Mais afin qu’on entende bien ces vérités, que Dieu hait les pécheurs, et aime les justes, il faut faire attention et distinguer entre un pécheur qui sent et qui déteste ses péchés, et un pécheur qui ne sent et qui ne déteste point ses péchés. Ce sont les prières des pécheurs qui ne sentent point le péché que Dieu rejette, parce qu’ils n’entendent point et ne savent point ce qu’ils disent : un moine, par exemple, ou une personne dans la confiance en son état, et dans la sécurité, priera et chantera souvent ce psaume, et dira souvent : Aie pitié de moi ; mais parce qu’il vit dans la confiance en sa propre justice, et qu’il ne sent point l’impureté de son cœur, il en prononce bien les syllabes, mais il n’entend et ne désigne point la chose même dans la réalité. Bien plus, il agit contrairement à sa prière ; il demande pardon, il demande grâce et miséricorde, et pourtant d’un autre côté, il cherche son appui et sa consolation, tantôt en ceci, tantôt en cela ; il cherche des expiations et des satisfactions dans ses propres œuvres et dans son culte extérieur. N’est-ce pas là se moquer de Dieu ? De même si un mendiant criait à pleine bouche qu’on lui donne une aumône, et que lorsqu’on voudrait la lui donner, il se dît assez riche et se vantât ainsi de sa pauvreté comme de grandes richesses, ne témoignerait-il pas par là qu’il ne cherche pas sérieusement une aumône et qu’il n’a pas besoin du secours de celui à qui il s’adresse ?
Ainsi les ennemis et les contempteurs de l’Évangile, ont beaucoup de belles paroles, mais ils ne possèdent rien de la réalité ; au contraire, ils font des choses qui lui sont tout à fait opposées en inventant et en cherchant plusieurs cultes extérieurs, en cherchant la rémission de leurs péchés, dans leurs messes, dans leurs pèlerinages et dans d’autres choses inutiles.