Origine de la Synagogue. — Le but des Synagogues. — Leur nombre. — Comment elles se fondaient. — Les chefs de la Synagogue. — Le Hazzan. — Description de l'édifice. — La célébration du culte. — L'ordre du service. — Jésus dans la Synagogue de Nazareth. — Les lectures du Lundi et du Jeudi. — La Synagogue moderne. — Les premières assemblées chrétiennes.
Chaque ville, chaque village possédait une ou plusieurs maisons de réunions publiques consacrées à la lecture de la Loi et à la prière. Leur nom hébreu était Beth-hakeneseth[1] (maison de réunion) ; en araméen : Beth Kenicheta. On les appelait aussi Beth-ha-tephila (maison de prières). La traduction grecque *** se trouve partout dans le Nouveau Testament. Josèphe n'emploie ce mot que trois fois[2].
Dans un édit d'Auguste, dont il nous donne le texte[3], se trouve le terme *** Philon disait ***[4], ***[5] et ***[6], mais ce dernier mot désigne moins la synagogue proprement dite que les réunions à ciel ouvert tenues par les Juifs disséminés hors des villes et à proximité d'un cours d'eau. Ils y accomplissaient les ablutions et purifications ordonnées par la Loi[7].
La tradition attribuait à Esdras l'institution de ces « assemblées » et cette origine est certainement authentique. Ce grand homme comprit la nécessité absolue de réunions périodiques où le peuple entendit lire et expliquer la Loi. Il s'agissait de faire son éducation religieuse et nationale, de lui enseigner ses croyances et ses devoirs envers Dieu. Mais certains Docteurs ne manquèrent pas de trouver cette date trop récente et affirmèrent que la première synagogue avait été bâtie pendant l'exil ; les captifs qui avaient accompagné le roi Joïachim auraient construit une maison de prières sur la terre étrangère avec des pierres apportées de Palestine[8]. Josèphe va plus loin et fait remonter à Moïse l'origine des synagogues ; les Targoums parlent même des synagogues des patriarches[9]. On sait que les Juifs avaient une tendance à tout attribuer à Moïse et aux patriarches. Mais Esdras fut le seul fondateur des maisons de prières et le Psaume LXXIV, verset 8, nomme les synagogues parce qu'il a été composé au temps des Macchabées.
Esdras, en les établissant, fit œuvre de génie. Nulle institution n'a plus contribué à donner à la religion de Moïse la vitalité qu'elle possède encore aujourd'hui. Elle lui permettait de vivre indépendamment du Temple et de ses cérémonies. Avec son manuscrit de la Loi, tout Juif, où qu'il se trouve, peut fonder une synagogue. Il emporte jusqu'au bout du monde sa religion avec lui. Le judaïsme n'a plus besoin de Jérusalem et des sacrifices pour subsister. Il est partout où quelques fidèles s'assemblent et lisent la Thorah.
Il ne faut pas confondre la synagogue avec une église. Elle est un établissement laïque où le prêtre n'a pas une place prépondérante. Le premier à la synagogue, c'est le docteur, c'est quiconque est capable d'enseigner.
Les Pharisiens, ces vrais continuateurs d'Esdras, favorisèrent beaucoup l'établissement des « maisons de prière » par opposition au sacerdoce et aux Saducéens. Ceux-ci ne pouvaient vivre sans le Temple. Ils disparaîtront avec lui dans la catastrophe de l'an soixante-dix ; mais le pharisaïsme ne périra pas, parce qu'il établira, partout où il ira, ses assemblées, ses lectures, ses prières publiques, ses synagogues.
Le nombre de ces établissements était considérable au premier siècle. La seule ville de Jérusalem en avait de 460 à 480[10]. Elles se touchaient, pour ainsi dire ; chaque rue en renfermait plusieurs[11]. Il semble, en vérité, que chaque famille ait eu la sienne. C'est ainsi qu'aujourd'hui on rencontre en Orient un nombre de mosquées tout à fait hors de proportion avec le chiffre de la population et qui sont précisément des mosquées de famille. Parfois c'était une corporation qui fondait une synagogue. Nous savons que les chaudronniers de Jérusalem en avaient établi une.
On s'y réunissait, non seulement le samedi, jour du sabbat, mais encore le lundi et le jeudi. En outre, elle était ouverte trois fois par jour pour les prières[12]. Celle du matin s'appelait Schaharith, celle de l'après-midi[13] Minhah et celle du soir Arbith[14].
La prière du matin était très suivie ; dès les premières heures du jour, avant la chaleur, à la ville comme au village, on pouvait voir les femmes, les Pharisiens dévots, les docteurs de la Loi se rendant à la synagogue et portant leurs Teffillims attachés sur le bras. Ils allaient y réciter leurs prières du matin, laissant les prêtres saducéens offrir seuls au Temple le sacrifice quotidien de l'agneau.
Le Temple n'instruisait pas, on n'y apprenait rien ; aucune prédication n'y était prononcée et on savait d'avance par cœur les formules de bénédiction que les prêtres y réciteraient ; ne valait-il pas mieux aller apprendre à la synagogue ? la vraie édification ne se trouvait-elle pas plus facilement dans l'étude de la Loi, où l'on découvrait toujours des nouveautés, que dans la contemplation stérile d'un sacrifice ? Et, en effet, le premier but de la synagogue était d'instruire[15].
Les docteurs fixèrent à dix le nombre de personnes nécessaires pour fonder une synagogue[16]. Elles formaient ce qu'on appelait minian (le nombre), une sorte de corps moral représentant Israël. Un seul homme pouvait faire l'édifice ou choisir une maison quelconque en l'appelant synagogue. « Si quelqu'un bâtit une maison, disent les Talmuds, et ensuite la consacre en synagogue, elle est de la nature de la synagogue[17]. » « Bâtir une maison, y lit-on encore, dans laquelle on se réunit pour les oraisons, à l'heure de la prière, c'est la synagogue[18]. »
La communauté israélite (Kehilah) prenait une grande importance aussitôt que le minian s'y était formé. Tous les actes du culte pouvaient être célébrés : la circoncision, les mariages, les services funèbres. Un des dix fondateurs de la synagogue s'en chargeait ; ce qui était d'autant plus facile que ces cérémonies étaient beaucoup plus civiles que religieuses[19]. Les pharisiens, prévoyant la ruine possible de la nation et du Temple, avaient préparé l'existence future du Judaïsme dispersé sur toute la terre. Saint Paul devait partout rencontrer ces communautés. Elles servirent puissamment à la diffusion du christianisme. C'est à elles que l'apôtre s'adressait d'abord, et c'est sur le modèle de la Kekila qu'il fondait partout ses Églises, son organisation en était la même ; le service s'y célébrait de la même façon. Les presbytres des premières communautés chrétiennes étaient en tout semblables aux hommes pieux fondateurs de la synagogue. Tous étaient prêtres, tous étaient égaux et élus par le peuple. Il n'y avait point encore de pouvoir central, et saint Paul, imbu des idées pharisiennes depuis son enfance, devait jeter sur le monde ce puissant réseau de sociétés religieuses qui peu à peu détruiront l'Empire.
Parmi les dix membres fondateurs de la synagogue, trois remplissaient les fonctions prépondérantes et étaient appelés « les chefs »,[20] Ils jugeaient les différends qui surgissaient entre les membres, administraient les finances, décidaient de l'admission des prosélytes[21], etc. Ils avaient toute la responsabilité de l'œuvre et, en particulier, des services religieux. L'un des trois présidait les deux autres et était « le chef » par excellence « Rosch hakeneseth[22]. » Jaïrus était le chef de l'importante synagogue de Capharnahum ; mais ce président, ne l'oublions pas, n'avait aucun pouvoir spécial, il n'était que « primus inter pares », et le collège des anciens de la primitive Église s'est calqué sur ce modèle.
Les trois chefs avaient sous leurs ordres immédiats un personnage fort important appelé le Hazzan dans le Nouveau Testament[23]. C'était une sorte de domestique à la fois et de sacristain, auquel était confiée toute la partie matérielle du service. Lorsqu'on fonda des écoles d'enfants en Palestine le Hazzan fat chargé de diriger celles qui avaient moins de vingt-cinq élèves[24]. Il remplissait encore les fonctions d'exécuteur quand le sanhédrin local condamnait quelqu'un à la bastonnade.
La disposition de la synagogue était fort simple. Le bâtiment consistait en une salle rectangulaire plus ou moins grande. Celles des grandes villes avaient à l'intérieur des rangées de colonnes, ordinairement au nombre de quatre. Au dehors un portique de l'ordre grec[25] indiquait qu'on n'avait pas affaire à une maison ordinaire. A l'intérieur, sur un parquet surélevé où se tenaient les Scribes, était le meuble principal, l'armoire sainte (Tébah[26]), dont la façade était tournée du côté de Jérusalem et dans laquelle on tenait renfermés les manuscrits. Ceux de la loi (Thorah) et ceux des autres livres saints (Sepharim[27]). C'étaient, sans nul doute, les manuscrits des Prophètes, celui des Psaumes, celui de Daniel, les cinq rouleaux (Negilloth), (c'est-à-dire le Cantique des cantiques, Ruth, les Lamentations, l'Ecclésiaste et Esther), et d'autres encore. Ils étaient conservés dans une toile de lin[28] et dans un étui[29]. Devant l'armoire un rideau imitait le voile du Temple. La salle était garnie de bancs et, à l'extrémité, sur l'estrade, on apercevait une espèce de chaire[30]. Sur le sol on répandait de la menthe pour parfumer et purifier l'air[31]. Les premières places étaient payées et fort enviées[32]. Les Docteurs de la Loi, les Pharisiens, les personnages importants de la communauté avaient soin de les occuper de bonne heure. Ils étaient d'autant plus en vue qu'ils avaient le visage tourné vers le peuple et le surveillaient ; la foule des simples fidèles venait ensuite et les prosélytes restaient debout à la porte. La synagogue étant destinée à tenir lieu du Temple, on avait une tendance à y distinguer des parties plus sacrées que d'autres. La place des pauvres et des païens était près de l'entrée et figurait le parvis des Gentils. Au fond de l'édifice, au contraire, le parquet plus élevé représentait la cour des prêtres et le sanctuaire. Il est probable aussi que les hommes étaient séparés des femmes comme dans le Temple. Le christianisme, dès son origine, eut soin d'éviter ces distinctions et de proclamer l'égalité des croyants dans l'intérieur des Églises[33].
Le service du Sabbat était fait par sept personnes désignées par le président et appelées à haute voix par le Hazzan. Ce nombre sept n'était pas de rigueur pour les offices de semaine.
S'il se trouvait, par hasard, un prêtre dans l'assemblée, il était appelé le premier à prendre la parole. Les lévites venaient ensuite, puis les simples laïques. Ces sept personnages, presque toujours les mêmes dans les petites localités, sont sans cesse appelés dans les Talmuds : « les sept hommes de bien de la cité ».
L'ordre du service était certainement fixe et invariable au temps de Jésus-Christ. Le moment principal de l'office était celui de la lecture de la Loi, car on était réuni avant tout pour l'entendre et pour l'étudier[34]. La prière précédait cette étude et la lecture d'un passage choisi des Prophètes, suivie de la bénédiction, terminait les exercices religieux.
Il faut distinguer plusieurs parties dans la prière du début. Elle commençait par la récitation du Schema[35]. Puis venait le Schemoné Esré (les dix-huit actions de grâces)[36]. Le peuple, pendant cette récitation solennelle, se tenait debout[37], le visage tourné vers Jérusalem et le Lieu très Saint[38]. Celui qui priait, prenait le nom de Chaliach tsibbour. Il se plaçait devant l'armoire aux manuscrits[39].
Tout membre de l'assemblée pouvait être appelé par le président à remplir cette importante fonction. Les mineurs seuls étaient exceptés[40] et Jésus-Christ peut avoir quelquefois prononcé ces premières actions de grâces soit à Nazareth, soit à Capharnahum. Le peuple répondait d'une voix forte Amen à la fin de chaque prière[41], donnant ainsi son adhésion aux paroles prononcées.
La lecture de la Loi venait ensuite ; le Hazzan prenait le rouleau du manuscrit dans l'armoire sainte, le tirait de son étui, et le remettait au premier lecteur. Les sept membres désignés se levaient[42] et lisaient tour à tour, trois versets au moins chacun. Le premier prononçait, avant de commencer, une courte formule de bénédiction qu'il répétait aussi à la fin[43]. La Thorah était divisée en 153 Sedarim (sections) appelées aussi Parschioth. En trois ans on l'avait lue en entier, Plus tard, on fit les sections trois fois plus longues, et la Loi tout entière fut lue dans l'espace d'une année. Cet usage était celui de Babylone, où l'on avait les 54 Parschioth, divisions actuelles de nos Bibles hébraïques, mais il n'existait pas encore en Palestine au premier siècle, et le fragment lu chaque sabbat était d'environ une cinquantaine de versets.
Le Hazzan se tenait tout le temps près du lecteur et veillait à ce qu'il ne commit pas d'erreur et ne lût rien d'inconvenant pour une lecture publique. Chaque verset, lu dans la langue sainte, était immédiatement traduit en araméen ; le mineur même pouvait traduire. On ajoutait toujours à la lecture et à la traduction un commentaire oral (Midrasch)[44], sorte d'homélie qui prit une grande importance dans les Églises chrétiennes et devint peu à peu le sermon. Ainsi donc le Targoum a donné naissance à la prédication et celle-ci se trouve être essentiellement une création des Pharisiens. De l'explication paraphrasée du texte on passa peu à peu aux développements et à l'exhortation édifiante. Au temps de Jésus-Christ l'usage de ces développements était général.
On ne les faisait pas seulement à la synagogue, mais aussi en plein air. Les Rabbis avaient l'habitude de haranguer le peuple. « Il y a foule partout où l'on prêche », dit la Mischna[45]. Quand un de ces prédicateurs se trouvait dans l'assemblée, on lui offrait la parole. Il s'appelait Dareschan. Il y en avait qui, comme Jésus-Christ, étaient prédicateurs itinérants.
La lecture de la Loi terminée, la personne qui avait dit la première prière lisait un fragment tiré des Prophètes[46]. Cette péricope portait le nom de haphtare (leçon finale), parce qu'elle achevait l'office. Son lecteur, appelé maphtir, était désigné par le chef de la synagogue ; il lisait trois versets de suite, puis on les traduisait. Jésus-Christ lut un jour une de ces leçons finales dans la synagogue de Nazareth[47]. Il est possible cependant qu'il ait choisi lui-même le passage. Remarquons qu'il ne lut que deux versets; il en avait le droit, parce qu'il se proposait de les commenter.
La bénédiction finale était prononcée ensuite et l'assemblée se retirait. Voici donc quel était l'ordre habituel du service de la synagogue : le Schema ; le Schemoné Esré ; lecture du texte de la Loi (section du jour) ; traduction orale en araméen, commentaire appelé Midrasch ; lecture des Prophètes ; traduction orale en araméen ; Bénédiction.
Il est possible que le chant des Psaumes fit aussi partie du service, car ce recueil était devenu le livre de cantiques de la synagogue. Enfin trois diacres étaient chargés du soin des pauvres. Deux d'entre eux faisaient la collecte. Le troisième les aidait dans les distributions. On acceptait les dons en nature aussi bien que l'argent[48].
Les synagogues, avons-nous dit, étaient ouvertes trois fois par jour pour la prière. Le lundi et le jeudi, jours de marché et d'audience judiciaire (deuxième et cinquième jour de la semaine), on se réunissait plus spécialement encore à la synagogue. La foule de la campagne affluait à la ville ou au village et on en profitait pour lui faire entendre la Loi. Cette lecture était simplement ajoutée à la prière du matin. Trois membres du conseil se la partageaient[49]. Les Talmuds font remonter jusqu'à Esdras l'établissement de ces deux services supplémentaires[50].
Les synagogues étaient très fréquentées. Tous les Juifs sans exception s'y rendaient régulièrement et en être expulsé était le dernier des affronts[51]. Tous vos biens étaient confisqués.
Il y avait vingt-quatre causes d'excommunication et l'une d'elles, rédigée sans doute longtemps après l'établissement du christianisme, était ainsi conçue : « Celui qui confesse que Jésus est le Christ ».
Les trois chefs jugeaient de toutes les affaires litigieuses[52] et l'une des peines qu'ils prononçaient le plus souvent était la bastonnade. Elle n'avait pas le caractère infamant qu'elle a toujours eu en Occident. Cette flagellation était exécutée soit dans l'intérieur de la synagogue, soit en plein air par le Hazzan. Saint Paul nous raconte l'avoir reçue cinq fois[53].
La synagogue moderne peut-elle être comparée à la synagogue ancienne ? Oui, mais elle ne saurait lui être assimilée. La tendance à imiter le Temple, qui existait déjà autrefois, s'est développée depuis la ruine du sanctuaire, et les pompes actuelles des services religieux dans les synagogues ne peuvent nous donner aucune idée de la simplicité antique du culte, tel qu'on le célébrait au temps de Jésus-Christ. Les ressemblances sont tout extérieures. La plus frappante, celle qui choque tout chrétien à son entrée dans une synagogue est l'absence complète de recueillement. On se croirait sur une place publique.
Le culte des premiers chrétiens, nous l'avons dit, a été copié sur le service de la synagogue ; et il est probable que d'abord il n'y eut pas beaucoup plus de recueillement chez eux que chez les Juifs[54]. La différence fondamentale des deux services, fut, chez les chrétiens, la célébration de la Cène; et encore l'établissement de ce rite fut-il certainement facilité par l'usage pharisien des agapes dont nous avons parlé. Mais le repas eucharistique, célébré solennellement au culte, renfermait en germe tous les développements à venir.
Dès le second siècle, une hiérarchie s'organise, le clergé est mis à part et séparé des fidèles, le chœur est, dans la maison de prières, distingué de la nef : le repas eucharistique deviendra bientôt un sacrifice. Encore quelques pas en avant et la messe est créée.
Les protestants, en supprimant ces développements du culte chrétien, ont voulu le ramener à ce qu'ils appellent « sa pureté primitive. » Mais à quelle époque du premier siècle faut-il s'arrêter ? La transition de la synagogue à l'Eglise a été insensible. Quand saint Paul parcourt l'empire, les assemblées de la communauté de Corinthe ressemblent fort à celles de la plus indisciplinée des synagogues. L'élément juif y a apporté avec ses usages traditionnels ses habitudes de désordre et ses disputes. Il est certain, au contraire, qu'après la mort des apôtres, quand un lien se forma entre les diverses églises, le calme s'établit, la sainte Cène fut entourée d'un profond respect, le prêtre commença à avoir une grande influence sur le simple fidèle.
Eh bien, il nous semble que c'est à cette époque que l'on devrait chercher le type du vrai culte chrétien. Les assemblées du second et du troisième siècle, telles que nous les décrivent les Pères d'alors[55], répondent bien à ce que doit être le service de l'Eglise. Ce n'est pas le culte catholique de l'avenir ; la Cène est célébrée telle que Jésus l'a instituée ; elle n'est pas encore le sacrifice renouvelé du Christ ; mais ce n'est pas non plus la sécheresse du calvinisme et du puritanisme protestant. La liturgie est simple mais complète, le peuple prend part au service ; la lecture des saintes Ecritures est à la place qui leur convient, le sermon est déjà important sans être trop étendu et sans jouer le rôle prépondérant. Bref, sauf quelques modifications de détail, il nous semble que c'est en imitant le service du second et du troisième siècle que les protestants de nos jours réaliseront le mieux les réformes urgentes de leurs rites religieux.
[1] Talm. Berakhoth, VII, 3 à la fin. Au pluriel Batté-Kenesioth. On trouve aussi Beth Vaad (Sotha, IX, 15) et Moadé-El, sainte convocation.
[2] Ant. Jud., XIX, 6, 3. D. B. J., II, 14, 4-5 et VII, 3, 3.
[3] Ant. Jud., XVI, 6, 2.
[4] Leg. ad Caïum, § 40.
[5] vita Mosis.
[6] In Flaccum, § 6; voy. aussi Jos., Vita, § 54.
[7] Épiphane, Hoeres, 80, 1, nous décrit la des Samaritains qu'il avait vue à Sichem. Celle de Philippes nous est décrite Actes des apôtres XVI, 13 ; voy. aussi Jos., Ant. Jud., XIV, 10, 23.
[8] Meghilla, fol. 28 a.
[9] Targ. Onkelos, sur Gen. XXV, 27 ; sur Deut. XXXII, 10 ; Targ. Jonath., sur Esaïe, I, 3, etc.
[10] Voir notre chapitre sur Jérusalem, liv. I, chap. II.
[11] Le livre des Actes des apôtres en nomme quelques-unes : celles des Hellénistes des affranchis, des Juifs de Cyrène, d'Alexandrie, de Cilicie, d'Asie (ch. VI, verset 9).
[12] Talm., Jérus., Berakhoth, VIII, 3.
[13] Actes des apôtres, III, 1.
[14] Megillah, 2 a.
[15] *** dit le Nouveau Testament. Ev. de Matth., IV, 23 ; Ev. de Marc, I, 2 ; VI, 21 ; voyez aussi Josèphe, Contr. Appion, II, 17.
[16] Megillah, ch. I ; halac., 3.
[17] Lightfoot, in Luc VII, 5.
[18] Sanhédrin, I, 6 : voir aussi Jos., D. B. J., VI, 9, 3.
[19] Nous avons remarqué (livre I, chapitre VIII), que les mariages se célébraient, au premier siècle, sans cérémonie religieuse. Les Juifs n'instituèrent que beaucoup plus tard la bénédiction nuptiale à la synagogue, telle qu'elle se pratique aujourd'hui.
[20] Actes des apôtres, XIII, 15 ; Ev. de Marc, V, 22.
[21] Sanh., I, 2.
[22] Joma, 7, 1, Sota, 7, 7-8 ; Ev. de Marc, V, 35, 36, 38 ; Ev. de Luc, VIII, 49 ; XIII, 14 ; Actes des apôtres, XVIII, 8, 17; ou simplement Ev. de Matth. IX, 18.
[23] Ev. de Luc, IV, 20.
[24] Mischna, Schabbath, 1, 3. De même, dans plusieurs Églises catholiques ou protestantes, le maître d'école remplit le dimanche les fonctions de chantre. (Voir livre 1, chapitre VII, l'instruction des enfants.)
[25] Les ruines bien conservées de plusieurs synagogues de Galilée ont des portiques grecs. Celles de Tell-Hum (Capharnahum) ne remontent malheureusement pas au premier siècle.
[26] Megillah, III, 1 ; Taanith, II, 1.
[27] Id. id. id.
[28] Id. Id. id.
[29] Schabbath, XVI, 1.
[30] Talmud Babyl., Sukka, 51, b.
[31] Lightfoot, Hoae Hebraïcae, etc., p. 432. Indiquons encore, pour compléter le mobilier de la synagogue, la lampe suspendue à la voûte, qui brûlait jour et nuit (Therimoth, XI, 10), usage éternel de toutes les religions. L'homme primitif, en découvrant le feu, lui avait donné un caractère sacré. Il était difficile de le rallumer ; l'entretenir fut donc un devoir qui reçut immédiatement une signification religieuse. Le premier autel de l'humanité fut le foyer où le père de famille gardait le feu nécessaire à la vie. Plus tard les vestales de Rome entretiendront le feu sacré. Le Temple de Jérusalem et les synagogues gardent la lampe qui ne doit point s'éteindre et chaque Eglise catholique a aussi son luminaire éternel. Enfin, il faut signaler dans la synagogue du premier siècle les trompettes (Shopharoth). Le Hazzan s'en sert pour annoncer, du haut des toits, le Sabbat, le nouvel an, la néoménie. les jours de jeûne (Taanith, III, 8). Peut-être servent-elles aussi à faire connaître l'aumône exceptionnelle de quelque dévot formaliste. (Ev. de Matth., VI, 2 ; Taanith, fol. 8 b.)
[32] Ev. de Matth., XXIII, 6.
[33] Épître de Jacques, II, 2 et suiv.
[34] Actes des apôtres, XV, 21 ; Jos., Contr. App., II, 17.
[35] On appelait ainsi, nous l'expliquerons au chapitre X en parlant de la prière, trois passages de la Loi : Deut., VI, 4-9 ; XI, 13-21 et Nombres XV, 37-41.
[36] Voir plus loin chapitre X.
[37] Ev. de Matth , VI, 5 ; de Marc, XI, 25 ; de Luc, XVIII, 11 ; Berakhoth, V, 1.
[38] Berakhoth, IV, 5-6.
[39] Id. V, 3-4.
[40] Megillah, IV, 6.
[41] Taanith, II, 5 ; I Cor., XIV, 16 ; Néhémie, V, 13 ; VIII, 6 ; voir aussi Deutéronome, XXVII, 15 et Nombres, V, 22.
[42] *** (Luc, IV, 16) ; Megillah, 3.
[43] Megillah, IV, 2.
[44] Ce Midrasch se faisait toujours. (Matth , IV, 21 et suiv. ; Marc, I, 21.) On le prononçait assis (Luc, IV, 20). Cependant il s'agit ici d'une réflexion faite par le Christ après la lecture de deux versets et d'une prophétie et Actes XIII, 16, Paul se lève pour exhorter le peuple. Le Midrasch était plus ou moins long ; on s'étendait sur certains passages ; on passait, au contraire, très rapidement sur ceux qui ne convenaient pas à une lecture publique.
[45] Berahhoth, VI.
[46] Les passages : Luc, IV, 17, Actes des apôtres, XIII, 15, sont formels pour prouver que cet usage était établi au premier siècle. Cette lecture des prophètes ne se faisait qu'au Sabbat et non aux services de semaine et des jours de fête (Megillah, IV, 1-5).
[47] Ev. de Luc, IV, 16 et suiv.
[48] Jérus., Peah, fol. 21, 1.
[49] Megillah, III, 6; IV, 1.
[50] Jérus., Megillah, fol. 75, 1 ; Babyl., Bava Kama, fol. 82, 1.
[51] Talai., Jérus., Moed Katon. 3, 1 ; Esdras, X, 8 ; Ev. de Jean, IX, 34 ; XII, 42, 43 ; Cf. XIX, 38.
[52] Sanh., cap. I ; halac., 2. « La flagellation était prononcée par le triumvirat. »
[53] II Corinth., XI, 24 ; voir pour plus de détails : Livre 1, chap. V, la Justice.
[54] Saint Paul, Ire Épître aux Corinthiens, ch. X et XI.
[55] Voir E. de Pressensé : Histoire des trois premiers siècles de l'Eglise tome VI, livre II.