Luther traduit, dans Matthieu 28.1 Ὀψὲ δὲ σαββάτων, τῇ ἐπιφωσκούσῃ εἰς μίαν σαββάτων par : am Abend des Sabbaths, welcher anbricht am Morgen des ersten Feiertages der Sabbathen, — dans Marc 16.2, τῇ μιᾷ τῶν σαββάτων, par : an einem Sabbather, — dans Marc 16.9, πρώτῃ σαββάτου, par : am ersten Tag der Sabbather, — dans Luc 24.1 et Jean 20.1, τῇ μιᾷ τῶν σαββάττων, par : an der Sabbather einen, — dans Jean 20.19, τῇ ἡμέρᾳ ἐκείνῃ τῇ τῶν σαββάτων, par : desselbigen Sabbaths. Voir le 4e vol. de la Bible polyglottes publiée par Stier, superintendant à Eisleben, et Thiele, prof. à Leipzig, 1875, où toutes ces traductions de Luther sont rectifiées. Elles le sont aussi dans la première impression de la Bible luthérienne révisée par les soins de la Kirchenkonferenz évangélique d’Eisenach (Halle 1883, Sogenannte Probebibel). Un passage des Kirchenpostillen, sur lequel Rauschenbusch (p. 75) a appelé l’attention, rend intelligibles ces traductions erronées du grand Réformateur, mais en faisant constater une nouvelle erreur de sa part. On lit dans un sermon de Pâques rattaché à Marc 16.1-8 (dans l’édition des œuvres de Luther publiées à Erlangen, 1826-30, t. XI, p. 192) : Après « le grand sabbat dans lequel Jésus était couché dans le sépulcre, les Juifs avaient sept jours entiers que l’on devait fêter, ils les nommaient tous des sabbats ; ils commençaient à les compter à partir du jour de fête qui suivait le grand sabbat, et ce second jour de fête était appelé Prima sabbathorum ; ils nommaient ensuite le 3e jour de fête secunda sabbathorum, et ainsi de suite. Et dans ces jours ils ne mangeaient que du pain sans levain, c’est pourquoi ces jours sont aussi nommés par l’évangéliste ceux des pains sans levain. » La fête de Pâques avait donc d’après Luther 8 sabbats consécutifs, dont le 1er était le grand sabbat. Pour faire ressortir l’inexactitude de ce point de vue, il suffit de rappeler que d’après Exode 12.6 ; Lévitique 23.7-8, tous les jours des Azymes n’avaient pas un caractère sabbatique, mais seulement le 1er et le dernier, le 15 et le 22 Nisan.
Les erreurs de la traduction de Luther qui ont été signalées plus haut, venaient d’ailleurs principalement de ce qu’il n’avait pas toujours compris deux hébraïsmes de la langue hellénistique du Nouveau Testament : l’un concernant l’emploi de l’adjectif cardinal εἷς, μία, ἕν, comme adjectif ordinal, avec le sens de premier (πρῶτος), l’autre concernant le double sens de σάββατον ou σάβατα. Mais, du reste, Luther n’était pas sous ce rapport une exception. Nous ne dirons pas cependant avec Rauschenbusch, que la Vulgate elle-même lui avait donné un fâcheux exemple, en traduisant presque partout par : una sabbati ou sabbatorum (Marc 16.2 ; Luc 24.1 ; Jean 20.1, 19 ; Actes 20.7 ; 1 Corinthiens 16.2), car ces deux expressions peuvent très bien signifier le 1er jour après le sabbat, ou le 1er jour de la semaine, d’autant plus que dans Matthieu 28.1, qui ouvre la série, il y a : prima sabbati. Mais si Calvin a mieux compris que Luther ces 4 passages des Évangiles, il préférerait encore voir dans Actes 20.7, « quelque certain jour de sabbat » plutôt que « le 1er jour de la sepmaine », et il interprète résolument 1 Corinthiens 16.2 comme désignant le sabbat. D’après Rauschenbusch, Erasme traduit aussi dans Actes 20.7 par : quodam die sabbatorum ; la version de Tyndale (1525) dans Actes 20.7 et 1 Corinthiens 16.2, par : on a saboth day ; celle de Coverdale (1535) dans le 1er de ces versets par : upon one of the sabbathes ; dans le 2d, par : upon some sabbath day ; et tous les passages en question n’ont été bien traduits en anglais que dans la version publiée au commencement du 17e siècle et dont l’exemple fut suivi dans la version hollandaise postérieure. C’est Th. de Bèze, qui dans sa version latine du Nouv. Test., publiée avec des notes, en particulier en 1598, semble avoir été le véritable initiateur de la rectification complète. A cet égard et pour son interprétation de Apocalypse 1.10, il occuperait la place la plus élevée dans l’histoire de la doctrine du dimanche au 16e siècle. « Il est le 1er et le seul dans le siècle de la Réformation, dit Rauschenbusch, qui ait complètement exposé sur le sabbat et le dimanche, l’enseignement que nous estimons être le vrai. — Henke, dont le luthéranisme est excessif, dit : « Le premier qui affirma (dans le protestantisme) que le dimanche est d’institution divine, fut de Bèze. » Voir, La doctrine du dimanche au 16e siècle, par L. Thomas Genève, 1891.