Je vous recommande à Dieu et à la parole de sa grâce…
Mes bien-aimés frères, en Jésus-Christ, notre Seigneura,
a – Ce sermon est le sermon d’adieu de M. L. à son départ de Nîmes le 29 sept. 1879. Il n’est pas écrit de sa main, ni d’une main connue de nous. Il fut probablement sténographié pendant qu’il était prononcé. Il a les qualités et même quelques défauts du genre. Mais il nous fait bien connaître le Lelièvre de Nîmes à cette époque et son attachement à son troupeau.
En vous relisant cet admirable adieu de saint Paul aux anciens d’Ephèse, je suis encore plus frappé des différences que des ressemblances qui existent entre la situation où était l’apôtre et celle où je me trouve, — entre l’apôtre lui-même et l’indigne serviteur de Jésus-Christ qui vous parle à cette heure.
Les contrastes abondent en effet : Contraste dans la position extérieure, entre cet apôtre travaillant de ses propres mains pour subvenir à ses besoins, faisant marcher de front le labeur spirituel et le labeur manuel, n’ayant ni famille ni foyer, exposé souvent à la nudité, au froid et à la faim ; et cet autre serviteur de Jésus-Christ, à qui Dieu a épargné ces épreuves, ces privations et cet assujettissement. Le contraste n’est pas moins grand entre la vie spirituelle de ce chrétien éminent, de ce serviteur de Dieu hors ligne, « servant Dieu en toute humilité et avec beaucoup de larmes », pouvant se rendre le témoignage que « sa vie ne lui est point précieuse et qu’il ne se met en peine de rien, pourvu qu’il achève avec joie sa course » ; et le chrétien si faible, si inconséquent, qui a eu le privilège de vous parler de la part du Seigneur depuis dix ans.
Mais le contraste est grand, surtout au point de vue du ministère évangélique, entre cet apôtre qui put se rendre, en toute bonne conscience, et devant ses frères qui avaient été les témoins quotidiens de son travail et de son dévouement, un témoignage comme celui que renferme ces paroles : « Je ne vous ai rien caché… J’ai prêché tant aux Juifs qu’aux Gentils la repentance et la foi en Jésus-Christ… Je proteste aujourd’hui devant vous que je suis net du sang de vous tous… Je n’ai point négligé de vous annoncer tout le conseil de Dieu… Depuis trois ans, je n’ai cessé d’avertir chacun de vous avec larmes… » Ah, je ne sais s’il est un pasteur aujourd’hui qui puisse lire un tel témoignage, rendu par la conscience de l’apôtre à son activité et à son dévouement, sans se prendre la tête entre les mains et sans rougir de honte et d’humiliation. Quel pasteur que celui-là ! et quels pasteurs nous sommes, nous appelés à continuer son œuvre ! Si quelque pasteur peut accepter devant le Seigneur le témoignage que Paul se rendait, ce n’est assurément pas le serviteur de Jésus-Christ qui vous parle à cette heure.
Enfin, le contraste est grand en vue des perspectives d’avenir qu’envisageait l’apôtre. Quelles sombres et douloureuses perspectives sont les siennes ! A mesure qu’il avance vers Jérusalem, il apprend de ville en ville que des liens et des afflictions l’attendent. Au bout de sa carrière il entrevoit, comme terme de son activité pastorale, une prison, — des juges iniques, — et probablement un échafaud. Voilà pour lui ! Et, quant à l’Église, — à ses chères Églises de l’Asie Mineure et de la Grèce qu’il a fondées au prix de ses sueurs, de ses larmes et de ses fatigues, — ce qu’il prévoit pour elles, ce sont « des loups dévorants qui n’épargneront pas le troupeau » ; ce sont « des gens qui annonceront des doctrines pernicieuses afin d’attirer les disciples après eux ». Grâce à la miséricorde de Dieu, aux temps moins agités à certains égards dans lesquels nous vivons, grâce aux fortes et solides barrières qui entourent cette chaire, je n’ai pas cette appréhension. Non, des doctrines pernicieuses ne se feront pas entendre ici ; et cette chapelle, bâtie pour la proclamation du pur Évangile, s’écroulerait plutôt que de donner asile à des doctrines d’erreur et de mensonge. Et, quant à ce qui me concerne, je n’ai pas en perspective un avenir sombre et menaçant comme celui de l’apôtre. En nous quittant, nous n’avons pas, d’un côté ou de l’autre, ces pressentiments qui attristèrent l’âme de saint Paul.
Vous le voyez : le contraste porte sur tous les points ; et cependant il y a plus d’un point de contact entre l’apôtre et celui qui vous parle, et aussi entre une Église du xixe siècle, qui veut être fidèle à Christ et à son Évangile, et ces Églises du premier siècle qui portaient si haut le témoignage du Sauveur. Grâces à Dieu, si indignes que nous soyons, c’est comme serviteur de Jésus-Christ, envoyé du Seigneur, que nous nous sommes levé au milieu de frères et de sœurs pour faire entendre la parole de vérité. Cette parole, nous n’avons pas voulu la rajeunir et la moderniser. C’est l’Évangile dont Paul disait : « Mon évangile », c’est l’Évangile de Paul, de Jésus-Christ, que nous avons voulu vous prêcher : « Nous n’avons voulu savoir autre chose parmi vous que Christ et lui crucifié. » Il nous est donc permis, en une mesure, de nous approprier quelques-unes des paroles de l’apôtre, et vous souffrirez que nous nous appropriions le vœu et la prière qu’il adresse à Dieu pour des fidèles d’Ephèse : « Nous aussi, nous vous recommandons à Dieu… »
Dans cette parole, l’apôtre met toute son affection, toute sa foi, toute son espérance. Dans ce vœu, je retrouve les trois vertus chrétiennes, celles qui excellent toutes les autres : foi, espérance, amour.
C’est essentiellement une parole d’amour que celle-ci. Comme tout ce discours de l’apôtre déborde d’affection ! Comme il nous apparaît ici avec : une nature chaude, expansive, aimante ! Comme il se donne à ceux qui l’aiment ! et quel besoin il éprouve de leur dire qu’il les aime ! Cette nature : si haute, cette intelligence si vaste, ce caractère si énergique, n’ont rien enlevé à toutes les délicatesses, à toutes les grâces d’un cœur aimant. Oh ! comme il devait faire bon appartenir à l’une des Églises qu’un tel pasteur paissait de la vérité évangélique ! A ce point de vue déjà nous nous approprions cette parole et nous vous l’adressons comme une parole d’amour chrétien, d’amour fraternel, d’amour pastoral. Oui, nous nous aimons. Pour nous, la piété n’a rien enlevé aux affections du cœur ; elle n’a pas rétréci notre cœur. En devenant chrétiens, nous ne sommes pas devenus des sortes de stoïciens au cœur et à la volonté endurcis ; nous ne pensons pas que pour mieux aimer Dieu il faille moins aimer nos frères. Au contraire, notre amour s’est épuré au contact de l’amour de Jésus-Christ. Autrefois, nous ne connaissions que les affections intéressées de la famille, les amis ; aujourd’hui, nos affections ont grandi. L’Église de Jésus-Christ. voilà notre famille ! Ceux qui se réclament du nom du Sauveur, voilà nos frères et nos sœurs ! Et à tous ceux-là nous tendons une main cordiale, et nous leur disons : « Vous êtes nos frères, et nous vous aimons pour l’amour du Seigneur. »
Entre le pasteur et ceux qu’il nourrit de la parole de vie, il existe une relation particulièrement affectueuse. N’est-ce pas le pasteur qui s’associe aux épreuves et aux joies de la famille ? N’a-t-il pas une place naturelle en ces moments ? Sa voix n’est-elle pas la bienvenue ? Celui qui a versé avec vous une larme fraternelle, qui vous a adressé une parole de foi et d’espérance, n’est pas le premier venu ; vous lui réserverez dans votre cœur une place spéciale, et vous lui ferez dans vos prières une place spéciale !
Et d’ailleurs nous avons été souvent bénis ensemble, pendant ces dix années. Sur nos assemblées, réunies en ce lieu, bien des fois a passé le souffle de l’Esprit qui vivifie les âmes, qui rapproche les cœurs. Nous avons eu ici ce mouvement de réveil d’il y a quelques années, par lequel nous n’étions qu’un cœur et qu’une âme sous le regard de Dieu. De tels souvenirs ne s’oublient pas ! Quand les affections se sont cimentées au milieu de si grandes bénédictions, elles ne sont pas faites pour disparaître par l’éloignement et s’affaiblir par la distance. Ces bénédictions communes nous ont liés. Il y a dans notre pensée des souvenirs qui nous sont chers et que nous ne perdrons pas de vue dans l’avenir, parce que, pour plusieurs, de ces heures saintes passées sur le Thabor, a daté une vie nouvelle, consacrée au service de Christ et de son Église. Nous nous aimons devant Dieu : c’est l’amour de Dieu qui demeure le ciment de notre affection ; et nous éprouvons que plus cet amour pour le Père Céleste est vif chez nous, plus le sentiment d’amour fraternel qui nous relie les uns aux autres se développe et s’affermit. Comme nous oubliions alors ce qui peut nous séparer sur certains points, les conceptions diverses sur tel point de doctrine et d’organisation ! C’est qu’alors nous étions plus près de Dieu. Rapprochés du centre, nous étions plus près les uns des autres. Si l’Église primitive n’était qu’un cœur et qu’une âme, c’est qu’elle vivait de la vie de l’Esprit. Nous aimant en Dieu, nous nous aimons fortement. Rien ne pourra affaiblir cette affection, parce que notre amour se subordonnera toujours à la volonté de Dieu. Notre amour ne sera qu’une autre forme de l’obéissance.
Nous nous aimons en Dieu, nous nous aimons pour toujours. L’éloignement, la distance peuvent empêcher la communion ordinaire, mais non la communion d’un ordre surnaturel qui existe entre les enfants de Dieu. Nous disons, avec le Symbole des Apôtres : « Je crois à la communion des saints. » Croyons-y plus que jamais, surtout lorsque la distance, l’éloignement semblent mettre, en apparence et extérieurement, un obstacle insurmontable à notre communion. Le Symbole ne dit pas : « Je vois », mais « Je crois ». C’est surtout pour nous un objet de foi. Croyons à cette communion ; réalisons-la en nous donnant rendez-vous au trône de la grâce par la prière. « Je vous recommande à Dieu. Cette prière, que l’apôtre fait pour les frères d’Ephèse, faisons-la les uns pour les autres. Que le pasteur continue de présenter devant le Seigneur le troupeau, et que les membres de ce troupeau continuent à accorder au pasteur une large part dans leurs prières.
Ceci m’amène à vous montrer dans le texte une parole de foi aussi bien que d’amour. L’amour chrétien n’est pas efféminé : il ne se sépare pas de la foi ; et pour l’apôtre la plus affectueuse parole qu’il puisse adresser à ses frères, le témoignage de sympathie et de tendresse qu’il leur envoie est en même temps une affirmation de foi ferme et énergique. La foi de saint Paul est la confiance en Dieu. Le ministère de l’apôtre se termine ; il ne pourra plus communiquer avec les Ephésiens que d’une façon indirecte et insuffisante par ses lettres datées du fond de sa prison. Mais il leur a trouvé un protecteur. Il les place sous la garde du Dieu fort. Ce défenseur prendra soin d’eux désormais. Dieu prendra en main sa cause et le soin des siens. Son serviteur ne sera plus là, mais Lui, il demeure ! Les pasteurs partent et s’en vont : Dieu est, Lui, le pasteur qui ne part pas, — qui ne s’en va jamais ! La personne de saint Paul serait désirable, à vues humaines, pour affermir dans la foi ces chrétiens encore si faibles ; ils pleurent et se lamentent à la pensée que Paul disparaît ; mais l’apôtre leur dit en les quittant : « Je vous laisse le Seigneur ! », et c’est assez ! Ainsi, les disciples de Jésus, s’effrayant de ce que le Maître allait les quitter, reçoivent de lui cette promesse : « Je vous enverrai un autre Consolateur. » Et il ajoute : « Il vous est avantageux que je m’en aille. »
Nous n’osons pas nous comparer, et nous ne le pouvons, ni à Paul, ni à Jésus-Christ. Mais il est permis de dire qu’il n’y a pas d’homme nécessaire, et que Dieu seul est nécessaire à une Église ; et que souvent la disparition d’un pasteur entouré de sympathie et d’affection peut être une bénédiction pour les âmes et les tourner vers le Seigneur, en leur apprenant à s’appuyer moins sur le bras de chair et davantage sur le bras de Dieu. Qui sait si Dieu n’attend pas ce moment pour faire lever la moisson que nous avons appelée de nos prières ? Qui sait si, après tant de semailles, la récolte ne va pas venir, et si elle ne sera pas glorieuse ? si Dieu n’attend pas que l’homme disparaisse pour faire son œuvre à Lui ? C’est ce qui soutient saint Paul. Ce n’est pas de l’optimisme, mais de la foi qui s’appuie sur les promesses de Dieu et sur la puissance de son Évangile… Quelque expérimenté que soit mon successeur… c’est vers le Seigneur que je vous appelle à tourner vos regards. C’est Lui qui veut et qui peut prendre en main les intérêts de son Évangile.
L’apôtre recommande ses frères à Dieu, et il ajoute : « à la Parole de sa grâce ». Dès les premiers temps de l’Église chrétienne, quand l’apôtre a à quitter une Église, c’est sur le ferme fondement de la Parole de Dieu qu’il veut l’établir ; c’est le drapeau de l’Évangile qu’il élève au milieu de cette Église et qu’il plante dans son sein : « Dieu et la parole de sa grâce » ; Dieu et la Révélation écrite et parlée ; Dieu parlant lui-même au sein de son Église par sa Parole : voilà le recours de l apôtre au moment de quitter ses frères. Il s ’en va et Dieu reste ! Dieu reste avec sa Parole ! Et Paul l’appelle : « la parole de la grâce », c’est-à-dire l’Évangile vrai, non falsifié, l’Évangile qui annonce le salut gratuit par Jésus-Christ, la parole qui proclame la déchéance complète de l’homme et son salut non moins complet en Christ. C’est là la parole à laquelle Paul renvoie ses frères.
Ne laissez pas s’affaiblir parmi vous la foi en la Parole de Dieu. La Parole de Dieu reste ! Mieux vaut encore, mieux vaut infiniment la parole de Dieu sans pasteur, que mille pasteurs sans la parole de Dieu. Vous avez cette Parole « utile pour enseigner, instruire, corriger et former dans la foi ». Vous avez cette mine dont vous n’avez encore arraché que quelques rares filons : « Sondez les Écritures, car c’est par elles que vous estimez avoir la vie éternelle. »
La foi de l’apôtre a un but, une tendance ; elle a un objet : c’est l’édification des croyants. Nous vous recommandons à « Celui qui édifie véritablement ». Nous autres, nous bâtissons souvent en mêlant aux pierres précieuses de la Parole du foin et du chaume, des raisonnements humains. Mais Celui, auquel nous vous recommandons, ne fait entrer parmi ses matériaux de construction que l’or pur, et les pierres de prix. Il édifie pour l’Éternité, et ce qu’il a édifié, rien au monde ne l’ébranlera. Le but de l’enseignement chrétien c’est l’édification. Par où il faut entendre non de vagues émotions, mais un progrès spirituel : la sanctification. En parlant d’élever un édifice, nous entendons qu’il s’élève de plus en plus jusqu’au moment où il sera couronné. Il faut que la Parole de Dieu édifie. Toute parole qui n’ajoute pas foi à foi, vie à vie, édification à édification, sanctification à sanctification n’est pas la Parole de Dieu, si elle l’est elle accomplit en nous les effets pour lesquels Dieu l’a donnée. Notre foi, c’est que Dieu se charge de corriger et de compléter l’œuvre commencée, c’est que Dieu sera « le réparateur des brèches ». Combien n’avons-nous pas besoin de cet espoir et de cette consolation, nous qui allons vous quitter, et dont le ministère est resté à une si grande distance de ce qu’il aurait dû être ? « Nous vous recommandons à Dieu. » Dieu achèvera et complétera, corrigera ce que, dans notre faiblesse, nous avons essayé de faire. Allez à Lui, à sa Parole ; et nous avons confiance qu’il ne laissera pas son œuvre inachevée.
Enfin l’accent qui se fait entendre dans cet adieu, l’accent que nous voulons faire entendre aujourd’hui, c’est l’accent et la note de l’espérance. Paul sait ce qui attend l’Église qu’il quitte. Il prévoit pour elle de grandes douleurs, de grandes luttes : « il s’élèvera des docteurs d’erreur et de mensonge ». Il dit à ses frères : « Veillez », mais il croit ! Sa foi en Dieu lui donne confiance dans l’avenir. Il est persuadé que son Église sortira vivifiée et affermie de l’épreuve. L’œuvre du Seigneur ne peut tomber : son Église ne peut périr. Paul s’éloigne : mais l’œuvre de Dieu se continue. Ayons confiance en l’avenir.
Nous sommes constamment tentés de mêler des raisonnements humains à la foi, de faire intervenir dans les choses du Royaume de Dieu le calcul des probabilités. Nous comparons la grandeur des armées ennemies à la petitesse des armées chrétiennes, et nous tremblons, oubliant qu’il plaît à Dieu de se servir des 300 soldats de Gédéon pour mettre en fuite l’immense armée des Madianites. L’avenir est à Dieu ; et Dieu doit demeurer maître et vainqueur !
L’apôtre promet à ses frères que ce Dieu auquel il les confie leur « donnera l’héritage avec tous les saints ». Elevons nos pensées, nos espérances plus haut que les horizons de la terre. Regardons à « cet héritage avec tous les saints ». Nous, avons une « espérance ferme ». Nous sommes « héritiers de Dieu, cohéritiers avec Jésus-Christ ». La vie éternelle c’est « le don de Dieu en Jésus-Christ ». Ici-bas nous préparons cette vie et nous nous préparons à cette vie. Mais Jésus-Christ, en nous quittant, est allé nous préparer ces demeures, nous attendre, et nous y réunira. La vie éternelle ! la vie éternelle ! Bunyan montre le chrétien quittant la ville de corruption, et s’en allant, répondant à tous ceux qu’il rencontre, ce seul mot : la vie éternelle ! la vie éternelle ! Poursuivons notre course « regardant à Jésus », et regardant à la couronne de vie que Jésus nous a lui-même préparée. Les yeux en haut ! les cœurs en haut ! Que telle soit notre devise. « Héritiers de Dieu ! » « Héritage avec tous les saints ! » Voilà ce qui nous attend et ce qui nous console dans toutes les douleurs, dans toutes les séparations de la vie présente. Car cet héritage nous le partageons avec tous les sanctifiés. Dans le sein de Dieu, nous serons réunis pour toujours, à cette seule condition que nous aurons appartenu ici-bas au nombre des saints, des sanctifiés, de ceux qui auront « aimé Jésus-Christ et son avènement », et qui lui auront consacré leurs cœurs et leur vie.
Et maintenant, cette parole de Paul peut se résumer en deux mots, bien humains, et cependant profondément chrétiens, quand on prend la peine d’y faire attention. Ces deux mots, les hommes les échangent entre eux dans leurs relations de tous les jours : Adieu et Au revoir ! Adieu ! Que d’hommes prononcent ce mot qui ne croient pas en Dieu ! Au revoir ! Que d’hommes prononcent ce mot qui ne croient pas au revoir, à la possibilité d’un éternel revoir ! Ces mots, nous les reprenons pour nous, chrétiens ; car ils nous appartiennent. L’un est une note de foi : Adieu ; l’autre, d’espérance : Au revoir ! Ce sont comme des monnaies qui, à force d’avoir servi, ont perdu leur relief et leur brillant. Nous, chrétiens, nous les reprenons et nous les débarrassons de tout ce qui leur a enlevé leur pureté première, nous les déclarons d’or pur : car ce sont des paroles de foi et d’espérance !
Laissez-moi vous les adresser en terminant : A Dieu, — Providence, Père de toutes ses créatures, je vous remets et je vous recommande, pensant qu’il prendra soin de vous, qu’il vous conduira et vous gardera ! A Dieu, le Sauveur, le Rédempteur de vos âmes, Celui qui a donné son sang et mis sa vie en oblation pour vous ; à Dieu je vous remets et je vous confie, pensant qu’il perfectionnera son œuvre jusqu’en la journée de Christ ! A Dieu, « le Consolateur », « l’Esprit qui guide, qui protège, qui régénère et qui sanctifie », je vous remets et je vous confie, persuadé qu’il développera en vous son œuvre, « vous conduira en toute vérité », « vous consolera dans vos afflictions », et vous introduira dans la pure lumière de sa face au grand jour de l’Éternité.
Et j’ajoute cette parole d’espérance à cette parole de foi : Au revoir ! Au revoir sur la terre, si Dieu le veut, dans une des occasions que sa bonne Providence nous préparera ! Au revoir sur la terre, peut-être un jour appelé de nouveau à être votre pasteur ! Au revoir, en tout cas, dans la patrie meilleure, « dans cet héritage des saints » avec tous les saints, avec cette légion d’amis et de frères avec qui nous avons combattu et souffert, nos pères en la foi, nos frères et nos sœurs en Christ, « qui sont arrivés avant nous à la perfection » ! Au revoir, avec eux, dans le sein de Dieu, dans la patrie éternelle que Dieu nous a réservée, et dont, en terminant, je ne saurai mieux faire qu’en vous relisant la description dans la Parole de Dieu, laissant ainsi à cette Parole le dernier mot au milieu de vous. (Apocalypse 21.3-27) :
« Voici le tabernacle de Dieu avec les hommes, et il y habitera avec eux ; ils seront son peuple, et Dieu sera lui-même leur Dieu, et il sera avec eux. Et Dieu essuiera toute larme de leurs yeux, et la mort ne sera plus ; et il n’y aura plus ni deuil, ni cri, ni travail ; car ce qui était auparavant sera passé… Il n’y entrera rien de souillé, ni personne qui s’adonne à l’abomination et au mensonge ; mais ceux-là seuls qui sont écrits dans le livre de vie de l’Agneau. »
Amen.