Histoire des réfugiés protestants de France

8. — Diverses correspondances et rapports diplomatiques français

Nous croyons utile de publier quelques fragments de la correspondance inédite du marquis de Bonrepaus avec Seignelay. Ils prouveront le peu de succès de la mission dont il fut chargé par le gouvernement français.

Dépêche de M. de Bonrepaus au marquis de Seignelay.

Londres, 31 décembre 1685.

J’ai expliqué à M. de Barillon le sujet de mon voyage. Il croit tout aisé à la réserve du retour des gens de la religion en France. Il y en a beaucoup en ce pays. J’espère qu’il ne sera pas aussi difficile que M. de Barillon le croit d’en ramener la plus grande partie. Ce qui fait le plus de peine, c’est quelques marchands venus en dernier lieu de France, et entre autres de La Rochelle, qui disent que l’on y exerce une grande rigueur contre les Protestants, et citent des exemples de gens à qui les dragons ont brûlé les pieds, quoique vraisemblablement cela ne soit point arrivé. Il faudra du temps pour les désabuser, et un traitement un peu plus doux dans la suite, s’il est possible.

Je vois ici clairement une chose par les discours mêmes des derniers fugitifs, qui est qu’ils sortent très facilement des ports du royaume, les uns par l’argent qu’ils ont donné à ceux qui ont pu faciliter leur évasion, et les autres par l’industrie qu’ils ont eue de prendre le temps et de surprendre les officiers. Je n’en vois pas encore assez pour pouvoir asseoir un jugement qui puisse faire tomber les soupçons sur quelqu’un de ceux à qui on se confie, mais il est certain qu’il se commet quelques abus.

J’ai trouvé ici M. Forant fort zélé et fort affectionné, mais qui avait pris de fausses mesures. Il a dit à tous les Français qui l’ont reconnu qu’il n’était point catholique, et il n’y a personne qui ne sache le contraire, son abjuration ayant été mise dans la gazette de Paris, et dans toutes celles des pays étrangers qui se débitent en cette ville. Il avait pris de plus pour expédient de dire qu’il armait ici un vaisseau pour la Hollande, prétendant engager sous ce prétexte divers matelots à s’embarquer avec lui, et les ramener ensuite en France ; mais bien loin que cet expédient puisse réussir, il les a jetés dans la crainte qu’on ne voulût les enlever par force, jusque-là que quelques officiers mariniers, peu informés de ce qui se pratique en ce pays, se sont cachés de peur qu’on ne les fit arrêter. J’ai cru qu’il fallait faire cesser tous ces bruits, et qu’il n’y avait pas d’autre moyen pour ramener les fugitifs que la voie de la douceur et de l’instruction, avec l’espérance d’un bon traitement en France. Je l’ai ainsi expliqué à M. Forant. On pourra se servir utilement de lui pourvu qu’il soit conduit. Il part demain pour aller le long de la côte d’ici à Yarmouth, avec un mémoire que je lui ai donné de ce qu’il a à faire.

M. de Bonrepaus à M. de Seignelay.

Londres, 3 janvier 1686.

Sa Majesté Britannique n’a pas pu s’empêcher de me dire qu’elle regardait tous les Protestants comme des républicains, et particulièrement ceux qui s’enfuient de France, mais que cependant, comme les bruits qu’on fait courir ici des violences qu’on exerce contre eux produisent un mauvais effet, et donnent occasion de dire qu’il en pourrait user quelque jour de même envers ses sujets, il souhaiterait qu’on traitât cette affaire avec plus de douceur, afin de pouvoir faire cesser ces bruits.

M. de Barillon croit que la connaissance que le roi d’Angleterre a eue du sujet de mon voyage sur le fait des religionnaires, l’a porté à déclarer plutôt qu’il n’aurait fait ce qu’il déclara hier, qui est que l’évêque de Londres ne sera plus de son Conseil. C’était un protecteur zélé des fugitifs de France, et tout à fait dans les intérêts du prince d’Orange. Cette nouvelle qui n’est publique que depuis ce matin fait grand bruit à Londres… Le roi d’Angleterre a défendu aussi, depuis que je suis ici, aux officiers de ses gardes, de recevoir à l’avenir aucun étranger dans leurs compagnies. Cela ne regarde principalement que les religionnaires de France qui se présentaient en foule.

Les esprits de ces fugitifs sont encore si échauffés que je n’espère point de les pouvoir ramener sitôt. Mais l’affaire de l’évêque de Londres et l’exclusion qu’ils auront d’entrer dans les troupes de la maison du roi d’Angleterre leur ôtant toute espérance de protection en ce pays-ci, ils s’en iront probablement en Hollande, où le grand nombre les empêchant d’y trouver de quoi subsister, fera qu’on les réduira plus facilement à s’en retourner chez eux.

M. de Bonrepaus au marquis de Seignelay.

Londres, 10 janvier 1686.

Le roi d’Angleterre paraît toujours dans la résolution de ne point assister les fugitifs de France. Un de ses principaux Ministres n’a point fait difficulté aujourd’hui de me dire qu’il empêcherait que la permission qui avait été accordée de faire une collecte pour eux n’eût lieu. Je travaille présentement à radoucir les esprits de ceux qui sont les plus considérables, et en état d’engraisser les autres, n’y ayant plus que la voie de la douceur pour les pouvoir ramener.

Du même au même.

Londres, 17 janvier 1686.

A l’égard des fugitifs, j’en pourrais ramener quelques-uns des principaux, mais c’est beaucoup en l’état présent où sont les choses que de leur adoucir l’esprit, qui est ce à quoi je travaille. Lorsqu’on leur offre de leur donner des facilités pour leur retour, ils s’en vont sur-le-champ le dire à l’évêque de Londres pour lui faire valoir les avantages qu’ils refusent pour leur religion, afin de s’attirer par là une plus grande considération ; mais comme ils n’auront plus de quoi vivre en peu de temps, surtout la collecte ne se faisant pas, ils viendront d’eux-mêmes demander la grâce que le Roi veut bien leur faire, et pour lors M. Robert exécutera sans peine les ordres que vous lui avez donnés sur ce sujet.

Du même au même.

Londres, 28 janvier 1686.

Vous avez appris par les lettres de MM. Forant et le Danois le mauvais succès qu’ils ont eu en Hollande. La même chose faillit arriver ici au premier. Ces sortes de choses ne peuvent réussir que par la bonne conduite de ceux qui en sont chargés, et avec un peu de loisir. Je vois de plus en plus qu’il faut continuer par radoucir les esprits des fugitifs qui sont très aigris… M. d’Ada, envoyé du Pape en cette Cour, me vint voir avant-hier, Dans la conversation il me fit connaître que les catholiques anglais étaient fort en peine des bruits que l’on continuait de semer ici sur les prétendues persécutions que l’on fait en France aux gens de la R. P. R. Je lui expliquai derechef ce que je lui avais déjà dit là-dessus, et je lui fis un détail de l’application avec laquelle le Roi donnait les ordres pour faire exhorter et instruire les Religionnaires sans les violenter, et les sommes considérables qu’il faisait distribuer pour le soulagement des nouveaux convertis, qui avaient besoin de secours, temporels après avoir reçu les spirituels… ; que de cent hommes qui s’étaient convertis, il y en avait quatre-vingt-dix qui n’avaient pas eu de logement de gens de guerre. Je lui citai ce qui se passa au pays de Foix pendant que j’y étais, où de sept villes toutes remplies de religionnaires, il y en eut six qui se convertirent par délibération, sans attendre les troupes, et la septième deux jours après. Il me revint trouver hier pour me prier de vouloir dire les mêmes choses à quelques-uns des principaux catholiques de cette Cour, qui souhaitaient savoir ce détail par moi-même, ce que je n’ai pas cru devoir refuser, Milord Castelmaine, Milord Douvres, et Milord Tyrconnel, qui sont les plus zélés catholiques et ceux en qui le roi d’Angleterre a le plus de confiance.

M. de Bonrepaus à M. de Seignelay.

Londres, 11 février 1686.

Il part aujourd’hui quelques matelots qui s’en retournent en France et quelques autres des fugitifs, mais je vois avec une peine extrême l’établissement qui se fait en ce royaume de nos meilleures manufactures. Ce ne sont pas seulement les gens de la R. P. R. qui y viennent travailler, mais plusieurs catholiques.

Ils avaient commencé à Ypswich, par une manufacture de toiles, que les Anglais ont accoutumé d’acheter en France pour faire leur commerce des Indes Occidentales ; mais à présent ils ont aussi des toiles de voiles. J’ai trouvé moyen d’attirer ici deux de ces ouvriers catholiques, sous prétexte de vouloir acheter de leurs toiles que j’ai été bien aise de voir pour en connaître la qualité. Ils sont convenus de repasser en France. J’en garde ici un jusqu’au retour de l’autre, qui est allé à Ipswich, pour tâcher d’amener avec lui plusieurs de ses camarades, lui ayant promis dix pistoles pour chacun de ceux qu’il pourrait obliger à le suivre, soit catholique ou protestant. Ces gens-là ne me connaissent point. Je leur ai parlé chez un marchand qui leur a fait entendre que nous étions associés ensemble, pour les faire travailler à ces sortes de toiles en France. Ainsi aucun Anglais n’y étant pas encore assez habile, j’espère de détruire entièrement cet établissement. Si je pouvais aller sur les lieux, je tiendrais la chose pour certaine ; mais étant connu comme je le suis en ce pays, il y aurait de l’imprudence de me commettre à une chose que le roi d’Angleterre et le parlement regardent comme capitale pour ce royaume.

La raison que ces gens m’ont alléguée de leur désertion est que ces manufactures de toiles sont en grand désordre en Normandie et en Bretagne ; que les gens qui s’en mêlent, au lieu de protéger les ouvriers et de mettre une bonne discipline parmi eux, ne cherchent qu’à les piller, ce qui les met dans la nécessité d’abandonner leur métier, et qu’eux-mêmes, s’ils n’étaient pas sortis du royaume, auraient été obligés de travailler à la terre, comme font la plupart de leurs camarades.

Les autres manufactures qui s’établissent en ce pays sont les chapeaux de caudebec et la manière d’apprêter les peaux de chamois. Cela, joint à la facilité que l’on trouve en France d’en sortir l’or, en diminue si considérablement le commerce, qu’ayant assemblé des marchands français et anglais, et fait la balance des marchandises qui passent d’un royaume à l’autre, nous avons trouvé que celles de France montaient ci-devant à deux millions de livres de plus que celles d’Angleterre, dont la remise se faisait partie en espèces, et l’autre partie en lettres de change, qui servaient ensuite à faire les paiements qu’il y avait à faire à Londres, sans qu’il sortît un sou de France. Et après, c’est tout le contraire, ayant vérifié qu’il a passé de France en Angleterre, pendant l’année 1685, 500,000 pistoles en espèces, comme il se voit sur les registres de la monnaie de Londres, par la quantité que l’on y en a fondue, et par ceux de la douane, de celle qu’on a envoyée aux Indes.

M. de Bonrepaus à M. de Seignelay.

Londres, 18 février 1686.

Je réponds, monseigneur, aux deux lettres que vous m’avez fait l’honneur de m’écrire… J’ai cru qu’il fallait vous dire exactement tout ce qui se passe au sujet des fugitifs ; mais il ne faut pas aussi désespérer d’en pouvoir ramener la plus grande partie ; car, puisque dans l’état où sont les choses, j’en fais passer journellement, il est vraisemblable que lorsque le petit fonds qu’ils ont apporté de France, leur manquera et qu’ils seront entièrement désabusés du secours qu’ils ont attendu de la collecte et d’emplois, ils songeront plus sérieusement à profiter des grâces que le Roi a la bonté de leur faire offrir…

J’ai parlé au ministre Allix suivant votre ordre, et je me suis servi du tour que vous m’avez prescrit pour lui insinuer la grâce qu’il pourrait attendre du Roi, s’il voulait repasser en France et se convertir. Il a reçu avec beaucoup de respect et de témoignage de reconnaissance les marques de la bonté et de la charité de S. M. en son endroit. Il m’a dit que M. de Ménars lui avait parlé peu de temps avant son départ de France, mais qu’il n’avait pu se résoudre encore à faire ce qu’on désirait de lui. Nous sommes entrés en dispute sur l’autorité de l’Église et leur séparation ; il m’a promis de me revenir voir, et j’emploierai tous mes soins pour l’obliger à prendre le bon chemin…

Ce qui m’a donné le libre accès que j’ai auprès du Roi d’Angleterre a été premièrement les choses qui concernent la religion. Il a été fort touché de ce que j’avais mis l’esprit des catholiques en repos au sujet de la conduite que le Roi a tenue en France pour la conversion de ses sujets hérétiques et des livres français que j’ai distribués ici, qui peuvent servir à la conversion de quelques protestants… Nous avons même fait traduire quelques-uns de ces livres en anglais, qui se vendent publiquement.

. . . . . . . . . . . . . . .

Dans un rapport à Seignelay, daté du 5 mai 1686, Bonrepaus annonce qu’il a fait repasser en France 507 fugitifs. Il ajoute : « Il me semble que ce n’est guère sur le nombre de 4500 qu’il y en a, mais je n’ai rien à me reprocher quant aux soins et à la diligence. J’aurais pu faire mieux sans l’espérance que ces malheureux ont eue de tirer des sommes considérables de la collecte ; les ministres protestants ont détourné plusieurs qui m’avaient donné parole. Ils leur ont fait des avantages considérables et ont été fort attentifs à mes démarches, surtout depuis les fêtes de Pâques, qu’ils ont reconnu en faisant la Cène qu’il leur manquait beaucoup de monde, entre autres les marchands de La Rochelle, dont le retour les a extrêmement mortifiés… Il y en a un grand nombre auxquels je n’ai rien donné, particulièrement aux gens de mer, ayant trouvé moyen de les faire passer sur les bâtiments français qui se sont trouvés en Angleterre… La dépense pour le retour de ces gens-là revient à environ 500 écus.

« Ce qui me paraît le plus avantageux dans le retour de ces gens-là, c’est la destruction des manufactures de toiles blanches qu’ils ont établies en Angleterre. Les Anglais qui y étaient intéressés en ont fait grand bruit ; mais le Roi d’Angleterre, qui regarde ces fugitifs comme ses ennemis, n’est point entré dans les plaintes qu’on a voulu faire sur ce sujet. Dans un temps de parlement, on m’aurait fait des embarras et l’on me l’a assez souvent dit. »

Mémoire de ce que j’ai remarqué dans le voyage qui m’a été ordonné par M. de Bonrepaus.

De toutes les villes dont il est parlé ci-dessus, il n’y a que Plymouth où il y ait des Français de la R. P. R. pour y faire quelque séjour ; encore la plupart attendent-ils que l’hiver soit passé, afin qu’une saison plus commode leur permette de s’aller habituer ailleurs. Véritablement il y en est débarqué plusieurs dans les autres villes, mais ils n’ont fait que passer, parce que ce ne sont pas des lieux où l’on puisse trouver aucun secours et ils sont tous venus à Londres.

A Bristol, on me dit qu’il pouvait y avoir passé 30 ou 40 Français, et que quatre matelots avaient pris parti sur un vaisseau anglais qui était allé aux îles de l’Amérique quand j’y étais. Il n’y avait que deux ministres de La Rochelle auxquels je parlai et qui me dirent que j’annonçais une nouvelle trop difficile à persuader, et qu’ils ne croiraient jamais qu’il y eût aucune sûreté pour ceux de leur religion en France…

A Falmouth, on me dit qu’il y avait débarqué environ 20 Français, et que sur des vaisseaux qui avaient relâché et qui passaient en Irlande, il en avait passé 25 ou 30. Quand j’y étais, il y avait encore un vaisseau qui allait à Dublin, sur lequel il y avait 7 ou 8 Français. J’en vis 4 auxquels je parlai, et qui me dirent que quand même on leur accorderait de prêcher en France, ce ne serait que pour les attirer et leur faire ensuite plus de peine, et quand j’insistai pour leur dire qu’on leur donnerait toutes les assurances qu’ils pourraient souhaiter, ils se retirèrent et ne voulurent plus écouter.

Plymouth est l’endroit où il y a le plus de Français. Il y en peut avoir environ 300. On leur a donné un prêche à un demi-mille de la ville. Je parlai à tous ceux que je pus rencontrer, et j’en allai chercher plusieurs dans leurs maisons, pour leur faire savoir ce que j’avais à leur dire, quoique presque tous me reçussent fort mal. J’entrai même dans un endroit où je savais qu’il y en avait plusieurs assemblés, et où était aussi un de ceux à qui j’avais déjà parlé, nommé Barbot, de La Rochelle, et qui avec un de ses amis s’emporta fort contre moi à l’occasion de ce que je venais leur dire. Cela ne m’empêcha point de dire à tous ceux qui étaient là, et que je n’avais pas encore vus, les mêmes choses que j’avais dites aux autres. La seule différence qu’il y eut est, qu’étant pour lors connu de tout le monde, je leur dis publiquement et ne fis plus de mystère. Ils goûtèrent aussi peu que les autres tout ce que je leur pus dire, et ils ne pouvaient pas s’empêcher de me parler avec du chagrin contre moi et du ressentiment à cause de ce que je venais leur dire. Ils alléguaient qu’ils s’étaient fait une extrême violence pour se mettre l’esprit et la conscience en repos, qu’ils avaient abandonné pour cela ce qui leur était de plus cher au monde, et qu’ainsi, il n’y avait aucune apparence qu’ils allassent se remettre dans les embarras dont ils avaient eu tant de peine à se dégager. Ils alléguaient ensuite la suppression des édits qui avaient été donnés en leur faveur, et disaient qu’il ne pouvait plus rien y avoir d’assuré pour eux. Ils ajoutaient aussi qu’il ne leur était pas possible d’exercer leur religion s’ils n’avaient des prêches et des ministres, et que sans ce rétablissement ils ne pouvaient voir aucune sûreté pour eux en France. Ce sont là les discours avec lesquels tous les gens de la R. P. R. éludent toutes les assurances qu’on leur propose, auxquelles ils ne veulent point ajouter foi, et il y en a plusieurs qui disent que, quand même ils seraient persuadés qu’on les laissera vivre en France sans les inquiéter, ils n’y retourneraient pas si auparavant on ne leur accordait des prêches et des ministres.

Je vis là un M. Chales, de La Rochelle, marchand, qui s’était converti lui et toute sa famille, et qui s’était sauvé avec toute sa famille, après s’être converti. Et on me dit qu’il y avait plusieurs nouveaux convertis à La Rochelle et autres endroits de France, lesquels mettaient ordre à leurs affaires pour se retirer. Je ne pus rencontrer qu’un seul matelot. Avant que de me découvrir, je sus de lui qu’il y en avait fort peu dans la ville, et qu’il n’y en avait que 5 qui se fussent encore embarqués dans les vaisseaux anglais. Dès que je me fus ouvert à lui, il me quitta tout d’un coup et s’enfuit. Je m’informai encore dans la ville si on y avait vu plusieurs matelots français, et on me dit qu’il y avait passé environ 25 matelots qui étaient avec des capitaines français de la R. P. R., qui s’étaient sauvés dans leurs propres bâtiments et qui avaient touché à Plymouth. On me dit aussi qu’il passait plusieurs Français dans la Caroline et dans la Pensylvanie.

A Dartmouth, on me dit qu’il y en avait débarqué 12 ou 15, lesquels avaient tous passé à Londres. Il y avait encore deux ministres avec leurs femmes et leurs enfants. Je parlai à un de ces ministres, n’ayant pas pu voir aussi l’autre parce qu’il était malade. Il me dit que si cela était, que M. l’Ambassadeur lui donnât sa parole que, retournant en France, il y vivrait sans être aucunement inquiété, ils y retourneraient volontiers, son camarade et lui, avec leur famille. Et je lui promis qu’il aurait la parole de M. l’Ambassadeur, et sur cela il me dit qu’il me manderait à Londres sa dernière résolution.

A Waimouth, je ne trouvai qu’un Français qui me témoigna que son plus grand bonheur serait de retourner en France et d’y pouvoir vivre selon sa religion, mais qu’il avait des parents à Londres qu’il irait trouver et dont il suivrait les exemples. Je voulus l’engager à prendre son parti de lui-même, mais cela me fut impossible. On me dit qu’il n’avait pas débarqué en cette ville plus de 7 ou 8 Français.

Je ne trouvai aucuns Français à Portsmouth. On me dit qu’il y en avait débarqué quelques-uns, mais en fort petit nombre.

Fait à Londres, le 21 Janvier 1686.

Robert.

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