L’eschatologie scripturaire, étant la doctrine des consommations accomplies tant dans l’ordre physique que dans l’ordre moral, exclut, d’une part, toute conception déterministe ou évolutioniste qui, en absorbant l’action des causes libres et responsables dans la cause universelle, supprime toute fin comme tout commencement des choses ; elle exclut, d’autre part, les conceptions ultra-spiritualistes qui renferment l’œuvre du salut dans l’ordre spirituel.
Nous disons qu’au point de vue déterministe ou évolutionniste, les données eschatologiques seront jugées ou indifférentes à la vie morale ou positivement contradictoires en elles-mêmes.
Schleiermacher n’a pas craint d’avancer que l’abandon de la foi à la survivance de la personnalité était parfaitement compatible avec l’hégémonie de la conscience religieuse, telle que la réclame la plus pure moralité et la plus haute spiritualitée ; aussi les raisons que lui-même peut avoir pour admettre cette doctrine sont-elles purement de l’ordre exégétique ; et comme dans les données même de la prophétie scripturaire le départ lui paraît impossible à faire entre la réalité et la figure, il ne retient de ces données que deux éléments indubitables, la permanence de la personnalité et la consommation de l’Eglise, dont le rapport mutuel même, étant situé hors de notre expérience, échappe aussi, selon lui, à nos définitionsf.
e – Christl. Glaube. Sect. CLVIII. 1.
f – Sect. CLIX, 3.
Biedermann à son tour statue une double incompatibilité soit entre la consommation des uns dans la félicité, des autres dans l’infélicité éternelle, et la relativité des êtres finis ; soit entre l’essence spirituelle de l’esprit fini et les formes matérielles prêtées par la tradition ecclésiastique aux choses finales.
Les données de l’eschatologie biblique se résolvent donc pour la dogmatique hégélienne soit en un procès indéfini du monde, si l’être particulier est conservé, soit en une absoption en Dieu de toutes les différencesg.
g – Dogmatik, IIItes Theil, 3tes Kapitel.
Aux conceptions ultra-spiritualistes des choses finales, nous opposons que les prophéties de l’Ancienne et de la Nouvelle alliance, accomplies d’ores et déjà dans leurs parties spirituelles, ont laissé jusqu’à cette heure un excédant non réalisé ; ce sont toutes les prévisions d’une restauration de la nature couronnant celle de l’humanité, dont nous trouvons l’écho éloquent et ému jusque dans le centre didactique de l’épître aux Romains, Romains 8.21-23.
L’eschatologie sert à donnera Dieu et à la cause du bien le dernier mot dans l’univers des êtres ; elle rend un suprême hommage tout à la fois à la bonté, à la justice et à la puissance de Dieu.