2), il restait constamment aux ordres de son Père. Il ne céda pas à des émotions pour se jeter à corps perdu dans des actions humanitaires. Pas plus qu’il ne multiplia les œuvres charitables pour répondre aux immenses besoins de sa génération. Il s’est borné à accomplir la tâche qui lui incombait. L’a-t-on vu une seule fois exprimer le regret de ne pouvoir en faire davantage ? Ou se plaindre de devoir remettre à plus, tard une seule tâche ; faute de temps ? Il lui suffisait de contempler le Père pour savoir ce qu’il attendait de lui : Le Fils ne peut rien faire de sa propre initiative ; il agit seulement d’après ce qu’il voit faire au Père. Le Fils imite tout ce que fait le Père… (Jean 5.19, transcription A. Kuen).

DEUXIÈME CONDITION : Avoir une claire vision de la mission que Dieu nous confie. Jésus n’est pas venu dans ce monde pour visiter notre planète ou partager la condition des hommes. Sa mission, il le savait, était de rétablir l’harmonie entre le Père et ses créatures. Déjà à l’âge de douze ans, il s’en entretenait dans le Temple avec les docteurs de la loi : …il faut que je m’occupe des affaires de mon Père (Luc 2.49). Plus tard, il précisera devant la foule : Je suis descendu du ciel pour faire, non ma volonté, mais la volonté de celui qui m’a envoyé. Or, voici la volonté de celui qui m’a envoyé : que je ne perde rien de tout ce qu’il m’a donné, mais que je le ressuscite au dernier jour. Voici la volonté de mon Père : que quiconque voit le Fils et croit en lui ait la vie éternelle ; et je le ressusciterai au dernier jour (Jean 6.38-40).

Reconnaissons que les gens efficaces possèdent généralement la claire vision de ce qu’ils doivent entreprendre dans leur vie professionnelle ou familiale. Tout en accomplissant jour après jour tout ce que notre main trouve à faire avec la force dont nous disposons (Ecclésiaste 9.10), pourquoi ne demanderions-nous pas au Seigneur de nous communiquer la vision de la tâche qu’il nous incombe de réaliser dans l’église ou hors de l’église ?

TROISIÈME CONDITION : Un réel amour pour le prochain. Animé d’un grand amour pour son Père, le Fils n’en était pas moins saisi d’une immense compassion pour l’humanité rebelle et malheureuse. Une compassion qui ne resta pas sans lendemain, car il ne ménagea pas sa peine et ne recula devant aucun sacrifice pour voler au secours des déshérités de la vie et des multitudes « languissantes », perdues et sans berger. Celui qui aime son prochain peut-il rester inactif, stérile, replié sur lui-même ? Il y a trop de détresse autour de lui pour qu’il puisse jouir égoïstement de son salut. Dans le foyer comme au travail ou à l’église, l’amour conduira le chrétien à entreprendre (ou à ne pas entreprendre) les actions les plus diverses et, pourquoi pas, les plus inattendues. Qui est revêtu de l’amour (Colossiens 3.14) ne chôme pas : Faites tous vos efforts pour joindre à votre foi… la piété, à la piété la fraternité, à la fraternité l’AMOUR… Si ces choses existent en vous et s’y multiplient, elles ne vous laisseront pas sans activité ni sans fruit pour la connaissance de notre Seigneur Jésus-Christ (2 Pierre 1.5-8).

Paul fut un vaillant serviteur chaussé du zèle que donne l’Évangile de paix (Éphésiens 6.15). L’apôtre « traitait durement son corps » afin de ne pas céder à la mollesse et à l’égoïsme. Il pouvait affirmer en toute humilité : …j’ai travaillé plus qu’eux tous (les apôtres) ; non pas moi toutefois, mais la grâce de Dieu qui est avec moi (1 Corinthiens 15.10). Il est instructif de suivre, dans Actes chap. 20, les travaux de cet ouvrier infatigable. Après l’émeute d’Éphèse, propre à ébranler un homme physiquement et psychiquement, l’apôtre ne songe pas à s’offrir un mois de vacances pour calmer ses nerfs. Il part aussitôt pour la Macédoine (v. 1), laissant entendre par là qu’il visitera les églises de Bérée, de Philippes et de Thessalonique. Après avoir en ces lieux enseigné et exhorté les frères, il part pour la Grèce (v. 3), retourne en Macédoine et s’embarque à Philippes pour Troas où il parle aux chrétiens jusqu’au petit jour (v. 11). S’accordera-t-il enfin un peu de repos ? Pas du tout puisqu’il repart le lendemain pour Assos (v. 7). Tandis que ses amis voyagent par bateau, l’apôtre parcourt à pied, en solitaire, les trente kilomètres qui séparent Troas d’Assos. Il veut être seul pour méditer et chercher la pensée du Seigneur, car de grandes épreuves l’attendent à Jérusalem (v. 13). Enfin, à Milet où il fait une brève étape, il rencontre pour la dernière fois les anciens d’Éphèse (v. 17). L’entretien se prolonge et se termine dans les larmes, car la séparation apparaît définitive :Tous, avec de grandes lamentations, se jetaient au cou de Paul et l’embrassaient. Ils étaient surtout affligés de ce qu’ils n’allaient plus revoir son visage (v. 37-38). Quel zèle !

« Seigneur, pardonne ma mollesse, mes négligences et mon égoïsme. Rends-moi capable d’imiter l’apôtre qui ne faisait aucun cas de sa vie. Que tout mon temps soit employé pour toi. Qu’il le soit aussi pour le bien de ceux que je côtoie. »

QUESTIONS

  1. Après lecture de ce qui précède, avez-vous l’impression que votre vie est bien remplie, à la gloire du Seigneur ? Sur quels points avez-vous été repris en parcourant ce chapitre ?
  2. Êtes-vous sensible à la détresse de ceux que vous rencontrez au travail ? Qu’’avez-vous fait pratiquement pour soulager leur peine ?
  3. Avez-vous soif de vivre en étroite communion avec Dieu ? Relisez et vivez Jean 7.37-39.

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