D'Autres personnes élevées aux Charges remportèrent de semblables couronnes, pour avoir parlé avec une semblable liberté. Valentinien que nous verrons bientôt sur le trône, étant pour lors Tribun des soldats qui gardent le Palais, fit paraître l'ardeur du zèle qu'il avait pour la pureté de la foi. Comme cet extravagant Empereur entrait tout transporté de joie dans le Temple de la Fortune publique, et que les Prêtres étaient aux deux côtés de la porte, avec de l'eau pour purifier, selon leur imagination, ceux qui étaient prêts d'entrer, une goutte tomba sur l'habit de Valentinien, qui marchait devant l'Empereur. Il frappa le Prêtre de la main, et lui dit, qu'il le salissait, au lieu de le purifier. Il mérita par cette action de posséder l'un et l'autre Empire. Julien qui en avait été témoin, le relégua à un fort assis au delà du désert. A peine un an et quelques mois étaient écoulés, que la générosité avec laquelle il avait fait profession de la Religion Chrétienne, fut récompensée de la possession de l'autorité souveraine. C'est ainsi que Dieu commence souvent à couronner la piété dès cette vie, par des biens qui ne sont que comme l'ombre, et le gage de ceux qu'il lui réserve en l'autre.
L'Empereur usa encore d'une nouvelle invention pour ébranler dans le cœur des Chrétiens la fermeté de leur foi. Comme il avait accoutumé de s'asseoir sur son trône, pour distribuer des pièces d'or aux soldats, il ordonna contre la coutume, que l'on mît de l'encens, et du feu sur une table proche de l'autel, et que chacun jetât de l'encens dans le feu, avant que de recevoir de sa main la pièce d'or. Plusieurs ne s'aperçurent point de ce piège. Ceux qui s'en aperçurent, l'évitèrent en feignant d'être malades. Quelques-uns négligèrent leur salut, par un trop grand désir de s'enrichir. D'autres trahirent leur Religion par lâcheté.