Il fallait donc inscrire du moins parmi les factions innocentes et permises une religion à laquelle on ne peut rien reprocher de ce qui rend les autres factions si redoutables. Qu’on les proscrive celles-là, dans l’intérêt des mœurs publiques, pour prévenir les déchirements des partis, pour empêcher que les comices, que le sénat, que vos spectacles ne soient troublés par le choc des rivalités et des cabales, surtout à une époque où l’on vend jusqu’à ses violences, à la bonne heure ! Mais nous, si indifférents pour la gloire du monde, si désintéressés dans ses grandeurs, nous ne savons ce que c’est que former des ligues : nous demeurons toujours étrangers aux affaires publiques. Le monde, voilà notre république à nous. Nous renonçons sans peine à vos spectacles, aussi bien qu’au principe qui les a produits : nous avons en horreur la superstition, qui en est la mère : bien plus, nous nous éloignons avec mépris de tout ce qui s’y passe. Nous n’avons rien de commun avec les extravagances du cirque, avec les obscénités du théâtre, avec les jeux barbares de l’arène, avec la frivolité des gymnases. N’a-t-il pas été permis aux disciples d’Epicure d’imaginer ce qu’il leur a plu ? En quoi vous offensons-nous quand nous adoptons d’autres joies que les vôtres ? Et si nous voulions vous sevrer de tout divertissement, à nous le dommage, il me semble ; vous n’y entrez pour rien. Nous condamnons vos plaisirs, soit ; mais vous goûtez aussi peu les nôtres.