Synonymes du Nouveau Testament

81.
Ζῶον, θηρίον
Être vivant, bête

Dans bien des passages, l’un de ces mots pourrait être employé indifféremment pour l’autre ; aussi, dans plus d’un endroit, les échange-t-on l’un pour l’autre. Voir Plutarch., De Cap. ex Inim. Util. 2. Cela ne prouve cependant pas qu’il n’existe point de différence entre eux, surtout si d’autres passages se présentent, quelque peu nombreux qu’ils soient, où l’un des mots conviendrait plutôt que l’autre. La distinction, latente dans les cas où on échange les termes, parce qu’il n’y a aucun motif pour la mettre en relief, se révèle d’elle-même dans ceux où on les change.

La différence entre ζῷον et θηρίον n’est point celle qu’on trouve entre deux vocables coordonnés, car le second est entièrement subordonné au premier, étant un terme moindre inclus dans un plus grand. Toutes les créatures qui vivent sur la terre, y compris l’homme lui-même, λογικὸν καὶ πολιτικὸν, comme le dit si bien Plutarque (De Am. Prol. 3), sont des ζῶα (Aristot., Hist. Anim. 1.5, 1). Il y a plus, Dieu lui-même, selon les Définitions de Platon, est un ζῶον ἀθάνατον, car il est le seul auquel la vie appartienne de droit absolu (φαμὲν δὲ τὸν Θεὸν εἶναι ζῶον ἀΐδιον ἄριστον, Aristot. Métaph. 12.7). Le N. T. ne se sert nulle part de ζῶον pour désigner l’homme (mais voyez Plato, Pol. 271 e ; Xenoph., Cyrop. 1.1, 3 ; Sagesse 19.20) ; encore moins pour désigner Dieu, auquel est réservée la ζωή, comme à Celui qui ne vit pas seulement, mais qui est la vie absolue, la source de la vie, l’αὐτοζῶον, la πηγὴ ζωῆς, la plus haute expression de la ζωή, et la plus digne de Lui (Jean 1.4 ; 1 Jean 1.2). Dans l’usage ordinaire qu’on en fait, ζῶον embrasse la même étendue de signification que le mot « animal » dans notre langue, ayant généralement, mais non universellement (Plutarch., De Garr. 22 ; Hébreux 13.11), pour associé ἄλογον ou quelque autre épithète (2 Pierre 2.12 ; Jude 1.10).

Θηρίον, diminutif de θήρ, qui, dans sa forme éolique φήρ revêt le sens du latin « fera », et la forme plus usuelle de l’allemand « Thier » (en anglais « deer »), a complètement perdu son sens diminutif, comme, du reste, χρυσίον, βιβλίον, φορτίον, ἀγγεῖον, et tant d’autres mots dans la langue grecque (voir Fischer, Prol. de Vit. Lex. N. T. p. 256).

Le composé moderne « megatherium », prouve assez la vérité de notre affirmation. Comparez Xénophon (Cyrop. 1.4, 11) : θηρία μεγάλα. Les θηρία ne sont pas exclusivement des animaux méchants, des bêtes cruelles, car voyez Hébreux 12.20 ; Exode 19.13 ; mais c’est ce caractère qui prédomine (Marc 1.13 ; Actes 28.4-5). Θηρία dans Actes 11.6, est distingué de τετράποδα, et il est digne de remarque que, quelque nombreux que soient les passages dans les Septante où il est question des bêtes pour les sacrifices, jamais ce n’est par θηρίον qu’elles sont désignées. La raison en est évidente, c’est que θηρίον indique clairement l’élément brutal, bestial, non l’élément qui rattache les animaux inférieurs à l’homme, l’élément, par conséquent, qui les rend propres à être offerts à la place de l’homme. Ici encore nous avons une explication du passage fréquent de θηρίον et de θηριώδης, comme en latin de « bestia » et de « bellua », aux hommes féroces et brutaux (Tite 1.12 ; 1 Corinthiens 15.32 ; Joseph. Ant. 18.5, 5 ; Arrian., In Epict., 2.9).

Θηρίον et ζῶον remplissent dans l’Apocalypse des rôles importants ; tous deux appartiennent à son symbolisme le plus élevé, mais à des degrés bien différents. Les ζῶα ou « êtres vivants », qui se tiennent devant le trône, en qui se trouve toute la plénitude de la vie créée, en tant qu’ils donnent gloire à Dieu (Apocalypse 4.6-9 ; 5.6 ; 6.1, et souvent), forment une partie du symbolisme céleste, tandis que les θηρία, la première et la seconde bête qui s’élèvent l’une du puits de l’abîme (Apocalypse 11.7), l’autre, de la mer (Apocalypse 13.1), dont l’une fait la guerre aux deux Témoins, et l’autre ouvre la bouche pour blasphémer, figurent dans le symbolisme de l’enfer. Confondre ζῶα et θηρία sous une désignation commune en appelant ceux-là bêtes et ceux-ci bêtesb, serait commettre une négligence, alors même qu’on rendrait ces deux classes d’êtres par un nom commun aux deux ; mais le mal est bien plus sérieux, quand le mot qu’on emploie (animal), mettant l’accent, comme il le doit, sur la partie inférieure de la vie animale, est employé pour représenter de glorieuses créatures dans les parvis et dans la demeure même des Cieux ! Tous les traducteurs sont tombés dans cette erreur : que la version de Reims n’y ait pas échappé, c’est étrange, car la Vulgate traduit ζῶα par « animalia » (« animantia » eût mieux valu) et θηρίον par « bestia ». Si cette version avait toujours rendu ζῶα par « créatures vivantes », elle eût eu l’avantage de mettre les symboles de l’Apocalypse qui nous occupent, en rapport, à ne pas s’y tromper, avec Ézéchiel 1.5, 13-14, etc., où חַיָה et le ζῶον des Septante sont rendus par « créatures vivantes ».

b – La version anglaise n’établit pas la distinction entre animaux et bêtes, comme le font nos versions, encore moins celle qu’on devrait adopter d’êtres vivants et de bêtes qu’établit la traduction de Lausanne. Trad.

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