Le rejet d’Israël ne rend-il pas vain le décret d’élection, et impossible la réalisation du but que Dieu s’est proposé en fondant la théocratie ? Sans doute un serment est intervenu de la part de Dieu, mais la liberté humaine peut tout bouleverser. — Tel est le problème.
L’amour et la miséricorde de Dieu sont par dessus sa justice. Telle est la solution que fournit le mosaïsme lui-même. Comparez Exode 20.5-6 ; 34.6 ; Deutéronome 7.9. La fidélité de Dieu ne peut pas être anéantie par l’infidélité de l’homme. Quand Il punit, c’est pour sauver. Aussi punit-il avec mesure. Tel est le sens de la belle parabole Ésaïe 28.23-29. Le châtiment est de telle nature que le rétablissement d’Israël doit en jaillir. Le règne de Dieu viendra. Israël ne sera jamais entièrement détruit. Il sera rejeté, il sera dispersé parmi tous les peuples de la terre, mais il ne se confondra jamais avec eux ; il demeurera toujours un peuple à part ; il sera toujours là pour pouvoir un jour répondre enfin à sa destination. Lisez Lévitique 26.44 ; Deutéronome 32.36 et sq., et surtout Deutéronome 30.1 et sq.
Le rétablissement final des Israélites, tout en étant, le fait de Dieu, n’aura lieu que lorsqu’ils se seront convertis. Ce sera quelque chose de moral, et non pas de magique. Mais cette condition morale mise au relèvement du peuple élu, ce sera encore Dieu qui, par sa grâce prévenante, la remplira en venant renouveler les cœurs et y graver sa loi. Voyez la parole que nous citions en dernier lieu : Deutéronome 30.6. Ainsi donc, en dépit du péché de l’homme, le décret d’élection aura son effet ; il l’aura grâce à la fidélité et à la miséricorde de Dieu (Romains 11.25-36)e.
e – Nous trouvons dans 2 Samuel 7.14, cette même loi appliquée à la famille de David.
Les déistes et plusieurs modernes ont attaqué la religion de Moïse à l’endroit de la doctrine de la rétribution. On lui a reproché la nature peu relevée des encouragements qu’elle donne au bien. Elle s’adresse à l’égoïsme, à la peurf… Elle ne parle pas d’une rétribution future. — Mais il nous semble qu’une morale qui repose sur la foi en un Dieu, élisant par pure grâce, et qu’une religion qui enseigne que la communion avec Dieu est la condition du vrai bonheur, — ne méritent aucunement le reproche de grossier eudémonisme qu’on se plaît à leur faire. Ce n’est pas encore la morale du N. T. ; la vie éternelle n’est pas encore mise en évidence ; pas de piété sans un bonheur terrestre qui y corresponde. Mais cette conviction que c’est Dieu qui dirige toutes choses ici-bas ; cette manière énergique de réveiller la conscience ; cette foi en un Dieu toujours présent, toujours puissant pour intervenir dans la vie humaine ; tout cela met le judaïsme bien au-dessus du paganisme avec sa foi désespérante en un destin aveugle. La vie morale des Israélites acquiert ainsi une fraîcheur et une énergie qui forment le contraste le plus complet avec la disposition des Egyptiens, par exemple, à s’occuper continuellement de la mort et de la condition des morts.
f – De Welte : Caractéristique de l’hébraïsme, dans la Gazette de Daub et de Creuser, III, p. 241 et s.
[Il ne pouvait y avoir de foi vive en l’immortalité que quand la mort aurait été vaincue par la résurrection de J.-C. Mais la communion avec un Dieu éternel devait pourtant parler aux Israélites de leur propre immortalité. D’abord elle ne leur parle que de leur immortalité comme peuple (Psaumes 102.28) ; mais, plus certains hommes entrent en communion vivante avec Dieu, plus se développe aussi chez eux la pensée de l’immortalité personnelle, ainsi que nous le verrons en parlant de l’eschatologie chez les prophètes.]