Ses frères voulaient le forcer à demeurer avec eux pour y consommer son sacrifice, mais il n’y consentit pas ; il retourna à la montagne du désert dont il avait fait son habitation, et peu de mois après il tomba malade. Ayant appelé les deux disciples qui demeuraient avec lui pour le servir à cause de sa vieillesse, il leur dit : Je vais suivre la route de mes pères, comme dit l’Écriture, car je vois que le Seigneur m’appelle ; ensevelissez donc mon corps vous-mêmes, cachez-le sous la terre, et soyez fidèles à garder cette recommandation ; que personne ne connaisse le lieu où sera mon corps, excepté vous seuls. Au jour de la résurrection des morts, je le recevrai incorruptible des mains de mon Sauveur. Vous partagerez ainsi mes vêtements : vous donnerez à l’évêque Athanase une de mes deux peaux de brebis avec le manteau sur lequel je couchais ; il me l’avait donné neuf et il est devenu vieux par l’usage que j’en ai fait. Donnez à l’évêque Sérapion mon autre peau de brebis ; pour vous, gardez ma tunique de poil. Adieu, mes enfants, Antoine s’en va, et désormais il n’est plus avec vous. Après qu’il eut prononcé ces paroles, les deux disciples l’embrassèrent. Antoine leva ses pieds et regardant comme des amis les anges qui venaient à sa rencontre et dont la présence le comblait de joie, il rendit l’esprit et rejoignit ses pères. Les deux disciples exécutèrent fidèlement l’ordre qu’il leur avait donné, ils l’ensevelirent et l’enfouirent dans la terre ; jusqu’ici personne ne sait où il est caché, excepté ces deux religieux. Quant à ceux qui ont reçu les peaux de brebis qu’il leur avait léguées et son manteau usé, ils conservent ces reliques comme des objets infiniment précieux, car en les regardant, ils croient encore voir Antoine, et quand ils s’en revêtent, il leur semble qu’ils portent sur eux avec joie ses leçons et ses conseils.