[1] Justin nous a laissé un grand nombre d'ouvrages, ils sont la preuve d'un esprit cultivé et zélé pour les choses divines et l'on n'en peut tirer que profit : nous y renverrons ceux qui aiment la science, après avoir indiqué ici, pour être utile, celles de ses œuvres qui sont venues à notre connaissance.
[2] D'abord, il y a de lui le discours adressé à Antonin surnommé le Pieux, ainsi qu'à ses fils et au sénat de Rome, en faveur de nos croyances ; puis, celui qui contient une seconde apologie de notre foi et que Justin adressa au successeur et homonyme de l'empereur précédent, à Antoninus Verus, dont nous venons, à l'instant, de raconter ce qui concerne l'époque. [3] Il y a encore le Discours aux Grecs, où l'auteur, après avoir examiné longuement beaucoup de questions agitées par nous et les philosophes grecs, disserte sur la nature des démons ; mais il n'y a pas d'urgence à en rien citer ici. [4] Il nous est venu encore un autre écrit adressé aux Grecs, que Justin a intitulé Réfutation ; un ouvrage, De la monarchie de Dieu, qu'il établit non seulement d'après nos Écritures, mais aussi d'après les livres des Grecs ; [5] un écrit intitulé Psalmiste ; une autre œuvre, en forme de scolies, De l'âme, dans laquelle, développant diverses questions qui se rapportent à ce sujet, il donne les opinions des philosophes grecs ; puis, il promet de les contredire et d'expliquer son propre sentiment dans un autre livre. [6] Il composa encore le Dialogue contre les Juifs, où il raconte la discussion qu'il eut à Éphèse avec Tryphon, le plus célèbre israélite de l'époque. Il y montre de quelle manière la grâce divine le poussa vers la doctrine de la foi, avec quel zèle il s'était auparavant adonné à l'étude de la philosophie et quelle ardente recherche il avait faite de la vérité. [7] En ce qui regarde les Juifs, il raconte, dans le même ouvrage, comment ils ont suscité toutes sortes d'obstacles à l'enseignement du Christ, et il s'adresse à Tryphon en ces termes :
« Non seulement vous n'avez pas changé de sentiment en ce qui concerne vos méfaits d'autrefois, mais en ce temps là, vous avez fait choix d'hommes spéciaux que vous avez envoyés de Jérusalem dans toute la terre pour dire qu'il venait de paraître une hérésie athée, celle de chrétiens. Ce sont eux qui ont répété tout ce que débitent contre nous tous ceux qui nous ignorent ; en sorte que vous êtes coupables d'injustice non seulement envers vous, mais bel et bien envers tous les hommes. »
[8] Justin écrit en outre que de son temps encore les dons de prophétie brillaient dans l'Église et il fait aussi mention de l'Apocalypse de Jean, disant clairement qu'elle est de l'apôtre. Il cite certaines paroles des prophètes, et convainc Tryphon que les Juifs les ont retranchées de l'Écriture. Bien d'autres travaux de Justin sont encore entre les mains de beaucoup de chrétiens. [9] Les écrits de cet homme ont paru aux anciens eux-mêmes tellement dignes d'estime qu'Irénée en cite des passages. Ainsi d'abord, dans le quatrième livre contre les hérésies, il dit :
« Et c'est avec raison que Justin déclare, dans son ouvrage contre Marcion, qu'il ne serait pas même convaincu par le Seigneur lui-même, s'il l'entendait dire qu'il y a un autre Dieu que le créateur du monde. »
Puis, au cinquième livre du même ouvrage :
« Et Justin observe fort bien qu'avant la venue du Sauveur, Satan n'a jamais osé blasphémer Dieu, parce qu'il ne savait pas encore sa condamnation. »
[10] Ceci était nécessaire à dire pour encourager ceux qui aiment la science à fréquenter avec soin les ouvrages de cet écrivain. Voilà ce qui concerne Justin.