Mon Dieu, donne-moi d’être simple, vrai, sincère en toutes choses. Que ma parole et mes actes ne soient qu’une empreinte fidèle de ma pensée. Que je n’en exagère ni n’en affaiblisse l’expression. Oh ! que la vie serait plus douce, si nous voulions nous donner pour ce que nous sommes ! Comme la confiance s’établirait vite, gagnerait les cœurs et multiplierait nos joies spirituelles ! Mais, hélas ! chacun se tient sur la réserve ; chacun a deux manières d’exposer le même fait, et, en voyant la défiance d’autrui, on devient soi-même défiant. Le mal nous gagne, et nous sommes tout étonnés d’avoir fait ce que nous détestons. Mon Dieu, arrache-moi à cette funeste contagion ; donne-moi le courage d’être toujours vrai ; donne-moi l’humilité nécessaire pour rester parfaitement simple ; donne-moi la charité pour être sincère, même envers ceux que je risque de blesser.
Mais est-ce bien l’exemple d’autrui qui m’entraîne, à farder, dénaturer ou taire la vérité ? N’est-ce pas souvent ma propre passion ? N’ai-je rien à cacher de mes actes et de mes pensées ? N’ai-je pas la vanité de me grandir dans l’opinion ? Le calcul n’entre-t-il pour rien, même dans mes sacrifices ? Et, s’il en est ainsi, puis-je accuser mes frères de mon manque de simplicité et de véracité ? Non, Seigneur, et si je voulais plonger plus avant dans les replis de mon cœur, peut-être trouverais-je encore, dans cette responsabilité rejetée sur les autres, un nouveau signe de mon manque de simplicité et de droiture. Comme notre premier père, je dis volontiers : Ce n’est pas moi, c’est la femme que tu m’as donnée ! Oui, Seigneur, cette fois, voilà bien la vérité : j’aime la sincérité, je lui rends hommage, et, en cela, je me condamne moi-même ; c’est moi qui fais le mal, c’est moi qui veut le cacher aux hommes, c’est moi qui, de mille manières plus ou moins subtiles, sais si bien fausser la vérité. Ah ! Seigneur, si je n’en avais pas tant l’habitude, je serais plus sensible à cette triste découverte, je te demanderais plus ardemment la guérison de ce mal, et toi, sans doute, tu me guérirais. Purifie donc mon cœur, et alors mes lèvres diront toujours la vérité.