Les noms que nous avons donnés jusqu’ici des écrivains du patriarcat d’Antioche, pendant la période 313-460, ne sont pas, il s’en faut, tous ceux que l’on pourrait citer. Afin d’être moins incomplet, nous en ajouterons ici quelques autres choisis parmi les plus connus.
Hegemonius est un auteur qui a dû vivre dans la Syrie septentrionale, mais sur lequel on n’a aucun renseignement. En revanche, son livre a été très lu : ce sont les Actes de la discussion d’Archelaüs avec Manès, actes d’une discussion qui n’a jamais eu lieu, et qui sert de cadre à une réfutation du manichéisme. L’ouvrage est précieux pour les détails puisés à de bonnes sources qu’il donne sur cette hérésie. Il a été composé entre 325 et 348 et, à part quelques citations grecques, n’existe qu’en une version latine du ive siècle.
A Antioche même, on a vu qu’à l’évêque des eustathiens, Paulin, avait succédé, en 388, Evagrius. Saint Jérôme, dont il était l’ami, assure qu’il avait composé des traités qui, en 392, n’avaient pas encore été édités (Vir. ill., 125). Il reste de lui une traduction latine de la Vie de saint Antoine par saint Athanase.
Parallèlement à Evagrius, les orthodoxes méléciens d’Antioche eurent pour évêque, de 381 à 404, Flavien, l’ami de Diodore de Tarse, l’évêque de saint Jean Chrysostome. On a de lui un sermon entier sur la charité fraternelle et des fragments d’autres discours. Photius (cod. 52) en a connu aussi deux lettres relatives à l’affaire des messaliens.
Nous venons de nommer saint Chrysostome. Entre ses ennemis les plus acharnés dont il avait d’avance récusé la sentence se trouvaient Acace de Bérée, Antiochus de Ptolémaïs et Sévérien de Gabala. Le premier fut évêque de Bérée de 378 à 432 et mourut plus que centenaire : homme zélé, mêlé à toutes les questions de son temps, mais dont le jugement n’était pas toujours droit. De son énorme correspondance nous ne possédons plus que trois lettres. Antiochus († 403-408) était un orateur harmonieux et élégant, fort goûté à Constantinople, et que ses contemporains surnommèrent Chrysostome. Gennadius (Vir. ill, 20) lui attribue un traité (perdu) Contre l’avarice ; un seul de ses discours s’est conservé en entier. Sévérien aussi s’acquit une réputation d’orateur et, malgré son rude accent syrien, prêcha à la cour avec succès. Son commentaire sur l’Épître aux Galates, signalé par Gennadius (Vir. ill., 21), est perdu, mais il s’est conservé de lui en grec, en arménien, en syriaque ou en copte, au moins vingt-six discours entiers et des fragments et citations dont une bonne édition est encore à faire.
Théodore de Mopsueste avait un frère nommé Polychronius, qui devint évêque d’Apamée en Syrie et mourut entre 428 et 431. Il avait écrit sur Job, Ezéchiel, Daniel et probablement sur d’autres livres des commentaires dont il reste dans les Chaînes des scolies assez nombreuses. Il appartenait naturellement à l’école historique d’Antioche ; mais rien ne prouve qu’il ait partagé les erreurs de son frère.
Un autre exégète de l’école d’Antioche, Adrien, prêtre et moine (début du ve siècle), a laissé une Introduction aux divines Écritures.
De l’évêque d’Émèse en Phénicie, Nemesius, que l’on met généralement au commencement du ve siècle, on ne connaît qu’un ouvrage, surtout philosophique, Sur la nature de l’homme. L’auteur s’y montre fortement imbu de néoplatonisme. Son livre, traduit en plusieurs langues, a été très lu au moyen âge.
Un peu plus tard, nous trouvons, au nord-est d’Antioche en Isaurie, l’évêque prédicateur Basile de Séleucie († vers 459). D’abord avec Flavien de Constantinople contre Eutychès, puis avec Dioscore contre Flavien, puis avec saint Léon contre Dioscore, il a fini dans l’orthodoxie. On a de lui quarante et un sermons dont quinze, connus de Photius (cod. 168), sont sûrement authentiques. La composition en est imagée, savante, mais recherchée et peu naturelle. Une vie de sainte Thècle, en vers, qu’il aurait écrite, est perduea.
a – P. G., lxxxv ; Photius, Bibl., cod. 168. La vie en prose de sainte Thècle (P. G., ibid., 477-618) n’est probablement pas l’œuvre de Basile.
Que si de la région d’Antioche nous passons à celle de Jérusalem, nous rencontrons d’abord un Gélase, neveu de saint Cyrille de Jérusalem, qui succéda, en 367, à Acace sur le siège de Césarée ; mais, nicéen convaincu, il dut céder la place, en 373, au semi-arien Euzoius pour ne revenir qu’en 379. Il assista, en 381, au concile de Constantinople et mourut en 395. C’était, dit saint Jérôme (Vir. ill., 130), un auteur au style soigné et limé qui ne publiait point ce qu’il écrivait. La Doctrina Patrum de incarnatione Verbi cite cependant de lui quelques ouvrages (p. 31, 92, 102). Il semble aussi avoir composé une continuation de l’Histoire ecclésiastique d’Eusèbe que Photius a connue (cod. 89).
A Jérusalem même, il faut nommer l’évêque Jean (386-417), homme d’éloquence et de vertu, dont la vie fut troublée par sa querelle avec saint Jérôme et saint Épiphane à propos de l’origénisme, et par la controverse pélagienne. Il reste de sa plume une profession de foi écrite en 415 et de nombreux extraits d’un mémoire à Théophile d’Alexandrie, composé en 397, sur l’origénisme. D’autres lettres sont perdues.
Un peu plus tard, à Jérusalem encore, un moine nommé Hésychius († après 451) se distinguait surtout par ses travaux scripturaires. On a de lui un commentaire sur les Psaumes, édité entre les œuvres de saint Athanase (P. G., xxvii, 649-1344), et des gloses sur les Prophètes. Un commentaire en latin sur le Lévitique, une Histoire ecclésiastique citée sous son nom et d’autres écrits ou fragments d’écrits sont moins bien attestés.
Non loin de Jérusalem, à Bethléem probablement, vivait un ami de saint Jérôme, Sophronius. Il avait écrit (Vir. ill., 134) un livre sur Bethléem, un autre sur la destruction du Sérapéum d’Alexandrie, et traduit en grec plusieurs des ouvrages latins de saint Jérôme. De ces traductions il s’est peut-être conservé la Vie d’Hilarion et la Vie de Malchus.
Plus célèbre a été l’évêque de Bostra, Titus, qui eut affaire à Julien l’Apostat, et mourut sous le règne de Valens (364-378). Il est connu surtout pour un ouvrage Contre les manichéens en quatre livres. Les deux premiers et le troisième jusqu’au milieu du chapitre vii se sont conservés en grec : le reste n’existe plus que dans une traduction syriaque qui paraît fidèle. L’écrit un peu long et diffus est intéressant par les citations qu’il contient de livres manichéens. Outre cela, Titus a laissé, en forme d’homélies, un commentaire sur saint Luc que l’on a pu reconstituer en partie, et des morceaux d’un sermon sur l’Épiphanie.
Un siècle plus tard, un de ses successeurs sur le siège de Bostra, Antipater, écrivait contre l’Apologie d’Origène par Pamphile et contre les apollinaristes. On n’a conservé de lui que des fragments de ces deux ouvrages avec quatre homélies ou fragments d’homélies.
C’est plus au sud de l’Arabie, dans la montagne même du Sinaï, que se retira, vers 390, un disciple de saint Chrysostome qui avait été préfet du prétoire à Constantinople, saint Nil. Il y vécut avec son fils jusque vers l’an 430 où il mourut. L’autorité de ses écrits était grande et le resta toujours parmi les ascètes. Ils comprennent une douzaine de traités sur la vie et les vertus chrétiennes et monastiques, un recueil de sentences et plus de mille lettres dogmatiques, exégétiques ou morales, dont un bon nombre ne font que reproduire des passages choisis d’auteurs et de Pères antérieurs, saint Irénée, saint Basile, etc., mais qui sont d’ailleurs précieuses pour l’histoire.
Marc l’Ermite fut, comme Nil et à la même époque, un disciple de saint Jean Chrysostome. D’abord abbé de monastère en Galatie, il s’établit, à la fin de ses jours, probablement au désert de Juda pour y vivre seul. Photius (cod. 200) a connu de lui neuf traités ascétiques ou même dogmatiques que nous avons encore. Un traité Contre les nestoriens est suspect et les Chapitres sur la tempérance sont une compilation postérieure.
Un autre Marc, diacre de Gaza, écrivit, vers 420, la vie de son évêque saint Porphyre (395-419).
Nommons enfin deux évêques cypriotes : l’un, Triphyllius, évêque de Lédra sous le règne de Constance, signalé par saint Jérôme (Vir. ill., 92) comme un des hommes les plus éloquents de son époque : ses écrits sont perdus ; l’autre, Philon, évêque de Carpasia vers l’an 400, dont il reste, dans une traduction latine et en un abrégé grec, un commentaire sur le Cantique.