En présentant sans cesse la mort et la résurrection qui allaient terminer sa vie terrestre comme l’accomplissement des Ecritures de l’A. T., et en terminant sa vie par le cri : Tout est accompli ! en déclarant à réitérées fois qu’il était venu pour guérir et sauver le monde, et qu’il ne reviendrait que pour le juger ; en instituant avant de quitter la terre les deux sacrements de la Nouvelle alliance ; en commandant à ses disciples de célébrer la sainte cène, en commémoration de sa mort propitiatoire jusqu’à son retour (1 Corinthiens 11.23-26), et d’administrer le baptême au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit à toutes les nations ; en annonçant l’effusion imminente de son Esprit comme la conséquence immédiate de son activité terrestre et le premier acte de son existence glorifiée, Jésus a suffisamment déclaré que l’œuvre de la propitiation et de la régénération de l’humanité était tout entière renfermée dans sa personne et dans son œuvre historique, et qu’entre sa première venue et son retour, entre la mort, la résurrection, l’ascension de Jésus-Christ, la descente du Saint-Esprit et la résurrection finale, il ne se produirait plus de nouveaux faits rédempteurs.
Cette même affirmation est renfermée dans la parole prononcée par les Anges le jour de l’ascension, et qui, à tout le moins, exprime la conviction de l’historien : « Ce Jésus que vous venez de voir remonter au ciel, en reviendra de la même manière que vous l’y avez vu monter » (Actes 1.11).
La croyance à la proximité du retour du Seigneur, générale dans l’Eglise primitive et commune aux apôtres et aux simples fidèles, atteste, par l’élément même d’erreur qui a pu s’y mêler, la conviction, générale aussi, de la pleine suffisance et de l’imperfectibilité de l’œuvre de rédemption qui venait d’être accomplie par Christ sur la terre. « Les derniers temps sont venus », répètent à l’envi Pierre, dès le jour de la Pentecôte (Actes 2.17 et sq.), Paul, Pierre et Jean en écrivant aux Eglises (1 Corinthiens 7.29 ; 10.11 ; 1 Pierre 4.7 ; 1 Jean 2.18) ; et les causes de retard survenant dans l’exaucement de cet universel soupir de l’Eglise et de l’Esprit (Apocalypse 22.17) devront donc être recherchées non pas en Dieu ni dans l’œuvre divine qui, elle, est « toute prête » (Luc 14.17), mais dans le défaut de maturation soit de la rébellion dans le monde (2 Thessaloniciens 2), soit de la foi dans l’Eglise (Luc 18.7-8).
Saint Paul de même résume l’œuvre de la rédemption considérée dans ses éléments constitutifs et dès maintenant suffisants pour procurer à tout pécheur la certitude de la réconciliation avec Dieu et de la félicité éternelle, dans les actes salutaires qui venaient de s’accomplir : la mort, la résurrection et l’ascension de Jésus-Christ (Romains 8.34 ; Philippiens 2.8-9), et dans leurs effets passés et futurs, mais tous d’ores et déjà assurés par l’œuvre accomplie (1 Corinthiens 1.30 : ἐγενήθη) : sagesse, justification, sanctification et rédemption. Il félicite les Corinthiens de ce qu’il ne leur manque aucun don en attendant la révélation de Jésus-Christ (v. 7).
Les deux principaux des Douze s’accordent avec Paul pour déclarer que le salut, si longtemps attendu et préparé, est des maintenant fait (1 Pierre 1.12), et parfait (1 Jean 1.4). Et l’Apocalypse confirme à sa manière cette intuition commune à l’âge apostolique tout entier en rattachant le salut et la réjection à l’attitude des uns et des autres à l’égard de « l’Agneau immolé » (Apocalypse 5.6-10 ; 7.10-17 ; 13.8 ; 17.14).