Mais pourquoi parler davantage du religieux, sentiment et de la piété chrétienne qui nous lie à l’empereur ? Pourrions-nous y manquer envers l’élu de notre Dieu ? A ce titre, je le dirai hardiment : César est à nous plus qu’à personne, puisque c’est notre Dieu qui l’a établi ce qu’il est. Je suis donc à même plus qu’un autre de contribuer à sa conservation, non-seulement parce que je la demande à celui qui peut l’accorder, et que je suis dans les conditions nécessaires pour l’obtenir, mais encore parce qu’en abaissant la majesté impériale au-dessous de Dieu, mais de Dieu seul, j’intéresse bien plus sûrement en sa faveur le Dieu auquel je soumets César. Je le fais sujet de Dieu ; mais son égal, non. Je ne l’appellerai point. Dieu, et parce que je ne sais pas mentir, et parce qu’il ne me vient point à l’esprit de l’insulter, et parce que lui-même ne voudrait pas s’entendre appeler dieu. Homme, il ne peut que gagner à s’abaisser devant Dieu. C’est bien assez pour lui de porter le titre d’empereur, titre auguste qui lui vient d’en haut. L’appeler dieu, c’est lui dénier sa qualité de César : il ne peut être empereur sans être un homme. Lors même qu’il s’avance environné de gloire sur le char triomphal, on a soin de l’avertir qu’il est mortel. Derrière lui est placé un héraut qui lui crie : Regarde derrière toi, et souviens-toi que tu es homme. Rien de si flatteur, de si propre à lui donner une haute idée de sa pompe éblouissante, que l’indispensable précaution de lui rappeler la fragilité de son être. Appelez-le dieu, il descend, parce qu’il a la conscience du mensonge : mais qu’il est mille fois plus grand quand on l’avertit de ne pas se croire un dieu !