Nous venons d’ouvrir la porte à la possibilité et même à la nécessité du surnaturel physique, pour quiconque croit à la liberté divine et humaine. Et, selon les prémisses précédemment posées, nous avons établi le surnaturel physique dans la dépendance du surnaturel moral. Le vrai, le réel surnaturel, c’est le moral ; le physique n’étant que l’expression concomitante ou subséquente de l’autre. Nous avons expliqué de la sorte la possibilité de tous les miracles à base morale : inspiration, révélation, guérisons (tous relevant de l’obligation ou de la suggestion), régénération, sanctification, etc. C’est ce qu’une certaine théologie appelle « le grand surnaturel ».
Reste « le petit surnaturel » ; le surnaturel à base physique. En d’autres termes le surnaturel physique immédiat, celui où Dieu, dans une intention morale assurément, n’agit plus, ou n’est plus conçu comme agissant, sur l’homme seulement, et par l’homme sur la nature, mais au contraire, sur la nature d’abord, et par la nature sur l’homme (ainsi par exemple : la multiplication des pains, le miracle des noces de Cana, si l’on en admet l’historicité, l’apaisement de la tempête, et une grande partie des miracles de l’Ancien Testament).
Pour traiter cette question à fond et sous toutes ses faces, il faudrait plus de temps que je n’en ai. Dans le fond, j’ai le sentiment que la réponse à la question dépend de la notion religieuse que l’on a de Dieu, et des rapports de Dieu au monde. On tranchera par la négative si la notion que l’on a de Dieu tient du déisme (négation de la providence) ou du panthéisme (négation de la liberté) ; on tranchera par l’affirmative, si la notion que l’on a de Dieu est franchement théiste, c’est-à-dire si elle affirme nettement l’activité actuelle de Dieu dans le monde, sa transcendance au monde et la liberté de Dieu à l’égard du monde. Mais je ne puis entrer dans aucun développement de ce côté. Je me bornerai à faire ce que nous avons fait jusqu’à présent, c’est-à-dire : 1° à juger de la question par des analogies humaines ; puis 2° à signaler la convenance morale du surnaturel physique immédiat.
1. Analogies humaines. — Je m’appuie ici encore, en vous y renvoyant, sur le travail de M. Teissonnière. Il montre, par une suite d’exemples, tirés des Annales des sciences psychiques, que, de même que les faits de télépathie démontrent l’existence de relations immédiates entre les âmes, de même « tous les faits de psychodynamie, parmi lesquels un certain nombre paraissent établis de façon indubitable, prouvent la possibilité d’une action de l’âme dans le domaine naturel physique, en l’absence de tout intermédiaire visible ». Ces faits auxquels je fais allusion seulement, parce que les limites de ce cours ne me permettent pas d’entrer dans leur examen, ces faits sont nombreux et trop bien attestés pour pouvoir être aujourd’hui contestés. Ils ont toujours été nombreux, mais on ne les tenait pas pour tels, ni surtout pour vrais, parce que l’observation ne s’y était point portée, et qu’il régnait contre eux un préjugé que beaucoup de personnes partagent encore. Les gens religieux les condamnaient comme diaboliques, entachés de sorcellerie ou de magie noire ; les scientifiques d’autre part les répudiaient comme absurdes, légendaires, impossibles, et par conséquent fictifs. Et, en effet, ils ne rentrent pas dans les cadres un peu étroits que la science, nouvelle dogmatique, croyait avoir à jamais tracés. On revient aujourd’hui, et rapidement, de ce double préjugé religieux et scientifique. L’attention humaine une fois tournée de ce côté fait et fera encore de riches découvertes. Les phénomènes de métapsychisme (c’est ainsi qu’on les nomme pour les différencier des phénomènes psychiques ordinaires et réguliers) se sont trouvés être légion, et se produire partout, toujours, chez tous les peuples, à tous les degrés de civilisation et de culture, aussi bien dans le présent le plus moderne que dans le passé le plus reculé. Ils semblent surgir sous les pas des observateurs et des enquêteurs comme des champignons après la pluie. Ils augmentent sans cesse en nombre, en diversité, en singularité. Sans doute, comparés au phénomène psychique régulier, au psychisme normal, ils ne constituent, et ne constitueront peut-être jamais, qu’un groupe de phénomènes restreints, rares, sporadiques, et il est possible que la science continue de les appeler, pour cette raison, supra-normaux, mais l’ensemble en est dès maintenant assez solidement établi pour donner lieu à des classifications et à des essais de théories explicatives, qui sont déconcertantes pour les philosophies et jettent un jour singulier sur la métaphysique probable de l’avenire. La seule relation des faits observés et vérifiés remplit des volumes et des volumes (entre autres ceux de la Société pour les recherches psychiques de Londres). Il se pourrait d’ailleurs — c’est l’opinion de Myers — que ces faits de télépathie et de psychodynamie, soient destinés à devenir toujours plus fréquents et plus nombreux dans la vie de l’humanité. Et cela pour deux raisons. L’une artificielle : on produit ces faits presque à volonté par la suggestion et l’hypnose et l’on en emploie quelques-uns dans un but de thérapeutique physique ou morale, et l’autre naturelle : c’est qu’ils semblent être dans la ligne du développement de la race. Les facultés actuellement considérées comme parapsychiques, tendraient à devenir psychiques et courantes, par l’éclosion et la mise en œuvre progressive de virtualités longtemps endormies et restées stériles dans le subconscient psychologique.
e – P. ex. F.-W.-H. Myers, Human Personality and its survival after bodily death, 1903.
A côté des faits de psychodynamie vitale subjective, qui témoignent d’« une action mystérieuse de l’âme sur son propre organisme, y produisant des effets curatifs extraordinaires », la psychodynamie vitale objective fait voir « l’action de l’âme s’exerçant directement sur des organismes animaux et sur des organismes végétaux » ; enfin la psychodynamie matérielle permet de constater « la possibilité d’une action directe de l’âme sur des objets matériels, capable d’en changer les propriétés chimiques, ou capable — et le fait paraît incontestable — d’y produire des mouvements de lévitation ou de translation ». Je passe sur les exemples cités, que vous trouverez là et qui sont du reste classiques.
Intervertissez maintenant les sujets : à la place de l’homme, mettez Dieu ; de ces phénomènes dont l’homme est la cause, concluez par une analogie très légitime, aux mêmes phénomènes dont Dieu serait la cause : vous avez l’équivalent divin de ce que suppose, chez l’homme, le surnaturel physique immédiat. Et. même un a fortiori ne sera point ici déplacé. Vous ne vous tromperez pas beaucoup en estimant, que si l’homme, dans certains cas et sous certaines conditions encore étroitement limitées et partiellement inconnues, est capable d’agir directement, sans l’intermédiaire de son propre organisme, sur la nature physique organique et même inorganique, à plus forte raison Dieu en sera-t-il capable, capable toujours et dans tous les cas.
[Je ne prétends pas avoir épuisé, ni même traité, le sujet mais j’ai fourni un équivalent humain constaté d’un phénomène divin contesté. Et à mon sens, la réalité de l’un entraîne la possibilité de l’autre. Pourquoi ? En vertu de ce minimum d’anthropomorphisme sans lequel la religion n’est plus possible, et bien moins encore le christianisme.]
2. Convenance morale du surnaturel physique immédiat. — On nous répondra peut-être que le problème qui se pose à propos du surnaturel à base physique, n’est pas tant celui de la capacité de Dieu à agir directement sur la nature, que celui de la convenance morale, du caractère moral, de cette action. Les analogues humains par lesquels on en juge n’ont, à l’ordinaire, rien d’essentiellement moral ; et l’on ne voit guère ce que ce genre de supranormal peut avoir de commun avec le surnaturel rédempteur évangélique. Comment attendra-t-on d’un miracle physique une régénération morale ? De l’un à l’autre, il y a un abîme, un abîme infranchissable, le « grand abîme » dont parle Jésus dans la parabole de Lazare et du mauvais riche ; celui qui sépare le merveilleux moral, spirituel, païen, magique et thaumaturgique, du surnaturel chrétien, cet abîme que Jésus se refusait à combler en disant : « Ils ont Moïse et les prophètes », et en se refusant lui-même aux miracles de cet ordre que les Juifs lui demandaient.
Il est vrai. Cependant, si l’on en croit le témoignage évangélique, Jésus ne s’y serait pas refusé toujours. Dans certaines circonstances, sous certaines conditions, il aurait accompli des miracles du genre qu’on incrimine comme étrangers à la vie morale. Qu’est-ce à dire, sinon qu’une distinction s’impose. Ce qu’il faut concéder, c’est ceci : le miracle divin à base naturelle, plus exactement, le miracle de psychodynamie divine matérielle, ne saurait être, en effet, moral, spirituel et rédempteur directement ; mais il pourrait l’être indirectement, c’est-à-dire par ses intentions, son but et sa fin ; et donc se rattacher, de la sorte, au surnaturel moral de la rédemption. Il le peut ou le pourrait pour deux raisons : l’une plutôt subjective, et l’autre plutôt objective.
Pour une raison subjective d’abord. Remarquez en effet que le péché, en troublant l’homme lui-même dans sa conscience, en y opérant cette disruption psychologique, morale et religieuse dont nous parlions plus haut, trouble du même coup la conscience que le pécheur prend de l’univers et de l’histoire. Leur signification religieuse se voile et s’obscurcit. Même supposés normaux, le spectacle de la nature et le cours de l’histoire ne peuvent plus être pour une conscience coupable ce qu’ils seraient pour une conscience pure. Le regard moral de l’homme déchu est faussé, soit qu’il regarde au dedans, soit qu’il regarde au dehors. La nature, qui devait manifester à l’homme une partie au moins du caractère de Dieu, « sa puissance et sa divinité », comme s’exprime l’apôtre, le lui dérobe et le lui cache au contraire. Si tout y devient motif de croire et d’adorer pour le chrétien, parce que son œil est purifié, tout y devient raison de révolte et d’incrédulité pour l’incrédule, parce que son œil est obscur. La même constance des lois naturelles, qui témoigne au premier de la fidélité de son Dieu, n’enseigne au second qu’une leçon de fatalisme et d’impersonnalité. Et les événements dans lesquels l’un adore la providence divine, ne fournissent à l’autre qu’un prétexte au murmure et au blasphème.
Il y a plus. La nature et l’histoire, que nous avons supposées intactes, ne le sont pas en effet. Les phénomènes de la nature et le cours de l’histoire ne sont pas ce qu’ils auraient dû être. Un pouvoir hostile, une puissance de désordre, de souffrance et de mort s’y cachent et s’y déploient, qui constituent pour l’homme un sérieux obstacle à la naissance et au maintien de la foi religieuse. La nature et l’histoire peuvent être et sont en réalité scandale à la conscience humaine ; elles peuvent contribuer, et contribuent en effet, à la démoraliser. Cela est si vrai, que l’apologiste moderne, obligé, comme on dit, de faire la part du feu, en parle le moins possible, et voudrait bien pouvoir n’en point parler du tout. Il abandonne le Dieu de l’histoire et le Dieu de la nature, s’en tient au Dieu de la conscience, et ne trouve que là un terrain solide. Mais cette position exclusivement morale, cette séparation du Dieu de la nature et de l’histoire d’avec le Dieu de la conscience, utile et nécessaire au début, devient à la longue dangereuse et précaire. Après avoir servi à fonder la foi, elle peut servir à l’ébranler de nouveau. On reste en droit de demander pourquoi le Dieu de la conscience ne serait pas aussi le Dieu de la nature et de l’histoire ; et s’il n’appartiendrait pas au Dieu vivant et vrai, au Dieu complet, d’être à la fois l’un et l’autre. Ne lui appartiendrait-il pas au moins, si d’ailleurs ce Dieu doit être celui de l’Évangile, c’est-à-dire celui d’une révélation historique et progressive qui doit aboutir au royaume de Dieu sur la terre (c’est-à-dire dans l’histoire et dans la nature), d’avoir posé dans l’histoire les assises de sa révélation ; d’avoir imprimé dans l’histoire et sur la nature elle-même des traces certaines de son activité rédemptrice, de manière à laisser prévoir et pressentir au moins, que le Dieu de la grâce peut être aussi, quand il le veut, celui de l’histoire — en attendant qu’il le soit, le veuille ou le puisse être pleinement et manifestement lors de l’avènement du Royaume ? L’école de Dieu, la pédagogique divine, ne comporterait-elle pas ces « leçons de choses » que préconise l’école moderne pour faire la preuve que le Dieu de la conscience est aussi celui de la nature et de l’histoire, que la rédemption de la conscience entraîne une rédemption de la nature ?
Dans de telles conditions et, étant donné du reste que tout surnaturel moral implique du surnaturel physique, le miracle à base physique ne pourrait-il pas, sous certaines conditions (morales et rédemptrices), revêtir un caractère légitime, devenir, par exemple, un aide et un adjuvant nécessaires à la révélation et à la rédemption de conscience ? Concourir avec elle au même but, qui est de révéler Dieu comme Sauveur de l’homme, comme Celui dont la volonté salvifique triomphe de tous les obstacles et affirme son caractère, aussi bien à travers le désordre de l’histoire et le déterminisme de la nature, qu’à travers l’état de démoralisation de la conscience humaine ? Pour se justifier de la sorte, c’est-à-dire pour se justifier moralement, il suffit que le miracle divin, à base physique (la résurrection de Lazare, l’apaisement de la tempête, la multiplication des pains), ne soit point arbitraire, mais serve effectivement de révélation rédemptrice pour celui qui est déjà et qui doit devenir l’objet du surnaturel moral, et concoure à son édification. Or que cela soit, que le récit (et tout d’abord l’acte même) de la résurrection de Lazare, de la multiplication des pains, de l’apaisement de la tempête, ait eu cet effet sur d’innombrables croyants, cela est indiscutable.
Ainsi, d’une part, la possibilité matérielle du miracle (surnaturel physique immédiat) comme action directe de Dieu sur la nature, est donnée par la constatation du psychodynamisme humain ; de l’autre sa possibilité, sa convenance morale est donnée par la solidarité du miracle avec le surnaturel rédempteur. Ici encore, je n’épuise pas la question, j’indique plutôt la voie où la solution doit être cherchée.
J’ajoute que la crédibilité de tous les miracles (bibliques, par exemple) n’est nullement donnée par ce que nous venons de dire. Ce qui est donné, c’est la possibilité matérielle et la convenance morale de ce genre de miracle, dont la Bible nous offre des spécimens. Ces miracles possibles sont-ils réels ? C’est affaire à la critique de le déterminer en chaque cas particulier. La critique externe s’assurera de ce que vaut le ou les témoignages qui les attestent. La critique interne examinera dans quels rapports de but, d’intention et d’effet ils se trouvent avec la rédemption morale.
Remarque. — Je voudrais ici glisser une remarque destinée à montrer combien le point de vue auquel nous nous sommes placé se rapproche du point de vue biblique sur le surnaturel et le miracle ; combien le miraculeux biblique recouvre exactement celui que nous avons essayé de définir et de quelle façon il l’illustre.
Dans la Bible le terme de miracle n’implique aucune théorie ; il caractérise, il est vrai, des phénomènes extraordinaires, appelés prodiges, signes, exploits, merveilles, grandes œuvres, choses terribles et merveilleuses ; mais il ne les caractérise pas comme surnaturels au sens étroit, précis, que les théologiens ou les philosophes lui ont donné depuis. Le caractère spécifique du miracle biblique, ce qu’il faut pour que, dans la Bible, un événement soit qualifié de miraculeux, ce n’est pas qu’il déroge aux lois de la nature, ce n’est pas qu’il soit bienfaisant ou malfaisant, ce n’est pas qu’il soit un fait d’arbitraire, de caprice, ou même de liberté pure, ni même encore, comme nous le verrons, qu’il se rattache exclusivement à la causalité divine. Non. C’est, d’une part, qu’il apparaisse extraordinaire, c’est-à-dire comme ne s’expliquant pas par des moyens naturels apparents ; et d’autre part, qu’il se rattache d’une façon médiate ou immédiate (la question ne se pose pas) à l’activité d’une personne morale (humaine, divine ou diabolique).
Remarquez, en effet, qu’il n’y a pas que Dieu, dans la Bible, qui soit capable de surnaturel (de surnaturel en général et même de surnaturel physique) ; l’homme aussi en est capable. Le miracle n’y est pas toujours considéré comme un fait divin ; c’est souvent un fait humain. Il n’y est pas même toujours le signe de la valeur morale ou religieuse de son agent humain.
En fait, on peut retrouver, dans la Bible, trois catégories de miracles, qui correspondent à peu près aux trois genres de surnaturel physique que nous avons établis :
I. Les miracles accomplis par l’homme sans le secours de Dieu, indépendamment de toute délégation divine, de toute causalité divine. Les faux Christs, les faux prophètes, les songeurs, les devins, les enchanteurs, les magiciens, tous sont conçus et présentés dans la Bible (Ancien et Nouveau Testament) comme capables d’opérer des miracles. Par exemple : les magiciens d’Egypte (Exode 7.11, 22 ; 8.7) ; la magicienne d’En-Dor (1 Samuel 28.7-14) ; Simon le magicien (Actes 8.9-11) ; Barjésus ou Elymas (Actes 13.6), etc… Ces miracles sont considérés comme si réels que non seulement ils peuvent séduire les méchants (2 Thessaloniciens 2.9-12), ou les foules (Apocalypse 13.13-14), mais qu’ils peuvent être pour les chrétiens eux-mêmes une occasion d’apostasie (Marc 13.22 ; 2 Thessaloniciens 2.3, 9) et servir à accréditer de fausses religions (Deutéronome 13.1-3 ; Apocalypse 13.13-14). Les pharisiens du temps de Jésus conçoivent parfaitement qu’on puisse opérer des miracles et pourtant n’être pas de Dieu (Jean 11.47 ; Actes 4.16). Cette catégorie de miracles rentrerait donc dans ce que nous avons appelé nous-même le surnaturel physique humain, et serait à rapprocher de ces faits de parapsychisme où le sujet agit sur la nature physique indépendamment de son organisme corporel et de tout intermédiaire visible ou matériel. A moins qu’on ne préfère les ranger (ce qui paraît être l’opinion des auteurs sacrés) dans la classe des miracles diaboliques.
[Nous pensons, pour notre part, qu’il y en a des uns et des autres, de purement humains (comme ceux de Simon le magicien, des magiciens d’Egypte, ou de la pythonisse d’En-Dor) — et de diaboliques (par hypothèse) comme ceux des faux messies, des antichrists, etc.]
II. Les miracles accomplis par Dieu au moyen de l’homme. Ce sont de beaucoup les plus nombreux, ils sont si nombreux que je n’en rappelle ici aucun exemple ; ils sont dans toutes les mémoires. Ils sont attribués à Dieu, mais produits (ou manifestés) par certains hommes faisant fonction de médiums providentiels de la révélation et de la rédemption divine au sein de la race et de son histoire. Dans un certain nombre de cas, l’action divine apparaît comme sollicitée au moment même du miracle ; en d’autres cas le pouvoir miraculeux apparaît comme conféré au sujet humain, pour une période limitée (Pierre et Paul dans les Actes) ou une fois pour toutes. Ces miracles ressortiraient à la catégorie des miracles mixtes, du surnaturel physique divin médiat.
III. Les miracles accomplis par Dieu sans le secours de l’homme. Dieu agit là sans aucun intermédiaire psychique humain. Il produit le surnaturel : ou le surnaturel moral pur, par pure obligation ou pure suggestion ; ou le surnaturel physique immédiat, par psychodynamie objective vitale ou matérielle.
Il nous semble que cette classification, dans son rapport avec celle que nous avons établie d’autre part, éclaire le surnaturel biblique, qu’elle aide un peu à le comprendre. Il nous semble qu’il en va de même de la définition que nous en avons donnée. Cette définition et cette classification en tous cas nous mettent à l’aise à l’endroit du miracle, et nous permettent de le regarder en face sans nous laisser effrayer par les clameurs de la science, de la libre pensée et, — hélas ! pourquoi faut-il l’ajouter ? — de la théologie moderne.