Le temps est venu de récompenser tes serviteurs, les prophètes, les saints et ceux qui craignent ton nom, les petits et les grands.
— Pas d’accord avec vous !
……
Un homme sec et rougeaud de figure – je le revois encore – s’approche de moi à l’issue d’une réunion et me manifeste sa désapprobation avec quelque nervosité. Sans doute s’est-il senti visé lorsque je citai, peu auparavant, le cas d’Isaac le débonnaire. Ce patriarche préférait perdre ses puits plutôt que de se quereller avec le Philistin jaloux, son voisin (lire ce récit instructif : Genèse 26.12-32).
– Je maintiens ! Pas d’accord ! Il faut défendre ses droits si l’on ne veut pas être grugé. Bon… mais pas bonbon !
– Pourquoi me parlez-vous ainsi ?
– Justement ! Mon voisin vient de construire une route pour se rendre à sa ferme…
– Qu’y a-t-il de mal à cela ? C’est bien, au contraire.
– Sans doute. Mais pour aller plus vite, il m’a volé au moins deux mètres carrés de terrain pour élargir son virage.
– Alors, je devine. C’est la brouille. On ne se parle plus entre voisins.
– Naturellement ! J’attends qu’il vienne s’excuser et me restituer mon bien.
Sceptique, je quittai cet ancien de l’église sans avoir réussi à le convaincre qu’il serait gagnant à vivre en bonne intelligence avec cet homme, en lui offrant cette parcelle de terre dont lui n’avait que faire. Plutôt perdre que d’être en guerre avec son prochain : Autant que cela dépend de vous, soyez en paix avec tous les hommes. (Romains 12.18).
Trois ans plus tard je retournai dans ce village. Etonné de ne pas revoir cet ancien, je m’informai à son sujet :
– Comment, me fut-il répondu, vous n’êtes donc pas au courant ? Il est mort subitement l’année dernière.
Je fus attristé d’apprendre cette nouvelle. Attristé surtout de penser que cet homme avait sciemment refusé d’obéir à Dieu et que la mort l’avait surpris en pleine brouille. Pour récupérer son lopin de schiste qu’il ne pouvait emporter avec lui, il avait perdu une belle occasion de récolter une récompense éternelle – et qui sait ? – de se faire « un ami qui l’attende dans les tabernacles éternels » (Luc 16.9 – voir chapitre suivant). Folie !
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A propos de récompense, il faut convenir qu’il en est peu question dans l’église. Les chrétiens sont rarement exhortés à fixer les yeux sur la rémunération à venir. Et pourtant, le Christ et les apôtres ne se privèrent pas d’en parler.
Pour avoir une idée de l’importance de ce sujet trop oublié, il faut retenir que :
1. – Amasser un trésor dans le ciel est un impératif, un ordre donné par le Christ lui-même à ses disciples : Amassez des trésors dans le ciel où ni les vers ni la rouille ne détruisent, et où les voleurs ne percent ni ne dérobent. Car là où est ton trésor, là aussi sera ton cœur. (Matthieu 6.20). Faire fi des récompenses est une désobéissance qui attriste le Saint-Esprit.
2. – Le jour vient où tout racheté devra comparaître devant le Tribunal du Christ (2 Corinthiens 5.10). Le croyant ne redoute pas la colère de Dieu ni la perdition puisqu’il ne vient pas en jugement mais il est passé de la mort à la vie. (Jean 5.24). Il sait que son nom est inscrit dans le Livre de vie mais il n’oublie pas cependant qu’à la résurrection des morts, lors du rassemblement des élus, il sera appelé à comparaître devant le Tribunal du Christ. Là il sera rendu à chacun d’après ce qu’il aura fait dans son corps, soit en bien, soit en mal. Nos œuvres seront alors examinées dans le but d’accorder des récompenses à ceux qui en sont dignes. Le Seigneur est trop juste pour laisser une seule action bonne sans la rétribution promise (Hébreux 6.10). Il est trop saint pour que subsiste la moindre imperfection chez ceux qu’il va admettre en sa présence. Cette perspective devrait me rendre sérieux et vigilant. C’est pour cela, ajoute l’apôtre, que nous mettons un point d’honneur à lui être agréable… et que nous connaissons la crainte du Seigneur (2 Corinthiens 5.9, 11). Voici, dit Jésus, je viens bientôt et j’apporte avec moi ma rétribution pour rendre à chacun selon son œuvre (Apocalypse 22.12).
3. – La perspective de la récompense peut changer complètement l’orientation de notre vie et l’objet de nos affections : Faites vous des bourses qui ne s’usent pas, un trésor inépuisable dans les cieux, où il n’y a pas de voleur… Car là où est ton trésor, là aussi sera votre cœur (Luc 12.33, 34).
4. – Le croyant est soutenu, à l’heure de l’épreuve lorsqu’il fixe les yeux sur la rémunération à venir. Ce regard le rend capable de se réjouir au milieu même de la fournaise et du dépouillement. Ce fut le cas de Moïse : Il estimait que subir le mépris comme le Messie avait plus de valeur que les trésors de l’Egypte car il avait les yeux fixés sur la récompense future (Hébreux 11.26). L’auteur de l’épître aux Hébreux rappelle le passé de ses lecteurs pour les encourager : Vous avez accepté avec joie qu’on vous arrache vos biens, sachant que vous aviez des possessions meilleures et permanentes (Hébreux 10.34). Selon l’Ecriture, à toute souffrance acceptée à cause du Christ, correspond « un poids de gloire » propre à stimuler le chrétien éprouvé : Car un moment de légère affliction produit pour nous au-delà de toute mesure un poids éternel de gloire. Aussi nous regardons, non point aux choses visibles, mais à celles qui sont invisibles… (2 Corinthiens 4.17, 18). Etes-vous exploité ? Dépouillé ? Persécuté ? Courage ! Des biens éternels d’une infinie richesse vous attendent Là-haut.
5. – Enfin, l’idée de récompense, toujours présente à l’esprit du chrétien, l’encourage à donner avec libéralité : Celui qui sème avec abondance moissonnera avec abondance (2 Corinthiens 9.6). Que ton aumône se fasse en secret, et ton Père qui voit dans le secret te le rendra (en récompenses ; Matthieu 6.4). Recommande aux riches… d’avoir de la libéralité, de la générosité et qu’ils s’amassent ainsi un beau et solide trésor pour l’avenir (1 Timothée 6.17, 18).
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Qui donc, parmi les élus, est digne de recevoir des récompenses ? En particulier, celui qui fait bon usage de ses biens matériels (1). Plus exactement :
(1) Nous ne considérons que cet aspect de ce vaste sujet.
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En terminant ce chapitre, il n’est pas inutile de rappeler que Dieu n’est pas seulement celui qui distribue les récompenses à ses élus ; plus encore il est lui-même notre récompense. L’Ecriture le confirme en rapportant la parole de l’Eternel adressée à Abraham alors qu’il avait renoncé aux richesses des rois de la plaine et remis son offrande au sacrificateur Melchisédeck : Je suis moi-même ton bouclier et ta grande récompense (Genèse 15.1).
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Puisse le Christ dire à chacun de nous lors de son retour : Bien, bon et fidèle serviteur ; tu as été fidèle en peu de choses, je t’établirai sur beaucoup ; entre dans la joie de ton Maître (Matthieu 25.21). – Alors la louange de chacun viendra de la part de Dieu. (1 Corinthiens 4.5). – Gloire, honneur et paix pour quiconque pratique le bien (Romains 2.10). Que l’Eternel te rende ce que tu as fait ! Que ta récompense soit complète de la part de l’Eternel sous les ailes de qui tu es venue te réfugier (Ruth 2.12).
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