Sonnets Chrétiens


Livre Premier — Sonnet XXXVI

Sur l’Hiver

O Saison, tout ensemble, et triste, et rigoureuse !
C’est toi qui fais trembler les bergers et les rois ;
Qui prives de verdure et les champs et les bois ;
Et qui rends du soleil la face ténébreuse.

Noire fille du temps, ouvrière orageuse ;
Horreur, qui jour et nuit retiens, durant trois mois,
La nature en syncope, et le monde aux abois ;
Hiver, dont le seul nom fait une image affreuse ;

Exposer à mes sens tes frimas, tes glaçons,
Tes ténèbres, tes eaux, tes rigueurs, tes frissons,
Enfin, tes dures lois, tes assauts, tes tempêtes ;

N’est-ce pas m’exprimer, et la mort, et ses traits ;
Qui, menaçant nos jours, et pendant sur nos têtes,
Font sentir à nos corps leurs funestes effets ?


1 : Dans la Zone Torride, la seule différence des saisons est le temps de la sécheresse, qui y fait l’été, et le temps des pluies, qui y fait l’hiver ; mais un hiver verdoyant et sans froid, et qui n’est que comme un rafraîchissement de la nature. 14 : L’hiver est le temps de l’affliction, du scandale, et de l’amertume. C’est ici notre hiver. Quand sera-ce notre printemps, et notre été ? Lorsque Jésus-Christ, qui est notre vie paraîtra (St. Augustin).

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