Les épîtres de Paul

1.
Fondation de l’église

La ville de Philippes devait son nom à Philippe, roi de Macédoine, le père d’Alexandre-le-Grand, qui l’avait rebâtie pour servir de forteresse frontière entre son royaume et la Thrace. Elle se nommait précédemment Crénides, « les sources, » à cause des ruisseaux nombreux qui arrosent la plaine haute où elle est située, et spécialement du cours d’eau principal, nommé Gangitès, qui va se jeter dans le Strymon, à une lieue plus à l’ouest. Elle avait pour port Datos ou Néapolis, située à trois lieues au sud, sur la mer Egée. C’était dans la plaine de Philippes que s’était décidé, peu de temps auparavant, le sort du monde, par la victoire d’Octave et d’Antoine sur les derniers défenseurs de la république, Brutus et Gassius. Après la défaite d’Antoine qui suivit bientôt, Octave assigna la ville de Philippes, comme résidence, au reste des soldats de son rival vaincu. Philippes devint ainsi une colonie romaine avec droit de cité italienne. Elle était administrée, comme toutes les colonies de ce genre, par des magistrats nommés Duumvirs. Il s’y trouvait un certain nombre de Juifs, mais non, paraît-il, en nombre suffisant pour posséder une synagogue proprement dite, de sorte qu’ils se rassemblaient le jour du sabbat au bord de la rivière pour y faire leurs ablutions et leurs prières.

En automne de l’an 52, Paul, dans son second voyage, était arrivé avec Silas et Timothée à Troas, sur la rive asiatique de la mer Egée, à la suite d’un arrêt mystérieux qui les avait empêchés d’exercer leur mission en Asie-Mineure. Paul fut tiré de la perplexité dans laquelle cette dispensation l’avait plongé, lui et ses compagnons de voyage, par la vision que l’on sait ; et aussitôt, avec Silas, Timothée et l’auteur du récit des Actes, Luc, sans doute une ancienne connaissance datant du séjour à Antioche, il partit pour la Macédoine, franchissant l’intervalle qui sépare l’Asie de l’Europe. Le récit de la fondation de l’église de Philippes est connu ; voir Actes ch. 16. Ici, comme ailleurs, ce fut par la synagogue ou ce qui en tenait lieu, qu’il pénétra dans la place. La première personne baptisée fut une prosélyte venue d’Asie-Mineure, dont la maison devint la demeure des missionnaires. Il serait superflu d’entrer dans le détail des scènes qui suivirent. Quand Paul, après avoir tiré parti de sa qualité de citoyen romain, quitta Philippes, il put prendre congé d’un groupe de frères en Christ qu’il laissait sous la direction de Luc, comme le noyau d’une église vivante (v. 40). Cela se passait vers la fin de l’an 52. Il ne revit point cette jeune église jusqu’à la fin de son séjour à Éphèse ; il se rendit alors en Achaïe, d’abord, puis en Macédoine ; c’était le moment le plus critique du conflit qui s’était élevé entre lui et l’église de Corinthe (en 57). Revenu à Éphèse, il en repartit, après le tumulte excité par Démétrius, pour la Macédoine (2 Corinthiens 2.12-13). Il s’occupait alors particulièrement de la collecte projetée pour les pauvres de Jérusalem ; il trouva les chrétiens de Philippes, de Thessalonique et des autres villes de Macédoine prêts non seulement à donner leurs biens, mais aussi à se donner eux-mêmes (2 Corinthiens 8.1-5) pour l’œuvre du Seigneur ; c’était en 58. Enfin au printemps de l’année suivante, en se rendant à Jérusalem pour accompagner ceux qui y portaient la somme collectée, il passa la semaine de Pâques à Philippes. Durant les intervalles plus ou moins longs qui séparèrent ces quatre séjours, les relations de l’apôtre avec l’église ne paraissent pas avoir jamais complètement cessé. Les Philippiens avaient à cœur de le soulager dans sa vie si laborieuse ; ils le soutenaient de temps en temps par des envois d’argent, et Paul, qui connaissait leurs sentiments élevés, ne craignait pas d’accepter d’eux un service qu’il aurait refusé de la part d’autres églises ; c’était naturellement à chaque fois l’occasion pour lui de leur envoyer des remerciements auxquels se joignaient les autres communications qu’il pouvait avoir à leur faire.

Telles étaient les relations qui existaient entre Paul et cette église, bien-aimée entre toutes, qu’il appelle (Philippiens 4.1) « sa joie et sa couronne. »

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