[1] A cette époque, Anicet gouvernait l'église des Romains. Polycarpe, qui vivait encore, fut à Rome pour s'entretenir avec lui d'une question concernant le jour de la Pâques. C'est Irénée qui rapporte ce fait. [2] Le même écrivain donne encore sur Polycarpe un autre récit qu'il faut joindre à ce qu'on a déjà dit de lui ; en voici la teneur :
EXTRAIT DU IIIe LIVRE DE L'OUVRAGE D'IRÉNÉE CONTRE LES HÉRÉSIES
« [3] Non seulement Polycarpe fut disciple des apôtres et vécut avec nombre de personnages qui avaient vu le Seigneur ; mais les apôtres l'établirent pour l'Asie évêque dans l'église de Smyrne : nous-même l'avons vu dans notre premier âge. [4] II vécut en effet longtemps ; puis après une vieillesse très avancée et un martyre glorieux et des plus éclatants, il mourut. Il n'eut jamais qu'un enseignement : celui qu'il avait appris des apôtres, que l'Église transmet et qui est le seul véritable. [5] Toutes les Églises de l'Asie en témoignent et ceux qui lui ont succédé jusqu'ici attestent qu'il fut un témoin de la vérité autrement digne de foi et sûr que Valentin, Marcion et le reste des esprits pervers. Venu à Rome sous Anicet, il ramena dans l'Église de Dieu beaucoup des hérétiques dont il a été question plus haut ; il leur enseignait qu'il n'y a qu'une seule vérité laissée par les apôtres, celle qui est transmise par l'Église.
« [6] Il existe encore des gens qui l'ont entendu raconter que Jean le disciple du Seigneur vint un jour aux thermes d'Éphèse. Lorsqu'il y aperçut Cérinthe, il en sortit précipitamment, sans prendre de bain, et disant : « Fuyons, de peur que l'édifice ne tombe sur nous ; « Cérinthe, l'ennemi de la vérité, s'y trouve. » [7] Le même Polycarpe, à Marcion qui l'aborde et lui dit : « Reconnais-nous », répondit : « Je reconnais, je reconnais le premier-né de Satan. » Telle était la circonspection des apôtres et de leurs disciples : ils ne voulaient avoir aucun rapport même de parole avec ceux qui falsifiaient la vérité, selon la recommandation de Paul : « Après un ou deux avertissements, évite l'hérétique, avec la certitude que quiconque est dans cet état est perverti et qu'il pèche, condamné qu'il est par son propre jugement. »
[8] « Il y a encore de Polycarpe une lettre aux Philippiens qui est très considérable : ceux qui le voudront et qui ont souci de leur salut pourront y apprendre le caractère de sa foi et sa prédication de la vérité. »
[9] Voilà ce que dit Irénée. Dans l'écrit aux Philippiens dont il a été question et que nous avons encore, Polycarpe se sert de témoignages tirés de la première épître de Pierre.
[10] Antonin, appelé le Pieux, acheva la vingt-deuxième année de son règne [mars 160], il eut pour successeurs son fils, Marcus Aurelius Verus, appelé aussi Antonin, et Lucius, son frère.