Voilà ce que nous avions à dire sur les prophéties qui ont prédit le Messie que nous reconnaissons ; il faut maintenant écouter ce que l’incrédulité oppose ou peut opposer à ces preuves.
1° Elle désirera peut-être d’abord un plus grand nombre d’oracles qui rendent témoignage au Seigneur Jésus ; mais qu’elle considère qu’il n’y a point de prophète, ni presque de chapitre dans les révélations de chaque prophète, qui n’enferme quelques traits qui regardent le Messie.
2° Que si elle veut des prophéties plus particularisées, qu’elle considère que la personne ne pouvait être mieux caractérisée, ni les événements plus circonstanciés. Jésus-Christ est appelé Schilo, le Christ, un libérateur, un grand personnage qui doit venir dans la seconde maison, et en faire la gloire ; le Fils de Dieu, un roi éternel, un sacrificateur selon l’ordre de Melchisédech, le Seigneur, le Dieu, le Sauveur de toute la terre, le saint de Dieu, le berger, le conducteur, le serviteur de Dieu, son élu, celui en qui Dieu prend son bon plaisir, le Fils de l’Homme qui vient sur les nuées du ciel, et en même temps un ver, et non point un homme, l’opprobre des hommes, un homme de douleur, et sachant ce que c’est que la langueur ; un agneau, une victime pour le péché. Pour les événements, ils sont si circonstanciés, que celui qui lit les seules révélations d’Esaïe, croit voir un cinquième Évangile.
3° Peut-être vous défiez-vous de ce que les caractères du Messie, ou les circonstances de ces événements, sont recueillies de divers passages séparés et détachés les uns des autres ; mais, outre que nous avons déjà fait voir que dans ces passages d’où nous les recueillons il s’agit du Messie, la sagesse de Dieu a pourvu à ce qu’on ne pût nous faire de reproche à cet égard, et que nous ne puissions rien désirer pour la conviction des incrédules. Car qu’y a-t-il de plus circonstancié que les oracles de Daniel ? Et qui ne voit que le chapitre 53 d’Esaïe contient l’abaissement de Jésus-Christ, son opprobre, ses souffrances, sa mort, son sacrifice, sa sépulture, sa résurrection, son ascension, avec la propitiation de nos péchés, et le salut des hommes, sans que, par aucune subtilité, on puisse s’empêcher de reconnaître que tous ces caractères si différents, et apparemment opposés, servent à marquer une seule et même personne ?
4° Vous désireriez peut-être que ces caractères qui marquent le Messie, fussent plus éclatants et plus remarquables. Mais était-il possible d’en assigner qui le fussent plus que le changement de l’alliance, la ruine des quatre monarchies qui avaient opprimé le peuple de Dieu, la conversion des gentils, la désolation de Jérusalem et du sanctuaire qui devait s’ensuivre, l’éloignement du sceptre et du législateur de Juda, la confusion des lignées, et la perte de leur liberté, l’établissement d’un empire qui renfermerait toute nation, tribu et langue ; la venue d’un peuple de saints qui devaient peupler toute la terre, la connaissance de Dieu remplissant la terre, les dons du Saint-Esprit se répandant sur toute chair, suivant la prophétie de Joël, c’est-à-dire sans égard au peuple juif plutôt qu’aux autres ?
5° Mais, direz-vous, pourquoi Dieu n’a-t-il point marqué ces événements avec tant de clarté et de précision, qu’il ait été absolument impossible de les révoquer en doute ? Je réponds qu’il ne faut point que les prophéties soient conçues avec tant de clarté, qu’elles donnent lieu aux hommes d’éviter ou de changer l’événement. Marquez le moment de la naissance de Jésus-Christ, vous donnez à Hérode plus de facilité d’exécuter son mauvais dessein. Caractérisez la personne du Messie d’une sorte qu’il ne puisse s’y méprendre ; dites qu’il est le fils de Marie mariée à un charpentier nommé Joseph, et qu’il repose à une telle heure dans une crèche et dans une telle maison à Bethléem, mais que dans un tel temps il doit être porté en Egypte, vous donnez plus de facilité a Hérode d’assouvir sa cruelle ambition, ou vous mettez la sagesse de Dieu dans la nécessité d’inventer d’autres moyens pour sauver son Fils, que ceux qu’elle avait résolus, ou que les prophètes avaient déjà prédits et déterminés. Ce rayon de lumière qui naît de l’histoire de l’Évangile, nous fait voir combien il est nécessaire que les prophéties soient couvertes de quelque voile avant que d’être accomplies. Que serait-ce si nous pénétrions dans le conseil de Dieu, et que nous vissions à fond les desseins de sa sagesse ?
6° On objectera peut-être que les oracles qui marquent la venue et le règne du Messie, parlent de cet événement comme devant faire la gloire du peuple d’Israël, et l’esclavage des nations qui seront assujetties au peuple juif. Cela est faux ; la venue du Messie est marquée comme le bien des Juifs et des gentils ; car il est dit que ces deux peuples n’en feront plus qu’un. La conversion des gentils est même marquée comme un plus grand événement que le rétablissement des Juifs. Voici comment Esaïe fait parler le Sauveur qui devait venir. Dont il m’a dit : C’est peu que tu me sois serviteur pour rétablir les tribus de Jacob, et pour restaurer les désolations d’Israël ; et pourtant je t’ai donné pour lumière aux nations, afin que tu sois mon salut jusqu’aux bouts de la terre.
7° Mais d’où vient que les prophètes préparent les Juifs à tant de gloire et de magnificence de la part du Messie, puisque à la venue du Messie ils devaient être rejetés de l’alliance ? On répond que c’est à l’Israël selon l’esprit, et non point à l’Israël selon la chair, que le Saint-Esprit avait fait toutes ces promesses. Or, l’Israël selon l’esprit est composé de tous ceux qui sont les enfants d’Abraham par la foi, soit qu’ils tirent leur naissance de ce patriarche, soit qu’ils la tirent de quelque autre. En effet, voici comment Dieu unit les deux peuples dans les promesses qu’il leur adresse. Pour certain l’Éternel consolera Sion ; il consolera toutes ses désolations, et rendra son désert semblable à Heden, et ses landes au jardin de l’Éternel ; joie et allégresse sera trouvée en elle, et voix de mélodie. Soyez donc attentif à moi, mon peuple, et me prêtez l’oreille, ma nation ; car la loi sortira de moi, et j’établirai mon jugement pour être lumière aux peuples. Ma justice est près, mon salut est venu en avant, et mes bras jugeront les peuples ; et les îles s’attendront à moi, et leur attente sera en mon bras.
Voilà comment les deux peuples doivent s’attendre à ce grand salut. Mais qui sont donc ceux qui sont si souvent menacés dans les oracles des prophètes ? Ce sont les méchants, ceux d’entre les Juifs et les gentils qui seront rebelles et incrédules. Remarquez donc que les prophètes réunissent les bons de l’un et de l’autre peuple, qui doivent être éclairés par le Messie, et leur adressent les mêmes promesses, les égalant en toutes choses, les déclarant les enfants de la promesse, et leur donnant le nom de peuple de Dieu, d’Israël, de Jacob, de Juda ; et qu’ils réunissent aussi les méchants qui doivent se trouver au milieu des deux peuples, et leur dénoncent les jugements de Dieu, et les nomment les uns et les autres du nom des nations les plus détestées, comme de celui d’Edom, d’Assur, d’Egypte, etc.
C’est une vérité qui paraît assez dans ces paroles, qui suivent celles que nous venons de citer. Elevez vos yeux vers le ciel, et regardez en bas vers la terre ; car les deux s’en iront à néant comme de la fumée, et la terre sera usée comme un vêtement, et ses habitants mourront pareillement : mais mon salut demeure à toujours, et ma justice ne sera point anéantie. Ecoutez-moi, vous qui savez ce que c’est que la justice : Peuple, au cœur duquel est ma loi, ne craignez point l’opprobre des hommes, et ne soyez point éperdus par leurs reproches ; car la teigne les rongera comme un vêtement, etc., mais ma justice demeurera à toujours, et mon salut par tous âges.
Il est impossible de ne point penser à cette réunion des fidèles des deux peuples, lorsqu’on lit ce que Dieu dit au chapitre 66 des révélations d’Esaïe : Mais quant à moi, voyant leurs œuvres et leurs pensées, le temps vient d’assembler toutes nations et langues ; ils viendront et verront ma gloire.
Mais on ne peut s’empêcher de reconnaître aussi que ce même prophète sépare les méchants qui doivent se trouver parmi les deux peuples, et qu’il en fait un corps auquel il dénonce ses jugements, lorsqu’on l’entend parler ainsi : Mais vous, déserteurs de l’Éternel, qui oubliez la montagne de ma sainteté, qui dressez la table à l’armée des cieux, et fournissez l’aspersion à autant qu’on en peut compter, je vous compterai aussi avec l’épée, et vous serez tous égorgés, parce que vous avez parlé, et je ne vous ai point répondu. J’ai parlé, et vous n’avez point écouté ; mais vous avez fait ce qui me déplaît, et vous avez choisi les choses auxquelles je n’ai point pris plaisir. Pourtant, ainsi a dit le Seigneur, l’Éternel, voici mes serviteurs mangeront, et vous aurez faim ; voici mes serviteurs boiront, et vous aurez soif ; voici mes serviteurs se réjouiront, et vous serez honteux ; voici mes serviteurs se réjouiront avec chant de triomphe de la joie qu’ils auront au cœur, mais vous crierez de la douleur que vous aurez au cœur, et hurlerez pour la froissure de votre esprit, et laisserez votre nom à mes élus pour s’en servir aux exécrations ; et le Seigneur l’Éternel te fera mourir, mais il appellera ses serviteurs d’un autre nom. Celui qui bénira en la terre, sera béni au Dieu de vérité ; et celui qui jugera en la terre, jugera par le Dieu de vérité, etc. Car voici je m’en vais créer de nouveaux cieux et une nouvelle terre, et les choses précédentes ne seront plus rementuesa, et ne reviendront plus au cœur ; mais plutôt vous vous réjouirez et vous égaierez à toujours en ce que je m’en vais créer Jérusalem pour n’être que joie, et son peuple pour n’être qu’allégresse, etc.
a – Participe passé de l’ancien verbe rementevoir ou rementiver : on ne s’en rappellera plus.
Il n’y a sans doute rien de plus convaincant que ces paroles contre la prétention de ceux qui s’imaginent que tout Israélite, bon ou méchant, aura part au siècle à venir, comme ils parlent ; car il paraît que Dieu sépare ceux qu’il appelle ses serviteurs, ses élus, de ces méchants Juifs qu’il a déjà nommés des déserteurs de l’Éternel, qui ont oublié la montagne de sa sainteté ; et comme il unit d’ailleurs les nations qui doivent se convertir, et dont le Messie doit être l’alliance, la lumière et le salut à ses justes qui sont parmi les Juifs, qu’il, leur promet même gloire, mêmes avantages, et qu’il en fait un même corps, il s’ensuit que la distinction de l’Israël selon la chair, d’avec l’Israël selon l’esprit, qui n’est que la séparation des Juifs fidèles et des gentils convertis, faisant un même corps, d’avec les Juifs impénitents et les gentils rebelles et incrédules qui en doivent faire un autre, n’est point de notre invention, mais qu’elle est du prophète Esaïe.
Il y a donc un peuple au milieu du peuple, un Israël au milieu d’Israël ; et l’on peut dire que tous ceux qui sont de la race d’Abraham ne sont point compris au nombre des enfants d’Abraham.
Or, ce fondement établi nous sert à répondre à toutes les difficultés que les Juifs font naître sur ce sujet. Car si l’on objecte que le Messie doit ramener les Juifs à Jérusalem ; que depuis une nouvelle lune jusqu’à l’autre, et depuis un sabbat jusqu’à l’autre, toute chair doit venir et se prosterner devant la face de Dieu, etc., on répond, premièrement, que cette espèce d’oracle ne peut point se prendre dans un sens littéral, étant assez évident que toute chair ne peut point venir à Jérusalem de sabbat en sabbat, ou, comme il est dit ailleurs, que toutes les nations de la terre ne peuvent point aborder à la montagne de Sion. Je dis bien davantage ; et je soutiens que l’accomplissement de cette prophétie serait impossible, quand même elle serait limitée aux Juifs ; car, puisqu’il s’agit là du règne glorieux du Messie, et qu’on prétend que tous les Juifs doivent avoir la gloire de ce règne, et avoir part à la félicité de ce siècle après la résurrection, comment conçoit-on que toute la multitude des Juifs qui seront morts, et de ceux qui vivront encore, puisse aborder à une ville, ou à une montagne proprement dite ?
On répond, en second lieu, que cet oracle doit être entendu de sorte que les biens qu’il promet ne soient point promis aux méchants, mais seulement aux justes, et que par conséquent il ne s’agit point là d’assembler tous les Israélites, tant bons que mauvais, pour aller à la montagne de Sion ; mais qu’il doit être entendu de sorte que les biens qu’il promet soient promis aux fidèles et aux élus de Dieu, pris tant de Juifs que des gentils, puisque toute l’Écriture nous enseigne que Dieu se fera connaître alors aux uns et aux autres, et qu’ainsi il s’agit ici d’une montagne qui répond à toutes les nations, et non d’une montagne où une seule nation va adorer ; d’une Sion céleste qui peut recevoir les élus de Dieu qui viendront des quatre bouts de la terre, et non pas d’une Sion terrestre, et proprement dite, qui ne saurait pas même contenir la postérité charnelle d’Abraham.
Il ne servirait de rien de dire que les méchants seront parmi les gentils, mais qu’il n’y en aura point parmi les Juifs, puisque les rabbins reconnaissent eux-mêmes que le siècle de la venue du Messie sera un siècle de corruption et de débordement, et que le prophète suppose évidemment qu’il y aura en Israël des méchants qui seront punis, lorsqu’il dit, en s’adressant aux déserteurs de l’Éternel, et à ceux qui ont oublié la montagne de sa sainteté, ce qui ne peut convenir qu’à ceux qui avaient connu l’Éternel en cette montagne : Voici mes serviteurs se réjouiront avec chant de triomphe de la joie qu’ils auront au cœur, mais vous crierez de la douleur que vous aurez au cœur, et hurlerez pour la froissure de votre esprit ; prophétie où il s’agit évidemment du règne du Messie, ce qui paraît par ces paroles qui suivent : Voici je m’en vais créer nouveaux cieux et nouvelle terre.
8° Mais, direz-vous, si le dessein de Dieu avait été qu’on se servit de cette double clef, d’Israël selon la chair, et d’Israël selon l’esprit, et de sens figuré et de sens littéral, ne nous l’aurait-il point dit ? ne l’aurait-il point marqué dans les oracles des prophètes ? Je réponds qu’il l’a assez dit, et qu’il l’a assez marqué pour ceux qui ne s’aveuglent point volontairement eux-mêmes.
Quand même la distinction de l’Israël selon la chair, et de l’Israël selon l’esprit, aurait quelque chose de nouveau à l’égard de l’expression, il est toujours certain qu’elle n’est point nouvelle à l’égard de la chose ; puisque ce que nous appelons l’Israël selon l’esprit, n’est que le corps des justes ou des fidèles, tant Juifs que gentils, dont le Messie devait être le salut et la lumière, et qui sont si expressément séparés des méchants, et même des méchants Israélites, dans les oracles que nous avons rapportés.
Et pour le sens figuré, la sagesse de Dieu a pourvu à ce qu’il nous fût facile de le discerner d’avec le sens littéral : les paroles mêmes le découvrent assez souvent, ou la suite du discours le donne à connaître, ou la force du sens le met au jour ; et quoi qu’il en soit, l’événement, qui est le plus juste et le plus facile commentaire des prophéties, le met en évidence.
On n’a pas beaucoup de peine à deviner qu’il y a une figure dans ces paroles : Réjouissez-vous avec Jérusalem, et vous égayez, vous tous qui l’aimez, etc., afin que vous tétiez, et que vous soyez rassasiés des mamelles de ses consolations ; afin que vous suciez, et que vous jouissiez à plaisir de toutes les sortes de sa gloire. Car ainsi à dit l’Éternel : Voici je m’en vais faire découler vers elle la paix comme un fleuve, et la gloire des nations comme un torrent débordé ; et vous téterez, et serez portés sur les côtés, et on vous fera jouer sur les genoux. Cette figure est si évidente, qu’il est impossible d’y être trompé.
La suite du discours ne nous permet point de douter que ces paroles du chapitre 9 d’Esaïe ne soient figurées : Le loup habitera avec l’agneau, et le léopard gîtera avec le chevreau ; le veau et le lionceau, et autre bétail qu’on engraisse, seront ensemble, et un petit enfant les conduira : la jeune vache paîtra avec l’ours, etc. L’enfant qui tète s’ébattra sur le trou de l’aspic. On ne nuira point, et on ne fera aucun dommage en toute la montagne de ma sainteté ; car la terre aura été remplie de la connaissance de l’Éternel, comme le fond des eaux qui la couvrent.
Ces dernières paroles, car la terre aura été remplie, etc., qui n’ont aucun rapport avec l’union et la paix des bêtes, nous montrent avec assez de clarté que c’est là une description allégorique de la paix et de l’union qui doit être entre les hommes.
Nous n’avons point de peine à donner un sens de figure à ces paroles du deuxième chapitre des révélations d’Esaïe, que la montagne de l’Éternel serait élevée au-dessus de toutes les montagnes de la terre. L’absurdité du sens littéral nous fait d’abord comprendre qu’il faut avoir recours à un sens mystique.
Enfin, l’événement ne nous permet point de douter qu’il ne faille reconnaître une figure dans cet oracle si beau de Malachie : Depuis le soleil levant jusqu’au soleil couchant, mon nom sera grand au milieu des nations ; et l’on offrira en tous lieux sacrifices de prospérité et oblation pure. Car puisque nous avons vu que le nom de l’Éternel notre Dieu, qui n’était autrefois servi qu’en Israël, a été reconnu et adoré depuis le soleil levant jusqu’au soleil couchant, et qu’il est devenu l’objet de la confiance et de la dévotion de tant de nations qui, ne le connaissant point auparavant, espèrent en lui, le prient dans leurs besoins, le remercient du bien qu’elles reçoivent, et le reconnaissent pour l’auteur de leur joie et de leur salut ; ce qui fait l’essence de la véritable religion, et qui vaut mieux que la graisse des bêtes, et le sang des victimes, nous ne saurions douter que les nations ne soient entrées dans l’alliance de Dieu. Quoique nous ne voyions point pratiquer la loi cérémonielle de Moïse, l’événement qui justifie la vérité de cette prophétie nous en fournit l’intelligence, et nous fait voir que c’est des sacrifices d’actions de grâces, et de l’oblation pure, de la prière, des aumônes et de la repentance, que Malachie a parlé dans cet oracle si magnifique et si beau.
Que si l’on ajoute à toutes ces considérations une remarque de feu M. Pascal, qui nous paraît fort essentielle, savoir, que la sagesse de Dieu a voulu mêler dans les prophéties ce qui regarde le règne spirituel du Messie, avec ce qui concerne l’état temporel des Juifs, soit pour attacher davantage le cœur des Juifs, et les obliger à conserver avec plus de fidélité des oracles qui enfermaient toutes leurs espérances ; soit pour nous faire regarder l’état temporel des Juifs comme une belle image du règne spirituel du Messie ; soit pour couvrir de quelques voiles la grâce et la vérité, qui ne devaient être clairement révélées qu’en Jésus-Christ ; soit pour se proportionner aux hommes de ce temps-là, et n’employer que les idées qui étaient dans l’esprit des prophètes, et qui étaient connues et familières ; soit pour éprouver les hommes, en présentant aux hommes spirituels le sens spirituel caché sous l’enveloppe des bénédictions temporelles, et permettant que les hommes charnels perdissent le bien spirituel que leurs passions les empêchaient de discerner, et ne fussent touchés que des bénédictions temporelles, nous ne serons point surpris que les prophètes passent assez souvent de la considération des choses qui regardent l’Église et Jésus-Christ, à la considération des choses qui regardent Juda et la république d’Israël.
Ainsi, trouvant peu ou point de difficulté dans la lecture des prophètes, nous bénirons Dieu qui nous aura éclairés de sa lumière, et nous aura conduits, comme par la main, de la révélation naturelle à la révélation judaïque, et de la révélation judaïque aux principes de la religion chrétienne, pour acquiescer pleinement à celle-ci, et chercher en elle notre consolation et notre joie.