Propos sur le temps

LE TEMPS DE SERVIR

Puisque chacun a reçu un don, mettez-le au service des autres.

1 Pierre 4.10

Un médecin devenu pasteur était, aux dires de ses collègues, toujours insatisfait. Lorsqu’il exerçait la médecine, il regrettait le ministère pastoral, et à la tête d’une paroisse, il souffrait de ne pouvoir s’occuper des malades. Je ne sais s’il en était ainsi. Quoi qu’il en soit, ce serviteur doublement qualifié aurait été heureux et libéré de ses tourments s’il avait choisi, une fois pour toutes, l’une ou l’autre de ces activités. Dans son cas particulier, rien ne l’empêchait de faire de la médecine un ministère ou du ministère une magnifique occasion de soigner et les âmes et les corps.

Autour de nous, il est des personnes qualifiées, polyvalentes et presque encombrées de dons. Je pense à tel homme de renom qui, si je suis bien informé, est docteur en philosophie, docteur ès sciences, agrégé d’histoire, capable de pratiquer plusieurs langues et, en plus, excellent peintre et musicien de talent, écrivain de qualité, conférencier remarquable et orateur exceptionnel. Cet homme superbement doué aurait pu, avec brio, embrasser plusieurs carrières ; pourtant, il a été amené à choisir une voie et à s’y engager en renonçant délibérément aux autres. Finalement, il s’est adonné à la politique, laissant « le reste » pour la détente. Aussi est-il devenu dans le pays un personnage de premier plan.

C’est reconnu. Les gens aux dons multiples ne peuvent valablement jouer sur plusieurs tableaux s’ils souhaitent sortir du rang et réaliser pleinement leur vocation. Certes, il y a des exceptions, mais il n’est jamais bon de courir plusieurs lièvres à la fois. Qui veut réussir, et donner toute sa mesure, doit discerner à temps sa vraie vocation pour y répondre avec enthousiasme. Un choix – parfois difficile – s’impose alors car il faut consentir à éliminer les activités parasites. Il n’y a pas d’autre voie pour racheter le temps. « N’ayons pas peur de nous spécialiser, reconnaît l’auteur des Pensées du matin. Aussi bien dans l’étude, la recherche, que le travail. Travailler à tout, c’est ne travailler à rien. Donner tour à tour ses forces à toutes les œuvres, c’est n’en faire aucune avec vigueur, c’est rester à l’écart de la perfection. La perfection ne s’atteint que par la consécration de toutes les forces de la volonté à une œuvre déterminée, à un champ de travail spécial. Sans doute cette délimitation rigoureuse de l’activité ne va pas sans des renoncements douloureux : il est des goûts qu’il faut sacrifier ; des lectures, des travaux qu’il faut ajourner et remettre à bien longtemps. Mais ici, la récompense ne tarde pas à couronner un travail opiniâtre et bien déterminé dans son but et dans ses moyens d’action : elle vient sous la forme d’une aptitude agrandie pour toute espèce d’œuvres, d’une compétence plus étendue dans un plus grand nombre de domaines, d’un accroissement général des forces et des capacités. »

Certes, il y a des gens aux dons multiples, mais plus nombreux encore sont ceux qui ignorent s’ils sont qualifiés pour la moindre tâche. Or, si les gens polyvalents sont appelés à faire un choix difficile et à s’y tenir, les autres ne devraient-ils pas s’employer, avec autant d’énergie, à découvrir leur qualification spécifique, afin de chercher un emploi conforme à leur compétence (en période de chômage, la chose n’est pas toujours possible) ?

Certains adolescents vous diront avec précision et assurance le métier qu’ils veulent exercer plus tard. Et parce qu’ils discernent leur don de bonne heure, ils orientent leurs études en vue de se former pour l’exploiter à fond le moment venu. Le succès les attend, sans aucun doute. D’autres jeunes, peut-être les plus nombreux, ne savent trop quel travail pourrait leur convenir. Ils pensent à tel emploi, puis à tel autre, sans être vraiment fixés. On est en droit de se demander ce qui motive réellement leur choix. Si leur seule ambition est de trouver un travail bien rémunéré qui n’exige pas trop d’effort, on peut alors, sans risque de se tromper, leur prédire qu’ils ne seront guère heureux dans leur activité… à moins que leur mentalité ne change au fil des jours. Ce qu’on leur souhaite, bien entendu.

On retrouve ces deux catégories de serviteurs dans l’église : D’un côté, les chrétiens riches de dons, déterminés à remplir un ou plusieurs ministères dans la communauté. Et de l’autre, la multitude de chrétiens inemployés, fidèles aux réunions certes, mais sans ressort. Parce qu’ils n’ont pas « le don de la parole », ils se persuadent qu’il n’y a aucune tâche valable pour eux. Ils enfouissent « leur talent » avec bonne conscience, oubliant les avertissements de Jésus à l’endroit du serviteur inutile (Matthieu 25.30).

C’est ici qu’il convient de méditer la parole de Pierre : Puisque chacun a reçu un don, mettez-le au service des autres… (1 Pierre 4.10). Parole importante qu’il vaut la peine de méditer.

1. Chacun (Puisque chacun a reçu un don…). Dieu a donc qualifié chaque enfant de Dieu pour une tâche précise dans la communauté. Autrement dit, nul n’est autorisé à se croiser les bras sous prétexte qu’il n’a pas de compétence particulière. Hélas, l’Église est une vraie… passoire. Il y a beaucoup, beaucoup de trous ! Que de fonctions non remplies ! Que de ministères vacants ! Ne nous étonnons pas alors de voir tant de communautés végéter malgré le zèle déployé par quelques-uns de leurs membres. Or, l’idéal ne serait-il pas que chacun s’épanouisse dans une société où tout le monde est à l’œuvre ? En tout cas, nous devrions être reconnaissants pour la présence autour de nous de menuisiers, de boulangers, de peintres, de maçons, de jardiniers. Que deviendrions-nous si l’on ne trouvait plus de maraîchers ou de bouchers dans nos cités ? Pas de mécaniciens ni d’infirmières… mais seulement des gens de la parole : avocats, professeurs, crieurs publics ? La vie y serait bien compliquée, pour ne pas dire impossible. De même, dans l’Église, trop de ministères font défaut. Connaissez-vous « le don », la qualification qui est la vôtre pour servir le Seigneur ? Avez-vous cherché à découvrir ce don pour remplir « votre » mission parmi ses enfants ? Ne voudriez-vous pas vous entretenir avec les responsables de l’église de ces choses et leur dire votre désir de vous rendre utile dans la communauté ?

Lorsqu’une personne rencontre le Christ et s’agrège à l’église locale, il faudrait, sans tarder, « faire la fête » pour l’accueillir comme on le fait dans un foyer pour un nouveau-né. Puis, il serait opportun de s’entretenir avec elle pour lui faire prendre conscience que Dieu l’a qualifiée en vue d’une tâche précise dans ou hors de l’église. Le pasteur et les anciens pourraient lui dire : « Nous ignorons encore le don que Dieu vous a accordé, mais nous allons prier pour lui demander de vous le révéler. Ainsi, vous prendrez votre place dans l’œuvre du Seigneur. »

2. Un don (Puisque chacun a reçu un don…). Notez ici que Pierre a parlé de don au singulier : un don. Certes, il est possible d’en posséder plusieurs – l’apôtre Paul n’en manquait pas – toutefois il en est un qui doit primer les autres, un don que le chrétien devra développer en priorité et « mettre au service des autres » conformément à la vocation qui lui a été adressée. Or, puisqu’il est demandé à chacun d’utiliser « le don qu’il a reçu », il va de soi que tout chrétien devrait le connaître ou se préoccuper de le connaître. Généralement, c’est en se mettant humblement au travail, en acceptant d’accomplir de modestes tâches que le jeune chrétien – et les frères avec lui – découvre le ministère auquel il est appelé.

3. Au service des autres (mettez ce don au service des autres…). Dieu ne nous qualifie pas pour faire étalage de nos talents et nous mettre en avant. C’est le danger que nous courons s’il nous est donné de jouer un rôle de premier plan dans l’assemblée. Non ! Mais soumis les uns aux autres dans la crainte du Christ (Éphésiens 5.21), nous restons au service de nos frères, pour leur joie et leurs progrès spirituels, à la gloire de Dieu. « Que tout ministère s’exerce dans l’humilité, chacun veillant à ne pas empiéter sur celui des autres. N’ayez pas une opinion exagérée de votre importance, dit l’apôtre Paul, mais que chacun de vous s’efforce de se faire une idée juste sur lui-même ; ne surestimez pas vos capacités, n’aspirez pas à ce qui dépasse vos possibilités ou qui déborde votre vocation. Acceptez vos limites, celles que vous tracent les dons particuliers qui vous ont été départis en vertu de votre foi (Romains 12.3, transcription A. Kuen). Donc, pas de compétition ni de concurrence dans l’église. Chacun à sa place, dans l’harmonie et la soumission réciproque. Il y a des dons particulièrement reconnus : celui d’évangéliste, d’enseignant, de prédicateur… Ils ne doivent pas faire oublier les autres, considérés – à tort – plus modestes. Dieu honore ceux qui le servent, et ils recevront les récompenses promises, quelle que soit la mission accomplie.

Après tout, Dieu révèle ses dons à ceux qui sont déterminés à le servir.


♦   ♦

Voici encore deux conseils pour être plus efficaces :

  1. Ne reléguez pas en queue de programme les tâches désagréables. Empoignez-les en priorité. Vous serez ainsi soulagés de les avoir « liquidées », ce qui décuplera votre énergie. Il est pesant de savoir qu’une tâche difficile nous attend.
  2. Il faut aimer, ou chercher à aimer, ce que l’on fait. Il n’y a pas de travail franchement désagréable lorsqu’on l’accomplit « comme servant le Seigneur ».

QUESTIONS

  1. Avez-vous discerné le don que Dieu vous a confié pour le servir ? Sinon, cherchez-vous à le connaître ?
  2. Quelle est votre ministère dans l’église ? Quelle tâche y accomplissez-vous ?
  3. Les autres discernent-ils vos progrès dans le service ? Travaillez-vous en harmonie avec les autres ? Bénissez le Seigneur qui nous associe à son œuvre d’amour !

chapitre précédent retour à la page d'index chapitre suivant