Mon Dieu, rien ne peut combler le vide de mon âme ici-bas. Riche de santé, d’amis, pourvu de toutes les nécessités de la vie, je soupire encore après des biens meilleurs ; ma famille elle-même ne peut me suffire ; aimé, caressé ; heureux autant qu’on peut l’être ainsi, je ne suis pas rassasié. J’ai soif d’infini, de connaissance, de vie, d’affection et même soif de santé, sans pouvoir jamais satisfaire à plein un seul de ces désirs. Ah ! quand pourrai-je sortir de ma prison terrestre et m’élever libre dans les cieux ! quand pourrai-je te connaître comme tu me connais, t’aimer comme tu m’aimes ? quand serai-je au milieu de ces anges, célébrant ta gloire, contemplant ta face radieuse ? quand goûterai-je ces rassasiements de joies qui sont à ta droite pour toujours ?
Mais, Seigneur, en attendant que tu m’appelles de la terre au ciel, envoie ton ciel sur la terre. Donne-moi plus d’amour, de support, de patience envers ces frères que j’aime si peu et qui, mieux aimés, me rendraient plus heureux. Donne-moi plus de dévouement, de douceur, de bons exemples à transmettre à ma famille qui, mieux élevée, me donnera plus de joies chrétiennes. Donne-moi plus de foi pour contempler ta cour céleste, plus de sainteté pour mieux ressembler à tes anges, et alors je me sentirai plus près d’eux et de toi, plus paisible, plus joyeux même au milieu de ce monde triste et troublé. Oui, je le reconnais à cette heure, ce n’est pas toi, c’est moi qui mets des bornes si étroites à mes affections, à mes connaissances spirituelles, à ma sanctification, et ainsi à mon bonheur. Ta Parole, si riche en instruction, m’est ouverte, c’est moi qui ne la lis pas ; ton Saint-Esprit m’est offert, c’est moi qui ne veux pas l’accepter. Je puis tout te demander, obtenir, et je ne demande rien que du bout des lèvres. Donne-moi donc, Seigneur, d’aller me désaltérer aux sources qui jaillissent, sous ma main sur la terre, avant de crier : J’ai soif de l’infini, soif de l’éternité.