(250) Quelle est donc la cause d'une telle anomalie et d'une telle inconvenance à l'égard de la divinité ? Elle vient, je crois, de ce que leurs législateurs n'ont pas eu conscience à l'origine de la véritable nature de Dieu, et que, même dans la mesure où ils ont pu la saisir, ils n'ont pas su la définir exactement pour y conformer le reste de leur organisation politique ; (251) comme si c'était un détail des plus négligeables, ils ont permis aux poètes de présenter les dieux qu'ils voudraient, soumis à toutes les passions, et aux orateurs de donner le droit de cité par un décret à celui des dieux étrangers qui serait utile. (252) Les peintres aussi et les sculpteurs jouirent à cet égard d'une grande liberté chez les Grecs, chacun tirant de sa propre imagination une forme, que l'un modelait dans la glaise et que l'autre dessinait. Les artistes les plus admirés se servent de l'ivoire et de l'or, qui fournissent matière à des inventions toujours nouvelles. (253) Et puis certains dieux, après avoir connu les honneurs dans la maturité, ont vieilli pour me servir d'un euphémisme ; (254) d'autres nouvellement introduits, obtiennent l'adoration[1]. Certains temples sont désertés et de nouveaux s'élèvent, les hommes bâtissant chacun suivant son caprice, alors qu'ils devraient au contraire conserver immuable leur croyance en Dieu et le culte qu'ils lui rendent.
[1] Nous laissons de côté les gloses qui encombrent le texte du Laurentianus, §§ 253 et 254.