Sonnets Chrétiens


Livre Troisième — Sonnet XIV

Sur l’Enfant Prodigue
Prosopopée

Emporté par l’essor d’un funeste caprice,
Loin du Roi juste et saint, du Dieu de vérité,
J’ai trop longtemps, hélas ! follement habité
L’infâme région de l’erreur et du vice.

Là, dans les noirs excès d’une aveugle malice,
Ingrat et lâche enfant, j’ai mon père irrité,
Et prodiguant ses biens, par ma témérité ;
Sur ma tête coupable attiré le supplice.

Aujourd’hui pénitent, misérable, affligé,
Dans l’excès des malheurs où je me vois plongé,
J’ai recours à la grâce, et retourne à mon père.

Ma repentance obtient le pardon attendu.
O que mon infortune est pour moi salutaire !
Sans ma perte, Seigneur, j’aurais été perdu.


1 : Ce n’est pas par le mouvement du corps, ni par l’espace des lieux, mais par le mouvement du cœur, par la disposition de l’âme, que nous nous éloignons de toi, Seigneur, ou que nous retournons à toi. (St. Augustin) 14 : C’est ainsi que Thémistocle, après son exil d’Athènes, s’étant réfugié dans la cour du roi de Perse, et s’y voyant magnifiquement traité, disait à ses enfants : Mes enfants, nous étions perdus, si nous n’eussions été perdus.

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