Voici le septième livre de notre traité qui a pour objet de combattre cette hérésie nouvelle dont l’audace est insensée. Bien qu’il vienne après les six livres précédents, ce septième livre est capital et de la plus haute importance pour comprendre le contenu sacré d’une foi parfaite[1].
[1] Il s’agit pour Hilaire de démontrer l’unité de nature et non une simple unité morale, comme affirment les ariens.
Nous ne l’ignorons pas : nous gravissons le chemin de la doctrine évangélique qui est un sentier rude et escarpé. La crainte, née de la conscience de notre faiblesse, nous aurait fait rebrousser chemin ; mais, enflammé par l’ardeur de notre foi, impressionné par l’acharnement des hérétiques, anxieux à la pensée des dangers qui menacent les ignorants, nous ne pouvons taire ce que nous n’osons pas exprimer. Nous voilà sous la crainte d’un choix périlleux : garder le silence, tout comme ouvrir la bouche, nous rendrait coupable d’avoir trahi la vérité !
Car la finesse de l’hérésie s’entoure des incroyables artifices que peut imaginer un esprit dépravé. Par ces subterfuges, elle commence par simuler un attachement sincère à Dieu, puis elle trompe la bonne foi des simples qui lui prêtent l’oreille, et prend alors soin de se mettre à l’unisson de la sagesse du monde ; pour finir, elle détourne l’esprit de la vérité, sous prétexte d’asseoir sa doctrine sur une base solide. Car, en affirmant un seul Dieu, elle imite l’orthodoxie ; en reconnaissant le Fils de Dieu, elle trompe ceux qui l’écoutent en ne donnant pas à ce nom son véritable sens ; en prétendant que le Fils n’était pas avant de naître, elle satisfait à la sagesse du monde ; en proclamant encore Dieu immuable et incorporel, elle rejette la naissance de Dieu à partir de Dieu, en apportant pour justifier ce rejet, une raison fallacieuse.
Oui, elle se sert de notre doctrine pour se dresser contre nous ; elle utilise la foi de l’Eglise pour combattre la foi de l’Eglise : notre silence ou notre répartie risquent de tourner à notre désavantage, puisque les vérités que nous ne nions pas, lui permettent d’affirmer celles que nous nions !
Rappelons-le : nous avons averti le lecteur dans nos livres précédents, et, parcourant l’ensemble du texte blasphématoire, nous lui avons fait remarquer que tout l’effort de l’hérésie vise à nous faire croire que notre Seigneur Jésus-Christ n’est ni Fils de Dieu, ni Dieu. Car si on lui concède les noms de Dieu et de Fils par adoption, c’est pour nier en lui sa vraie nature de Dieu et sa filiation. On affirme Dieu immuable et incorporel – et c’est la vérité –, mais on se sert de cet argument pour nier que le Fils soit né de Dieu. Si l’on reconnaît que Dieu le Père est Dieu unique, c’est pour nous dissuader de croire à la divinité du Christ, puisque, nous dit-on, une nature incorporelle n’admet pas la notion de naissance, et notre foi en l’unité de Dieu est incompatible avec un Dieu, né de Dieu.
Mais déjà, dans les livres précédents, nous avons démontré, par la Loi et les Prophètes, qu’une telle déclaration était mensongère et ne tenait pas debout. Nous avons maintenu, dans notre répartie, qu’il fallait reconnaître un Dieu venant de Dieu, tout en affirmant un seul vrai Dieu ; nous avons précisé que ce seul vrai Dieu n’empêchait pas qu’il y eût en lui union de plusieurs personnes, sans que par ailleurs, nous eussions à croire en un autre Dieu, puisque, pour nous, notre foi ne reconnaît ni deux dieux ni un Dieu solitaire. Ce faisant, en ne niant pas et en n’affirmant pas absolument l’unité, la perfection de notre foi est assurée, puisque la nature qui fait qu’ils sont un, est à rapporter au Père et au Fils, sans pour autant que l’un et l’autre soient une seule personne.
Voulant démontrer le mystère indissoluble d’une foi parfaite, par l’enseignement des Evangiles et des Apôtres, notre premier devoir était de convaincre ceux qui nous écoutent de l’existence du Fils de Dieu dans la nature qui lui vient de sa vraie naissance, et de faire voir clairement qu’il est Fils, non pas en tant que venant d’ailleurs ou du néant, mais parce qu’il est né de Dieu. Les pages de notre dernier livre ne nous permettent plus de douter maintenant qu’il faille laisser de côté le nom de Fils, au sens de fils adoptif, et croire que le Christ est vrai Fils, en vertu de sa vraie naissance ; il nous reste encore à prouver cette vérité d’après les Evangiles. Nous pourrons ainsi reconnaître que le vrai Fils de Dieu est aussi vrai Dieu, car il ne serait pas vrai Fils, s’il n’était vrai Dieu, et il ne serait pas vrai Dieu, s’il n’était pas vrai Fils.
Rien n’est plus pénible pour un homme que la conscience d’un danger imminent ! Certes, les malheurs ignorés ou subits nous laissent dans un équilibre bien fragile, mais ils ne comportent pas la peur d’un futur incertain. Tandis que moi, qui vis dans l’angoisse de ce qui va m’arriver, j’ai à supporter ce tourment ! Oui, maintenant mon navire n’est plus dans un port tranquille, et je n’ignore pas qu’un naufrage peut l’engloutir ; je marche sur un chemin plein d’embûches, et je ne me crois pas à l’abri des brigands ; je traverse à la hâte les sables de Lybie, et je ne suis pas sûr de ne pas y rencontrer scorpions, vipères ou autre serpent venimeux ! Aucun repos pour mon souci, aucun repos pour mon âme ! Car je parle, alors que tous les hérétiques sont aux aguets, à l’affût de chaque mot qui sort de ma bouche, et la route que suit ma pensée est un sentier taillé à pic, très dangereux, coupé de chausse-trapes, tendu de pièges ! Que cette route soit difficile et pénible, j’ai maintenant moins sujet de m’en plaindre : je ne monte plus par mes propres moyens, mais en mettant mes pas dans les pas des Apôtres. Et pourtant, je suis toujours en péril : ou de dégringoler dans un précipice, ou de tomber dans une fosse, ou d’être enserré dans un filet ; oui, ma crainte n’a pas de cesse !
Car tandis qu’il me faut proclamer l’unité de Dieu, selon la Loi, les Prophètes et les Apôtres, Sabellius* se tient à mes côtés, prêt à me broyer de sa dent cruelle, comme une proie désirée, pour avoir avancé ce terme : unité de Dieu. Mais si, contre Sabellius, je ne parle pas de l’unité de Dieu, et si je proclame que le Fils de Dieu est vrai Dieu, une hérésie nouvelle me guette et me reproche d’annoncer deux dieux ! Et si je déclare alors le Fils de Dieu né de Marie, voilà qu’Hébion*, c’est-à-dire Photin*, se dresse pour s’emparer de cette assertion et la donner comme garantie de son erreur.
Je passe sous silence les autres hérésies : tous savent qu’elles sont étrangères à l’Eglise. Mais ce mal-là, bien que fréquemment dénoncé et rejeté, est encore aujourd’hui à l’intérieur de l’Eglise[2]. La Galatie en a nourri un grand nombre qui affirmaient d’une manière impie l’unité de Dieu. Alexandrie[3] a semé misérablement dans presque tout le monde, ses deux dieux, que du reste, elle nie. La Pannonie[4] soutient, selon une acception sacrilège, que Jésus vient de Marie. Et parmi toutes ces erreurs, l’Eglise court le risque de ne pas tenir pour vrai ce qui est vrai, puisqu’on tourne à l’hétérodoxie des thèses capables aussi bien d’affermir ou de ruiner la foi.
[2] Allusion à Marcel d’Ancyre, une des figures controversées du IVe siècle, que les ariens accusaient de sabellianisme.
[3] Patrie d’Arius, et berceau de l’arianisme.
[4] Photin de Sirmium.
Car nous ne pouvons affirmer d’une manière orthodoxe que Dieu est un, si nous entendons par là qu’il est seul, car le Dieu Fils ne pourrait être compris dans la foi en un Dieu solitaire. Au contraire, si l’on affirme un Dieu, Fils de Dieu, comme il l’est réellement, nous voici en péril de ne pas maintenir la foi en un Dieu unique. Et c’est aussi dangereux de nier l’unité de Dieu que de le proclamer solitaire. Mais ce danger, les adeptes de la folie du monde ne le ressentent pas ; car pour eux, il est difficile de reconnaître un être unique dans un être qui n’est pas solitaire, et comment comprendre que Dieu ne soit pas seul, s’il est un ?
Mais, je l’espère, l’Eglise fait rayonner la lumière de sa doctrine même sur le non-savoir du monde ; et bien qu’il ne reçoive pas la doctrine secrète cachée dans la foi, celui-ci entrevoit cependant que nous opposons aux hérétiques une vérité qui rend compte de ce mystère. Car elle est grande, la force de la vérité ! Lorsqu’elle ne peut être comprise par elle-même, elle éclaire cependant, par les arguments mêmes qui lui sont opposés. Demeurant immuable dans sa nature, elle renforce tous les jours la solidité qui la caractérise lorsqu’elle se voit attaquée. Car c’est le propre de l’Eglise de vaincre quand elle est blessée, de parfaire son intelligence lorsqu’on la conteste, de maintenir la vérité lorsqu’on la déserte !
Oui, vraiment, son désir est que tous demeurent avec elle et en elle. Elle ne veut rejeter personne de son sein paisible, elle ne veut perdre personne, pas même ceux qui se rendent indignes d’habiter une telle mère. Les hérétiques s’écartent-ils ou sont-ils rejetés de son sein ? Elle n’abandonne l’occasion de leur procurer un salut qui vient d’elle, que dans la mesure où il revient à la foi de chacun, d’attendre d’elle la béatitude. De fait, il est très facile de reconnaître cela en étudiant ces hérésies. Car, puisque l’Eglise est la seule qui ait été instituée par le Seigneur et affermie par les Apôtres, c’est l’égarement forcené des diverses hétérodoxies qui opère la coupure. Et l’on ne peut nier qu’une scission soit le fait d’une mauvaise intelligence de la foi, vu que le texte qu’on lit est ramené à une pensée que l’on a en tête, alors que ce devrait être notre pensée qui se plie au sens de ce que nous lisons.
Cependant, puisque chacune de ces sectes s’oppose aux autres, la vraie foi est à discerner, non seulement d’après la doctrine de telle partie, mais d’après les thèses de ses adversaires. De la sorte, bien que toutes ces églises hétérodoxes se dressent contre la seule Eglise, du fait qu’elle est seule à rester une dans la foi, celle-ci réfute l’égarement de tous ces impies.
En effet, tous ces hérétiques s’élèvent contre l’Eglise. Mais s’ils se terrassent les uns les autres, ces beaux exploits ne leur profitent pas ! Car leurs victoires sont les triomphes de l’Eglise sur chacun d’eux, puisque chaque hérésie combat dans une autre la doctrine même que rejette la foi de l’Eglise ! Les hérétiques n’ont en effet, aucun enseignement commun, et par suite, s’opposant les uns aux autres, ils affermissent notre foi.
Sabellius* enseigne le Dieu Un, tout en escamotant la naissance du Fils, et cependant, il ne doute pas que la puissance de la nature qui agit dans le Christ homme, soit divine. De fait, il ignore le mystère du Fils, et l’admiration qu’il éprouve à la vue de ses œuvres, obnubile chez lui la foi en sa vraie génération. Quand il entend ces mots : « Celui qui me voit, voit le Père » (Jean 14.9), il en tire une conclusion hétérodoxe : la confusion des personnes au sein d’une nature indivisible et identique, puisqu’il ne comprend pas que l’unité de nature est manifestée par ce signe de la naissance du Fils. De voir le Père dans le Fils, nous assure de la divinité de ce dernier, sans abolir sa naissance. C’est pourquoi, pour connaître l’un, il faut connaître l’autre, car la nature est la même en l’un comme en l’autre ; et, puisqu’ils ne diffèrent en rien, on contemple de part et d’autre la même nature qui leur appartient en propre. Non, le bon sens ne saurait mettre en doute cette vérité : le Fils qui demeure dans la « condition divine » (Philippiens 2.6), nous révèle à partir de lui-même, l’image de la « condition divine »[5].
[5] L’expression vient de Philippiens 2.6. Le mot « forma » est traduit par « condition », il s’agit des attributs essentiels.
Une autre parole du Seigneur : « Moi et le Père, nous sommes un » (Jean 10.30), est mise à profit par le délire insensé dont fait preuve cette foi tordue. Car l’unité d’une nature identique amène à croire, d’une manière impie, à l’erreur de l’identité ces personnes, et l’unique sens perçu en cette citation ne rend pas compte de l’explication qu’il faut en donner. Car cette phrase : « Moi et le Père, sommes un », ne concerne pas un Dieu solitaire. La conjonction : « et », qui précède le mot : « Père », ne permet pas, en effet, de comprendre qu’il s’agisse ici d’une seule personne, et le verbe : « sommes », n’est pas un singulier. Par ailleurs, « nous sommes un » n’empêche pas qu’il y ait naissance, mais n’attribue pas une autre nature à celui qui est engendré, puisque : « un » s’oppose à différent, et : « nous sommes » ne peut s’appliquer à une seule personne.
Rapproche cette erreur de celle de nos hérétiques actuels, lis se prêtent assistance contre Sabellius* et affirment avoir lu : « Le Père est plus grand que moi » (Jean 14.28). Ne comprenant rien à la signification secrète et profonde de la naissance, ni au mystère d’un Dieu qui s’est anéanti[6] et a pris notre chair, ils soutiendront alors l’infériorité de la nature du Christ, parce que celui-ci affirme le Père plus grand que lui[7]. Contre Sabellius, ils opposeront un Fils si bien Fils qu’il est inférieur au Père, qu’il demande à celui-ci une gloire passagère, craint la mort et meurt[8].
[6] Cf. Philippiens 2.6.
[7] Cf. Jean 17.1.
[8] Cf. Luc 22.43-44.
En riposte, Sabellius fait ressortir la nature de Dieu évidente dans les actions du Christ. Et, tandis que notre nouvelle hérésie, celle qui fleurit aujourd’hui, admet un seul Dieu pour éliminer Dieu le Fils, Sabellius, lui, retient dans sa profession de foi, l’unité de Dieu pour qu’il ne soit plus question du Fils. L’un nous montre le Fils qui agit, l’autre soutient que c’est Dieu qui accomplit ces œuvres. Celui-ci affirme l’unité de Dieu, l’autre la nie. Sabellius défend sa position en ces termes : « Seule la nature divine peut réaliser des œuvres telles que celles qui ont été faites : la rémission des péchés, la guérison des malades, la marche permise aux boiteux, la vue rendue aux aveugles et la vie aux morts. Tout cela vient de Dieu seul. Aucune autre nature, si ce n’est celle d’un Dieu conscient de sa divinité, ne pourrait affirmer : « Moi et le Père, nous sommes un » (Jn 10,30). Pourquoi me forcer à reconnaître une autre entité ? Pourquoi m’inviter à croire en un autre Dieu ? Dieu seul accomplit les actions qui sont propres à Dieu. »
A cela, ses adversaires, ceux qui prétendent que le Fils a une nature différente de celle du Père, feront entendre, de leur bouche de vipère, des sifflements non moins perçants : « Tu ne connais point le plan mystérieux de ton salut ! Tu dois croire au Fils qui a fait les mondes[9], a façonné les hommes[10] leur a donné la Loi par des Anges[11], qui est né de Marie, qui a été envoyé par le Père[12], qui fut crucifié, est mort, a été enseveli, qui est ressuscité des morts et s’est assis à la droite de Dieu[13] lui, le juge des vivants et des morts[14]. En lui, tu dois être régénéré, c’est lui qu’il te faut confesser, c’est son royaume qu’il te reste à mériter. »
[9] Cf. Hébreux 1.2.
[10] Cf. Jean 2.7.
[11] Cf. Galates 3.19.
[12] Jean 8.16.
[13] Cf. Marc 16.19.
[14] Actes 10.42.
Ennemis de l’Eglise l’un comme l’autre, ils plaident pour l’intérêt de l’Eglise : Sabellius reconnaît un Dieu par nature dans les œuvres du Christ, ce Christ que ses adversaires affirment Fils de Dieu, de par le plan mystérieux de Dieu auquel adhère notre foi.
Et maintenant, par la victoire que remporte notre foi, Hébion*, c’est-à-dire Photin, est lui aussi vainqueur et vaincu. D’un côté, il reprend Sabellius* : comment ne reconnaît-il pas l’homme – Fils de Dieu ! D’un autre côté, les Ariens fanatiques[15] le confondent : comment ignore-t-il que le Fils de Dieu habite cet homme ! Contre Sabellius, il allègue par l’Evangile, eue cet homme est fils de Marie. Arius, par l’Evangile, ne lui perm et pas de dire que Jésus est seulement fils de Marie. Contre celui qui refuse le Fils, l’homme Jésus est élevé par l’autre à la dignité de Fils. Parce que Photin ne veut rien entendre d’un Fils né avant tous les siècles, Arius nie que le Fils de Dieu soit seulement né de l’homme.
[15] Première mention explicite des disciples d’Arius. Le mot « ariomanitae » employé aussi par Athanase et Grégoire de Nazianze tire son origine très probablement du mot grec « Arès », dieu de la guerre dont la furie est la caractéristique. Le vocable semblait très approprié au tempérament d’Arius (cf. Trinité II, 1 et 5).
Laissons-les se battre si cela leur fait plaisir, car en se combattant les uns les autres, chacun d’eux est vaincu ! Nos hérétiques, ceux que l’on voit poindre aujourd’hui, sont réfutés en ce qui concerne la nature de Dieu ; Sabellius est démenti à propos du mystère du Fils ; Photin est convaincu de méconnaître le Fils de Dieu né avant tous les siècles, ou de le renier.
Au-dessus de cette mêlée, la foi de l’Eglise, appuyée solidement sur l’enseignement des Evangiles et des Apôtres, maintient contre Sabellius, l’affirmation de l’existence du Fils ; contre Arius, qu’il possède la nature de Dieu, et contre Photin, qu’il est le créateur de l’univers. Et cette doctrine, professée par l’Eglise, est d’autant plus vraie que tous ces hérétiques ne peuvent s’entendre pour la nier ! Car Sabellius présente les œuvres du Christ pour rendre compte de sa nature divine, mais il nie que ce soit le Fils qui agisse. Les ariens l’appellent Fils, mais ils ne reconnaissent pas qu’en lui réside la nature divine. Photin maintient son humanité, mais il ignore que le Fils, devenu homme, est né de Dieu avant tous les siècles.
Ainsi, tandis que chacune de ces hérésies défend sa position ou condamne celle des autres, toutes mettent en évidence la vérité de notre foi, elle qui défend ou condamne les doctrines selon qu’elles sont orthodoxes ou non.
Il me fallait donc traiter de tout cela en peu de mots, non pour augmenter le volume de mon ouvrage, mais par mesure de précaution : d’abord pour montrer que dans ces doctrines hérétiques, tout est peu sûr et sujet à l’erreur, puisqu’il leur arrive de se guerroyer à notre avantage ; ensuite pour que personne n’aille tomber dans l’erreur de croire, ou bien en deux dieux, ou bien, à l’opposé, en un Dieu solitaire et unique, alors que, pour lutter contre nos hérétiques actuels, je m’oppose à leurs dires et proclame Dieu le Père et Dieu le Fils, affirmant aussi chez le Père et le Fils, un seul nom, une seule nature, dans une même divinité. Car en Dieu le Père et en Dieu le Fils, selon notre enseignement, il n’y a pas confusion des personnes ; sous la démonstration que nous avançons de leur nature identique, ne se peut glisser plusieurs dieux.
Déjà, à l’aide du témoignage de l’Evangile, nous avons suffisamment répondu, dans le livre précédent, à ceux qui nient que le Fils de Dieu vient de Dieu, par une vraie naissance. Nous devons maintenant démontrer que celui qui est vraiment Fils de Dieu en raison de sa nature, est aussi Dieu par nature. Pourtant, que notre foi ne s’égare pas vers un Dieu solitaire ou vers un autre Dieu ; puisqu’il n’y a qu’un Dieu unique, ne le présentons pas comme s’il était solitaire ; ni comme s’il n’était pas unique, alors que nous avons à reconnaître qu’il n’est pas seul.