Une autre expression qui sert aussi à désigner la présence de Dieu au milieu de son peuple, c’est la face de Jéhovah (פנים). Le passage essentiel à cet égard est Exode 33.14 et sq. Au commencement de ce chapitre, Jéhovah avait déclaré qu’il ne voulait plus monter en personne au milieu de ce peuple de col roide, mais que désormais il le donnerait à conduire à un ange, et même à un ange inférieur. Mais, au v. 14, Il se laisse fléchir par les supplications de Moïse et il dit : Ma face ira ! — Que faut-il entendre par là ? D’après Exode 34.9, la face c’est Dieu, et pourtant la face de Dieu n’est pas Dieu en soi-même. Effectivement, en soi-même Dieu n’a point de forme (§ 46), tandis que, d’après Exode 33.20, la face de Dieu n’est pas invisible (Genèse 32.30). Cette vue est mortelle pour les humains ; mais en soi la face de Dieu peut être vue. Si, d’une part, on ne peut voir la face de Dieu sans mourir, et que, d’autre part cependant, Moïse parle à Dieu face à face (Exode 33.11), bouche à bouche (Nombres 12.8) ; qu’il voie la ressemblance de Dieu (Ibid.) ; qu’il voie Dieu d’œil à œil (Nombres 14.14) ; — il semble qu’il y a là une contradiction. Mais la contradiction n’est qu’apparente. Il faut donner un sens relatif à ces diverses expressions ; d’après Exode 33.23, Moïse ne voit jamais que le reflet de Dieu. La face de Dieu n’est donc point Dieu en lui-même, cet Etre infini, souverainement élevé au-dessus du monde ; c’est Dieu s’abaissant dans la sphère des choses créées, et se présentant aux hommes de telle sorte qu’ils puissent éprouver sa présence immédiate.
L’examen de quelques autres passages va confirmer le résultat auquel nous venons d’arriver.
« Jéhovah t’a retiré d’Egypte par sa face, par sa grande puissance. » (Deutéronome 4.37).
« L’Ange de sa face les a délivrés » (Ésaïe 63.9). Ainsi l’ange par lequel Dieu délivre son peuple, l’ange dans lequel d’après Exode 33.21, habite le nom de l’Éternel, s’appelle aussi l’ange de la face. De même ce que Osée 12.4, présente comme une apparition divine, et, v. 5, comme l’apparition d’un ange, la Genèse le présente comme une apparition de la face de Dieu (Genèse 32.30).
« Jéhovah fasse luire sa face sur toi et te fasse grâce ! Jéhovah tourne sa face vers toi et te donne la paix ! » (Nombres 6.25). « Et c’est ainsi, ajoute Jéhovah au v. 27, que les grands prêtres invoqueront mon nom sur les enfants d’Israël. » Ici non plus il ne s’agit pas de quelque chose de purement symbolique ; les enfants d’Israël éprouveront d’une manière réelle que Dieu habite au milieu d’eux et qu’il est là, toujours prêt à les secourir.
Au contraire, d’après Psaumes 21.10, il suffit que l’Éternel montre sa face, pour que ses ennemis soient consumés. Quand Dieu voile sa face, cela indique qu’il se retire, et qu’il cesse de protéger et de bénir.
Dans Psaumes 139.7, les mots : « Où fuirai-je loin de ta face ? » répondent à ceux qui précèdent immédiatement : « Où fuirai-je loin de ton Esprit » L’Esprit de Dieu, dont tout l’univers est pénétré, fait que Dieu est personnellement présent partout. Ce passage est remarquable en ce qu’il étend les limites de la Toute-présence de Dieu bien au-delà de celles de la théocratie.
La gloire de l’Éternel, telle est une troisième expression qui remplace quelquefois les deux précédentes. Dans Exode 33.17 et sq., la gloire alterne avec la face de Dieu. Dans Exode 24.16, c’est la gloire de l’Éternel qui apparaît sur le mont Sinaï sous le voile de la nuée. Dans Exode 40.34, c’est la gloire de l’Éternel qui habite dans le Tabernacle. 1 Rois ch. 8 est particulièrement instructif à cet égard. La terre ni les cieux des cieux ne peuvent contenir Dieu, v. 27, — mais sa gloire, v. 11, remplit le sanctuaire, et au v. 29, au lieu de la gloire, il est parlé du nom de Dieu.