En ceci encore la conception biblique se rencontre avec les postulats de la science naturelle, selon lesquels il ne saurait y avoir d’anéantissement des atomes existants, mais seulement des combinaisons nouvelles de ces atomes. Aucune molécule ne sera perdue dans le bouleversement final de la nature, et l’univers ancien ne finira que pour faire place à un plus beau.
Note ThéoTEX : Les conceptions de Gretillat sur la matière sont elles-mêmes rapidement devenues caduques, puisque la science du 20e siècle a complètement réfuté son affirmation de la pérennité des atomes. Ce qui reste de peut-être juste dans son idée, c’est la supposition d’un lien entre la nouvelle création et l’ancienne, de façon analogue à celui qui existera entre notre nouveau corps de résurrection et l’ancien.
Cette troisième création comme la destruction qui l’aura précédée, est également annoncée dans la prophétie de l’A. T. : Ésaïe 65.17 ; 66.22, et dans le N. T. : Apocalypse 21.5 ; 2 Pi.3.13e. Ce nouvel univers sera la création de Christ comme les deux premières, ainsi que lui-même l’annonce : ἰδού καινὰ ποιῶ πάντα (Apocalypse 21.5 ; cf. Jean 14.2).
e – Nous ne faisons plus intervenir ici les passages qui annoncent une παλιγγενεία (Matthieu 19.28), une ἀποκατάσις (Actes 3.21). une rédemption de la nature (Romains 8.18-23). parce que nous rapportons tous ces textes à rétablissement du règne de Christ sur la terre.
Comme l’univers actuel, il se décomposera en parties distinctes, appelées cieux et terre, mais réunies sous la même loi d’harmonie, et composées sans doute d’éléments conformes à la nature glorifiée de ses habitants, mais dont nous ne permettrons pas d’énumérer, à l’exemple de quelques théologiens allemands, ni de préciser les propriétésf ; et nous nous contentons d’attendre avec l’auteur de 2 Pierre « des cieux nouveaux et une terre nouvelle où la justice habitera » (v. 13.)
f – C’est ainsi que Dorner déclare que sans perdre sa substantialité, la matière échangera son opacité, sa dureté, sa pesanteur, son inertie contre la clarté, l’éclat, l’élasticité et la transparence. Frank refuse à la nature renouvelée « die Stofflichkeit ». (Voir Kliefoth, ibid., page 298.) N’est-ce pas là s’exposer a déraisonner en s’ingérant dans des choses que l’on n’a pas vues et que, faute de termes de comparaison, l’homme ne peut même concevoir.
En même temps que le ciel, sera créé l’enfer, distingué déjà par les Juifs du Scheol ou de l’Adès sous le nom de géhenneg, γέενα (Matthieu 5.22,29 ; 10.28), appelé aussi par Jésus : τὸ πῦρ αἰώνιον (Matthieu 25.41) ; τὸ σκότος τὸ ἐξώτερον (Matthieu 25.30) ; et par Jean : ἡ λίμνη τοῦ πυρός (Apocalypse 20.14 ; 21.8). C’est dans ce dernier séjour que le prophète, personnifiant l’Adès et la mort, nous les a représentés jetés ensemble, pour signifier sans doute que le séjour provisoire des méchants aura disparu devant le séjour définitif, et que la mort des injustes comme des justes aura été vaincue par la résurrection.
g – Etymologie : Gei Hinnom (Josué 15.8), vallée de Hinnom, souillée sous Manassé par des sacrifices abominables, puis vouée par Josias à l’interdit.
De tous les passages que nous venons de citer, il résulte que le ciel comme l’enfer futurs seront des lieux et non seulement des états, habités non par des âmes seulement, mais par des corps, instruments de félicité comme de damnation (Matthieu 10.28).
Cette troisième création de Christ sera le couronnement de l’œuvre de médiation qu’il avait ouverte par la première, et dont la raison d’être cessera par l’entrée de tous les élus dans la communion immédiate de Dieu (1 Corinthiens 15.28).
Nous constatons, en renonçant à le combler, le fossé qui sépare nos conceptions eschatologiques, entre autres, encore toutes chargées de « fécule hébraïque », des vues exposées par M. Sabatier dans sa leçon d’ouverture sur « La vie intime des dogmes et leur puissance d’évolution » (1889).
« Cette cosmographie d’autrefois n’est pas moins inhérente au dogme de la parousie de Christ et à tout le scénario de l’eschatologie messianique, tel qu’on le trouve, par exemple, dans les derniers discours de Jésus et dans l’apocalypse. Ce sont encore là des représentations que nous ne pouvons plus guère prendre que comme des symboles. Il ne nous est pas moins difficile de réaliser géographiquement l’enfer et le paradis » (page 35).
Le tort de M. Sabatier nous paraît être ici de nous présenter une opinion individuelle comme le résultat inévitable d’une évolution à laquelle aucun esprit éclairé ne saurait résister. Lui qui, sauf erreur, a entendu Beck, il doit se souvenir de l’accent de sainte indignation avec lequel le maître de Tubingue interpellait les théologiens qui ne savent répondre aux promesses bibliques que : Bild, Bild !