Synonymes du Nouveau Testament

83.
Φονεύς, ἀνθρωποκτόνος, σικάριος
Meurtrier, homicide, assassin

Nos traducteurs ont rendu tous ces mots par « meurtriers ». Ce terme, qui peut servir pour désigner le premier d’entre eux (Matthieu 22.7 ; 1 Pierre 4.15 ; Apocalypse 21.8), est en même temps si général qu’il laisse dans l’ombre des traits qui caractérisent les deux autres.

Ἀνθρωποκτόνος, qui correspond exactement à notre terme « homicide », ne se rencontre dans le N. T. que dans les écrits de Saint Jean (Jean 8.44 ; 1 Jean 3.15) ; on le trouve également dans Euripide (Iphig. in Taur., 390). Dans la bouche de notre Seigneur (voyez le premier des passages cités), ἀνθρωποκτόνος est à la place qui lui convient ; aucun autre mot ne pouvait le remplacer, car Jésus fait ici allusion à ce terrible assaut qui ne réussit que trop bien et que Satan livra à la vie naturelle et à la vie spirituelle de tout le genre humain. Il fit pénétrer le péché, et par le péché la mort, en ceux qui avaient été établis pour être les auteurs de la vie de tous les autres hommes, empoisonnant, comme il l’espérait, le courant de la vie humaine dans sa source même. C’est ainsi que Satan était bien ὁ ἀνθρωποκτόνος, car il aurait bien voulu tuer, non cet homme-ci ou celui-là, mais la race tout entière.

Σικάριος, qui ne se trouve qu’une fois dans le N. T. et, chose assez digne de remarque, sur les lèvres d’un officier romain (Actes 21.38), est un de ces nombreux vocables latins que nous rencontrons dans le recueil sacré. Beaucoup de ces mots avaient accompagné la domination romaine, même dans les provinces de l’empire qui conservaient encore leur propre langue. Le « sicarius », dans le sens romain et dérivé, de « sica », courte épée ou plutôt poignard, stylet à lame recourbée qu’on portait et dont on se servait promptement, était le « bravo » à gages ou le bandit soudoyé. Au déclin de la république, les Antonius et les Clodius avaient des bandes de ces hommes à leur solde ; souvent ils en entouraient leur personne et s’en servaient pour écarter d’eux les citoyens qui leur faisaient ombrage. Le mot s’était déjà introduit en Palestine et s’était mêlé au grec qu’on y parlait. Josèphe, dans deux passages instructifs (Bel. Jud. 2.13, 3 ; Ant. 20.8, 6). nous donne des détails complets sur le compte de ceux auxquels on avait transféré le nom de σικάριοι. C’étaient des assassins, dont toute une engeance avait poussé aux derniers jours d’Israël, lorsque tous les liens de la société se rompaient rapidement comme pour annoncer la catastrophe qui s’approchait ! Cachant leur courte épée sous leurs vêtements (c’est la ressemblance de cette épée avec la « sica » romaine qui, au dire de Josèphe, valut aux σικάριοι leur dénomination) et se mêlant à la multitude, surtout lors des fêtes principales, ils poignardaient dans la foule celui de leurs ennemis qu’ils voulaient, et puis, prenant part avec ceux qui les entouraient aux cris d’horreur qui surgissaient, ils réussissaient à échapper à tout soupçon.

D’après ce qui précède, φονεύς peut donc signifier tout meurtrier : c’est le genre dont σικάριος est une espèce ; car σικάριος c’est un assassin qui se sert d’une arme particulière et qui fait son métier de sang d’une manière spéciale. A son tour l’ἀνθρωποκτόνος porte un cachet qui lui est propre. Sur son front est écrit que celui qui mérite ce nom est un tueur d’hommes ; mais φονεύς comporte une signification plus vague, en sorte qu’on appliquerait le mot à un méchant en disant qu’il est un φονεὺς τῆς εὐσεβείας, un homme qui détruit la piété (quoiqu’il n’attaquât point directement la vie des hommes) ; à un traître, ou à un usurpateur, comme φονεὺς τῆς πατρίδος (Plut., Prœc. Ger. Reip. 19) ; de tels emplois du mot ne sont pas rares.

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