On a souvent soutenu, dans l’intérêt d’une vérité capitale en faveur du caractère vicarial de la mort de Christ, que dans les nombreux passages qui déclarent que Christ est mort ὑπὲρ πάντων, ὑπὲρ ἡμῶν, ὑπὲρ τῶν προβάτων, etc. (Hébreux 2.9 ; Tite 2.14 ; 1 Timothée 2.6 ; Galates 3.13 ; Luc 21.19-20 ; 1 Pierre 2.21 ; 3.18 ; 4.1 ; Romains 5.8 ; Jean 10.15), ὑπέρ devait être complètement synonyme d’ἀντί. On a argué de plus que, comme ἀντί est d’abord la préposition d’équivalence (Homer., Il., 9.116-117) et puis d’échange (1 Corinthiens 9.15 ; Hébreux 12.16 ; Matthieu 5.38), ὑπέρ doit être considéré dans tous ces endroits comme ayant la même force. Chacun de ces passages, il est évident, deviendrait ainsi un dictum probans en faveur d’une vérité d’une immense importance, à savoir que Christ a souffert, non simplement en notre faveur et pour notre bien, mais aussi à notre place, et qu’il a subi le châtiment de nos péchés que, sans lui, nous aurions dû subir. — Quoique quelques exégètes l’aient nié, nous devons cependant convenir que la préposition ὑπέρ a quelquefois ce dernier sens. Ainsi dans le Gorgias de Platon (515) : ἐγὼ ὑπὲρ σοῦ ἀποκρινοῦμαι, « je répondrai à votre place » ; comparez encore Xénophon (Anab. 7.4, 9) : ἐθέλοις ἂν ὑπὲρ τούτου ἀποθανεῖν ; « veux-tu mourir à la place de ce jeune garçon ? » Le contexte permet ce sens et les mots : εἰπαίσειεν αὐτὸν ἀντὶ ἐκείνου, l’autorisent surabondamment (Thucyd., 1.141 ; Eurip., Alceste 712 ; Polyb., 3.67, 7 ; Philémon 1.13 ; et peut-être 1 Corinthiens 15.29) ; mais il n’en est pas moins certain que dans des passages bien plus nombreux, ὑπέρ ne signifie rien de plus qu’en faveur, pour le bien de ; ainsi Matthieu 5.44 ; Jean 13.37 ; 1 Timothée 2.1 et continuellement. D’où il suit, je pense, que si nous n’avions dans les Ecritures que des déclarations portant que Christ est mort ὑπὲρ ἡμῶν, qu’il a goûté la mort ὑπὲρ παντός, il serait impossible d’en tirer une preuve irréfragable en faveur de la mort vicariale du Christ, preuve qui montrât qu’il mourut à notre place, qu’il porta lui-même sur sa croix nos péchés et qu’il subit le châtiment de nos péchés ; cependant nous pourrions la trouver ailleurs comme, du reste, c’est le cas (Ésaïe 53.4-6). Ce n’est qu’en tant que nous avons d’autres déclarations, statuant que Christ mourut ἀντὶ πολλῶν (Matthieu 20.28), qu’il souffrit lui-même comme un ἀντίλυτρον (1 Timothée 2.6), que nous servant de ces dernières déclarations pour interpréter les premières, nous nous sentons pleinement autorisés à réclamer les déclarations qui portent sur la mort de Christ pour nous comme prouvant aussi qu’il mourut à notre place. Dans ces passages, sans aucun doute, la préposition ὑπέρ est plutôt employée dans le but d’embrasser les deux significations et d’exprimer comment Christ mourut à la fois pour nous (ici la préposition se rapproche plus près du sens de περί : Matthieu 26.28 ; Marc 14.24 ; 1 Pierre 3.18 ; διά possède une fois ce sens : 1 Corinthiens 8.11 et à notre place, tandis qu’ἀντί n’aurait exprimé que ce dernier rapport.
Tischendorf, dans son petit traité, Doctrina Pauli de vi mortis Christi satisfactoria, a quelques excellentes remarques sur cette matière, dont je me suis inspiréc.
c – Trench cite ici un grand passage en latin de cet ouvrage, que nous ne reprenons pas (ThéoTEX)