Mon Dieu, que le péché est pénible à porter ! quelle tristesse il répand sur la vie, quelle amertume sur le cœur ; comme il pèse sur la conscience ! Je sens qu’il n’y aura ni paix, ni bonheur pour moi, aussi longtemps que je n’aurai pas résolument secoué son joug intolérable ! Oh ! Seigneur, ce n’est pas là vivre, c’est végéter, c’est croupir ! En vain je redresse par moment la tête ; en vain je me soulève parfois sur mes genoux ; aussi longtemps que je ne sortirai pas complètement de cette fange, j’y retomberai toujours. J’y ternirai mes mains et mon front, aussi longtemps qu’y resteront mes pieds. Oui, Seigneur, c’est une sainteté parfaite qu’il me faut pour être heureux, c’est elle que je souhaite par moment, et en particulier à cette heure ; mais, hélas ! c’est aussi cette complète sainteté que je me sens radicalement incapable d’acquérir. Chaque fois que je mets la main à l’œuvre, je suis attristé par la vue de mes tentatives toujours échouées ; dès que je prends une bonne résolution, je suis plus que jamais frappé de mon impuissance pour l’accomplir. Il semble que mes essais eux-mêmes n’aient eu pour résultat que de mieux constater mon insuffisance. Oui, Seigneur, mes efforts sont, par toi, destinés à produire en moi l’humilité ; et l’humilité la prière ; et la prière ton secours. Donne-le moi donc, Seigneur, ce secours, seul efficace, et qu’enfin je sorte de cet océan de péchés ; qu’enfin je sois heureux en toi, et que, je mette toute mon ambition à vivre dans une parfaite sainteté.
Hélas !, Seigneur, je n’ose pas terminer cette prière, effrayé que je suis par mon expérience du passé. Peut-être n’aurai-je pas plutôt dit amen que mon esprit vagabond ira courir le monde, mon pied léger, ma main trop prompte, tomber sur le péché. Pour ne plus pécher, il me faudrait passer ma vie en prière ! Seigneur, aie compassion de moi, qu’il n’en soit plus ainsi, encore une fois, donne-moi ton secours, contrains-moi de le recevoir, et qu’à dater de ce jour commence en moi véritablement une vie conforme à ta volonté.