« L’âme des dieux immortels est inaccessible à la crainte : il n’y a rien d’imparfait dans les hommes inspirés de la divinité, dit la divine Hécate. Descendue elle-même de la grande âme de son père, elle brille constamment de l’éclat de la vérité. Autour d’elle la sagesse est appuyée sur une base immuable, sur des raisonnements invincibles. Enchaînez-moi, car l’influence de la divinité est si puissante sur moi, qu’elle pourrait animer les mondes les plus élevés. Faut-il pour cela donner à l’âme de la déesse, comme trois formes ou trois parties ? Non ; mais elle a en elle deux passions, celle de la colère et celle de la concupiscence qui la porte aux jouissances sensuelles. »
Et ce n’est pas moi qui avance cette opinion, c’est celle de l’auteur déjà cité et dans lequel je trouve également ce qui suit :
« Une chose que je ne m’explique pas, dit-il, c’est que ceux auxquels nous adressons nos prières, parce que nous les regardons comme de bons démons, ne sont pas moins que les mauvais, soumis à toutes les passions : ou bien que voulant voir la justice dans ceux qui les honorent, ils ne rougissent pas eux-mêmes de s’assujettir jusqu’à commettre toutes sortes d’injustices : ou bien encore qu’ils repoussent la prière de toute âme qui n’est pas pure des jouissances grossières des sens, et que cependant ils ne manquent pas de porter ceux qui les servent ou plutôt tous les hommes, aux plus infâmes plaisirs de la volupté. »
Vous trouverez les mêmes pensées dans sa lettre à l’Égyptien Anebo. Puis dans ce fameux traité de la philosophie fondée sut les oracles, que nous avons déjà cité, il continue de la sorte :
« Quelle est la fonction assignée à chacun des démons ? quelques-uns d’entre eux se sont chargés de nous l’apprendre ; ainsi Apollon dans l’oracle suivant que nous allons rapporter. Il s’agissait de répondre à cette question : Faut-il prêter un serment lorsqu’il est exigé ?
Les délices de la mère des dieux et des Titans, Rhéa, c’est le son de la flûte, le bruit du tambour, une réunion de femmes. Pallas au casque brillant se plaît dans les combats et les exercices de Bellone. A la tête de ses chiens légers, la fille de Latone aime à poursuivre à travers les rochers et les collines, les bêtes fauves qui peuplent les montagnes. La douce rosée que versent les nuages aériens est une délicieuse harmonie pour les oreilles de Junon. Cérès aime un champ fertile dont les épis dorés promettent une abondante moisson. Sur les rivages heureux qu’arrosent les ondes bienfaisantes du Nil, Isis, l’aiguillon de la douleur dans l’âme, court à la recherche de son époux, le bel Osiris. »
Maintenant donc que je sais que la mère des dieux n’aime que le son de la flûte, le bruit du tambour, les réunions de femmes, il faudra, au mépris de toute espèce de vertu, me livrer exclusivement à ces exercices, puisque cette déesse ne tient compte ni de la tempérance, ni d’aucune autre pratique vertueuse. Si Pallas ne pense qu’à la guerre et aux combats, elle a donc en horreur la paix et tous les arts que la paix fait fleurir. La fille de Latone peut aimer à poursuivre, à la tête de ses chiens légers, les bêtes fauves à travers les campagnes ; en un mot, toutes ces divinités peuvent avoir chacune leur goût particulier ; mais je demanderai en quoi tout cela peut contribuer à porter les hommes à la vertu et à la félicité. Mais continuons, et voyons si ce que notre philosophe a encore à nous dire annonce véritablement une nature divine ou plutôt si ce n’est pas la preuve évidente d’une nature méchante et perverse.