Observations du dr pierotti au sujet du second mur de jérusalem.
Le deuxième mur est ainsi décrit par Josèphe : « Il commençait à la porte qu’on appelait Gennath et qui appartenait à la première muraille ; il environnait seulement le quartier nord de la ville et allait jusqu’à la tour Antonia. » J’ai déjà mentionné l’addition faite à la cité de David et son étendue probable… En conséquence, je n’ai maintenant qu’à donner les raisons qui m’ont conduit à fixer les emplacements et à voir s’ils sont ainsi en harmonie avec le récit de l’historien. Il n’y a que deux points indiqués dans le parcours de la muraille : la porte Gennath, dont nous devons déterminer la position, et la tour Antonia, qui était située à l’angle nord-ouest de la plateforme du Temple (Guerre des Juifs, V, 8) et dont nous pouvons considérer la position comme presque certaine. Je place la porte Gennath (c’est-à-dire des jardins) à l’est de la tour d’Hippicus, dans la partie nord de la première muraille, à la place où j’ai dit avoir trouvé une ancienne arche juive semi-circulaire. Nous pouvons conclure du nom de cette porte qu’elle s’ouvrait sur des terres cultivées et Josèphe parle des jardins situés au nord et au nord-ouest de la ville, qui furent détruits par les troupes de Titus, lorsqu’elles nivelèrent le sol (Guerre des Juifs, III 2). Si l’étang d’Ezéchias est le même que l’étang Amygdalon (des amandes, Guerre des Juifs, XI, 4), nous pouvons en conclure que probablement il y avait des plantations d’amandiers dans le voisinage. Nous devons aussi observer que si le sépulcre de Joseph d’Arimathée était au nord-ouest, il devait y avoir là un jardin (Jean.19.41). Maintenant, comme toutes les portes de Jérusalem dans les anciens temps tiraient leur nom de leur position ou de leur destination, il est très probable que celle-ci était nommée Porte des jardins, parce qu’elle était traversée par la route qui conduisait aux jardins. En fait, en creusant à côté de l’arche sus-mentionnée, j’en ai trouvé les deux montants, qui ont été conservés par l’accumulation de la terre. L’arche, visible à environ cinq pieds au-dessus du sol, est formée de grandes pierres rustiquées, quoique l’ouvrage ait été détérioré par le temps. Elles sont solidement jointes en dedans par des crampons de fer sans mortier, le mortier que j’ai vu n’étant qu’à la surface et ayant été mis par les Arabes lors des réparations. Les deux montants sont construits en maçonnerie semblable, et le rusticage y est très apparent. J’ai découvert que la porte était fondée sur le roc, qu’elle avait dix-huit pieds de haut et huit et demi de large. Elle est enterrée dans un tas de décombres qui, ici comme ailleurs, ont élevé le vrai niveau du sol. Un examen attentif constate que la porte ainsi placée pouvait bien faire partie d’une ligne de défense allant de la tour d’Hippicus au Xystus, non seulement parce que les angles étaient admis dans les systèmes de fortification de ce temps, mais encore parce que Tacite nous dit au sujet de Jérusalem, que « des murailles avec des angles rentrants et des courbes pour prendre les assaillants en flanc, y entouraient deux très hautes collines. » (Hist., Xl.) — N’ayant pu trouver aucun vestige de la muraille dans le voisinage immédiat de la tour d’Hippicus, je supposai en conséquence que la muraille commençait à l’arche. Je cherchai donc les ruines de cette muraille à partir de l’arche dans la direction du nord, mais d’abord sans réussir, quoique j’eusse trouvé à l’est de l’emplacement occupé autrefois par le couvent de Sainte-Marie la Grande, un fragment de construction pouvant remonter à une période ancienne. J’eus ensuite trois occasions de constater que je ne m’étais pas trompé en m’attendant à trouver là quelque part l’évidence requise.
1° En janvier 1857, le poids d’une forte chute de neige renversa une partie du mur d’un bazar mahométan appelé le Bazar des vivres, près du couvent nommé plus haut. Par ordre du gouverneur, je le réparai en 1858 et, en creusant jusqu’au roc pour poser les nouvelles fondations, à une profondeur de dix pieds au-dessous du sol, nous vîmes de grandes pierres, hardiment rustiquées et arrangées d’une manière qui me rappela les ouvrages phéniciens du temps de Salomon. Ce mur a neuf pieds d’épaisseur et consiste en trois rangées de pierres : la première qui repose sur le roc, étant de trois pieds et demi de haut ; la deuxième de deux, et la troisième de deux et demi. Ce fragment prouvait donc, à partir de ce point, un prolongement du mur au nord et au sud.
2° En 1858, la mission russe à Jérusalem obtint à mon instigation un morceau de terrain près de l’église de la Résurrection, à l’est. En 1859, on enleva les décombres accumulés et ce travail mit au jour un coin d’une muraille juive. Les pierres en étaient rustiquées à une profondeur de quatre ou cinq lignes et soigneusement finies. C’étaient les restes d’une restauration du temps des Hérodes faite sur les anciennes fondations du mur de Salomon.
3° En 1860 le drogman du consul français bâtit une maison, près du côté ouest de la porte Judiciaire et en creusant pour trouver le roc, il trouva à une profondeur de 18 pieds au-dessous du sol, un fragment de mur, ressemblant à tous égards à celui qui a été décrit en premier lieu.
D’après ces trois points je pus déterminer la direction du côté ouest du mur. Il restait à rechercher le côté nord, vers la porte de Damas, et une occasion ne tarda pas à se présenter, lorsque l’Archimandrite grec Bisarion répara et consolida une maison, qui est maintenant provisoirement occupée par le consulat russe. Je creusai en quelques endroits pour en examiner les fondations, mais je ne découvris aucun reste d’antiquité. Je pris des informations auprès de tous ceux qui dans les années précédentes avaient construit dans le voisinage et je n’appris jamais qu’une ruine juive eût été trouvée. J’en conclus que le mur devait, à la porte Judiciaire, tourner court vers l’est et ainsi, en faisant face au nord, se diriger vers la tour Antonia. La présence de très grosses pierres, évidemment d’ouvrage juif, dans les murs des maisons (surtout dans les parties les plus basses) situées dans cette direction, confirme cette idée. Quelques-unes de ces pierres furent trouvées lorsque l’Effendi Kadduti répara et reconstruisit en partie sa maison dans la Via dolorosa, à la station de Ste-Véronique. D’autres furent découvertes par le Mufti, lorsqu’il consolida sa maison, à la station de Simon le Cyrénéen ; d’autres, par Effendi Soliman Giari, vis-à-vis de la maison du Mufti, au nord ; d’autres encore, lorsque le moine catholique arménien me demanda d’examiner et de niveler un morceau de terrain qu’il venait, comme représentant de sa nation, d’acheter à la station de la première chute de Christ. Dans la partie la plus basse du mur qui entourait ce terrain, se trouvaient au nord de très grandes pierres et une ancienne porte. On découvrit encore de ces pierres, soit en posant les fondements de l’Hospice autrichien en 1857, au nord de la propriété arménienne, soit plus à l’est dans le nouveau couvent des Filles de Sion. Je conclus de tous ces faits que le tracé du second mur passait dans cette direction. Je peux aussi faire remarquer que le texte grec de Josèphe établit que le mur « montait vers la tour Antonia », et nous pouvons encore voir, d’après la configuration du terrain, qu’après avoir traversé le Tyropœon, il devait monter vers la tour. L’assertion que le deuxième mur environnait seulement le quartier nord de la ville, est vraie, parce qu’au temps de Josèphe, le mur d’Ezéchias devait être debout et être considéré en conséquence comme faisant partie de la seconde enceinte. Je supposais une fois que la porte Gennath était près de la tour d’Hippicus à l’est, et qu’en conséquence, le second mur allait rejoindre la tour Antonia en faisant des zigzags ; mais, comme il a été dit plus haut, je n’en ai trouvé aucune trace très près de la tour d’Hippicus, et je pense que si la porte de Gennath avait été rapprochée de cette tour, l’historien l’aurait mentionné. (Jerusalem explored, I, p. 31 et suivantes.)