Ainsi que cela résulte du § 92, les prêtres sont appelés en premier lieu à représenter le peuple auprès de Dieua et à couvrir leurs frères devant la sainteté divineb. Ce qui les rend capables de représenter et de couvrir à la fois l’assemblée d’Israël auprès de l’Éternel, c’est la sainteté qui s’attache à leur charge et qui couvre avant tout leurs propres péchés. Et ce par quoi ils rendent possible la rencontre de Dieu et du peuple dans les lieux et les moments où se célèbre le culte, ce sont des cérémonies qui ont nécessairementc un caractère expiatoire. C’est à cause de cette première partie de sa charge, que le prêtre est appelé en hébreu : Cohen, כון. Ce nom vient de coun, כון, qui signifie se présenter ou apprêter. Si l’on choisit le premier sens, un prêtre serait un homme qui se présente pour tenir la place d’un autre. Si l’on préfère le second, ce serait un homme qui apprête ce qu’il faut pour faire un sacrifice.
a – Ce sont des médiateurs entre Dieu et le peuple, mais ce ne sont pourtant pas les seuls, car c’est aussi au nom de Dieu que les rois agissent et que les prophètes parlent.
b – Cela ressort entre autres d’un détail : Aaron et ses fils avaient leurs tentes immédiatement devant l’entrée du Tabernacle (Nombres 3.38).
c – A cause de l’état de souillure du peuple.
Mais le prêtre n’est pas seulement un médiateur ; il doit aussi en second lieu enseigner et expliquer la loi (Lévitique 10.11), et sous ce rapport il fait la fonction d’un ambassadeur, d’un envoyé de Dieu auprès du peuple (Malachie 2.7 ; Ézéchiel 44.23 ; Lévitique 10.10 ; Aggée 2.11 ; Lévitique ch. 13 et s.). Il y a cette différence entre le prêtre et le prophète, que le premier doit simplement expliquer et, dans certains casd, appliquer la loi, tandis que le second reçoit des révélations nouvelles : Jérémie 18.18, voit dans la loi, la part du prêtre ; dans les conseils, celle du sage ; dans la parole, celle du prophète. Comp. Ézéchiel 7.26.
d – Voyez Ézéchiel 44.24.
Ces deux côtés de l’office des prêtres en Israël, sont l’un et l’autre relevés dans la bénédiction que Moïse prononce sur la tribu de Lévi : « Ils enseigneront tes ordonnances à Jacob et ta loi à Jacob ; ils te présenteront le parfum et tout sacrifice qui se consume entièrement par le feu sur ton autel ! (Deutéronome 33.10) »
Mais les descendants d’Aaron sont seuls prêtres en Israël. Ce sont eux que Dieu a choisis pour remplir ce saint office. Et après la révolte de Gorc, Dieu les confirme dans leur charge par le miracle de la branche d’amandier. Ce miracle montre que Dieu ne s’est pas laissé guider dans son choix par le mérite personnel de ceux qu’il a appelés à cette haute position, car en elle-même la verge d’Aaron ne différait en rien des onze autres. Après la libre élection, — l’hérédité. Nadab et Abihu ayant été consumés pour avoir offert un feu étranger dans leurs encensoirs, et n’ayant pas laissé d’enfants, la sacrificature passe aux deux autres fils d’Aaron, Eléazar et Ithamar. Plus tard des sacrificateurs seront exclus du sacerdoce, parce qu’ils ne pourront pas prouver leur descendance d’Aaron : Esdras 2.62 ; Néhémie 7.64.
[Le prophète est un Héved, עבד, de l’Éternel ; le prêtre, un Mesharet, משרת. Voyez § 83. Ce qui fait le prophète, c’est l’appel et ce sont les dons spirituels qu’il reçoit personnellement de Dieu ; ce n’est nullement une affaire de descendance.]
Tout dans l’extérieur du prêtre doit annoncer un homme chargé de saintes fonctions. Il faut qu’à sa vue on reçoive une impression de pureté parfaite et de complète consécration à Dieu. Pour cela, il doit être exempt de toute difformité corporelle (Lévitique 21.16-24) [Ce passage mentionne à peu près les mêmes difformités que celles qui rendaient un animal indigne de servir de victime (Lévitique 22.22). Josèphe (Ant. 14.13. 10) mentionne encore un autre défaut qui de son temps excluait du sacerdoce.]. Avant d’être consacré, tout descendant d’Aaron devait donc être visité soigneusement. Celui qui était trouvé atteint de quelque défaut dirimant, ne pouvait pas fonctionner comme prêtre, mais il osait pourtant, v. 22, se nourrir des choses saintes et vivre de l’autele. — De même, le prêtre ne doit se souiller pour aucun mort, si ce n’est pour ses proches parents, père, mère, fils, fille, frère ou sœur non mariéef, et même alors il ne doit ni se raser, ni se faire aucune incision.Mesharel
e – D’après Josèphe (Bell. jud. 5.5. 7), il y avait des prêtres empêchés qui prenaient néanmoins part au service du parvis des prêtres. — Il est à peine besoin de remarquer que les descendants d’Aaron, même des mieux qualifiés, ne fonctionnaient pourtant pas tous dans le temple. Bénaja, le général de David et de Salomon (2 Samuel 8.18 ; 20.23 ; 1 Rois 2.25), était fils d’un prêtre (1 Chroniques 27.5).
f – Ce sont là les six mêmes exceptions que cite Ézéchiel 44.25.
[Lévitique 21.4, est difficile. On y a vu la défense faite au prêtre de se souiller en qualité de mari, c’est-à-dire à la mort de sa femme, de sa belle-mère ou de sa belle-fille. Mais alors on ne s’explique pas pourquoi les concitoyens d’Ezéchiel s’étonnent de ce qu’il ne mène pas deuil sur sa femme qui vient de mourirg (Ézéchiel 24.16 et s.).]
g – Ne faut-il pas distinguer ici entre le deuil et la souillure ? Ezéchiel non seulement ne se souille pas en touchant le corps de sa femme pour l’ensevelir, mais encore il ne mène pas deuil. (N. du T.)
Quand il voudra se marier, il n’épousera point une femme débauchée ou déshonorée, ni une femme répudiée (Lévitique 21.7 et sq.). Il ne pourra s’unir qu’à une femme vierge ou à une veuve. Ézéchiel 44.22, veut même que ce soit exclusivement la veuve d’un prêtreh. L’ordre et la discipline doivent régner dans la maison et dans la famille du prêtre. Si l’une de ses filles vient à se livrer à l’impureté, elle sera brûlée au feu, bien probablement après avoir été lapidée. — Afin d’être toujours en pleine possession de toutes leurs facultés pendant l’exercice de leurs fonctions, les sacrificateurs doivent s’abstenir de toute boisson fermentée, aussi longtemps qu’ils ont à faire dans le tabernacle (Lévitique 10.9). Quant à leur nourriture, ils doivent s’abstenir avec un soin tout spécial de ce que du reste tout Israélite doit éviter : bêtes mortes de maladies ou déchirées par des animaux sauvages (Lévitique 22.8). Celui qui s’était souillé involontairement ou par devoir, devait s’abstenir de toute nourriture sacrée jusqu’à ce que sa souillure fût passée. Toute infraction à ces ordonnances était punie de mort, v. 3. La loi ne prescrivait rien quant à l’âge auquel on pouvait être admis à la sacrificature ; c’était probablement le même que celui qui était prescrit pour les Lévitesi.
h – Mais ce passage a évidemment un caractère prophétique.
i – D’après la tradition juive, nul ne pouvait fonctionner connue prêtre avant vingt ans.
Les cérémonies à observer lors de la consécration des prêtres sont racontées dans Exode 29.1-37 ; 40.12-15. Voyez aussi Lév. ch. 8. Elles se composent d’une première série d’actes (lavage, habillement, onction), qui constituent la consécration proprement dite, puis d’un triple sacrifice après lequel plus rien n’empêche que celui en faveur de qui il a été offert, n’entre décidément dans l’exercice de ses nouvelles fonctions et dans la jouissance de ses droits. Ainsi donc :
1° Les récipiendaires étaient conduits à la porte du tabernacle et ils y étaient lavésj, afin d’être dans cet état de pureté corporelle qui est le symbole de la pureté spirituelle sans laquelle nul ne peut s’approcher de Dieu, et moins que personne, ceux dont le ministère est un ministère de réconciliation ;
j – Non seulement pieds et mains, mais tout le corps.
2° Là dessus ils étaient revêtus, du moins les prêtres ordinaires, de quatre pièces d’habillements, chemise, caleçon, ceinture et calottek. Ces habits étaient de fin lin brillant, symbole de pureté. La ceinture seule était de fil de couleur. Les tissus de laine étaient défendus. Point de souliers ni de sandales pendant l’office ;
k – D’après 1 Samuel 22.18, ils portaient aussi un éphod, mais d’une étoffe moins précieuse que celui du grand-prêtre.
3° L’onction, avec une huile mêlée à quatre substances odoriférantes, représentait la communication de l’Esprit divin, qui agit efficacement chez tous les membres du corps sacerdotal.
[Exode 29.7 ; Lévitique 8.12, ne parlent d’onction que pour le souverain sacrificateur. Mais d’après Exode 28.41 ; 30.30 ; 40.15 ; Lévitique 7.35 ; 10.7, il y avait certainement aussi onction pour tous les autres descendants d’Aaron. Seulement cette dernière était moins complète ; ce n’était probablement qu’une aspersion sur le corps et les vêtements ; ou bien peut-être ne faisait-on que de toucher le front avec l’huile sainte.]
Il est dit (Exode 40.15) que l’onction des fils d’Aaron servira pour la sacrificature à toujours d’âge en âge ; — d’où l’on a conclu que l’onction ne fut pas renouvelée dans la suite à l’égard des prêtres ordinaires.
Ces trois cérémonies étaient suivies de trois sacrifices. Lors de la consécration d’Aaron, ce fut Moïse qui les offrit. Plus tard ce furent des prêtres ; mais jamais les récipiendaires ;
4° D’abord, un jeune taureau était immolé pour décharger le prêtre de ses péchés et pour faire propitiation pour l’autel (Lévitique 8.15) ;
5° Puis, un bélier était offert en holocauste pour indiquer la complète consécration à l’Éternel du prêtre ainsi purifié de toute souillure ;
6° Le tout se terminait par une sorte de sacrifice de prospérité, consistant en un bélier appelé le bélier de l’installation, avec le sang duquel on faisait aspersion, non seulement sur l’autel comme dans les autres sacrifices de prospérité, mais aussi sur l’oreille droite du prêtre, sur le pouce de sa main droite et sur l’orteil de son pied droit ; sur l’oreille, parce que le prêtre doit être attentif à la voix de son Dieu ; sur sa main, pour qu’il s’acquitte fidèlement de toutes les fonctions du culte ; sur le pied, pour qu’il marche saintement devant Dieu. Une autre particularité de ce sacrifice, c’est que le prêtre consacrantl prenait la graisse, la cuisse droite du bélier et trois sortes de gâteaux qui faisaient partie du sacrifice, les mettait dans les mains du prêtre consacré, les agitait devant l’Éternel et les consumait enfin sur l’autel. Cela marquait que désormais le prêtre consacré avait le droit de faire fumer la graisse sur l’autel et de se nourrir d’une part des offrandes ; seulement, comme ce jour-là il n’était pas encore prêtre officiant, il ne gardait pas les offrandes pour lui, mais il les rendait à l’Éternel.
l – Pour l’installation d’Aaron, ce fut Moïse.
[Millouim, מלאים (Lévitique 8.22, 28 ; 7.37), le bélier des mains pleines, des pleins-pouvoirs, le bélier par le sacrifice duquel le prêtre recevait le pouvoir de faire lui-même à l’avenir des sacrifices. L’expression : Mille et iad, מלא את–יד, consacrer, dans Exode 28.41 ; 29.9, 29, 33 ; Lévitique 8.33 ; 16.32 ; Nombres 3.3 ; Juges 17.5, ne doit pas être confondue avec une expression analogue (1 Chroniques 29.5 ; 2 Chroniques 29.31) qui signifie : se pourvoir de quelque chose pour offrir à l’Éternel (Exode 32.29).]
[La poitrine de la victime, qui, dans les sacrifices de prospérité réguliers, était agitée, c’est-à-dire remise à l’Éternel, pour être ensuite rendue par l’Éternel au prêtre, devint lors de l’installation d’Aaron la part de Moïse. Enfin Moïse fit aspersion d’un mélange d’huile d’onction et de sang sur les prêtres et leurs vêtements (Lévitique 8.30). Exode 29.21 en revanche fait intervenir cet acte de suite après l’aspersion de l’autel.]
La fête se terminait par un repas auquel les prêtres seuls prenaient part (Exode 29.33), et dont les restes, pour éviter toute profanation, étaient consumés par le feu. La consécration durait sept jours (Exode 29.35 ; Lévitique 8.33 et sq.), pendant lesquels les candidats à la prêtrise demeuraient jour et nuit à l’entrée du tabernacle dans le parvis des prêtres. Ce que nous venons de raconter se faisait le premier jour. Chacun des six jours suivants, on offrait de nouveau un sacrifice pour le péché (Exode 29.36), et l’on répétait probablement aussi les deux autres sacrifices (les deux béliers) ; car, d’après Exode 29.35 ; Lévitique 8.33, la consécration devait être renouvelée chaque jour ; or, c’était justement par ces deux sacrifices qu’elle s’opérait. Quant à l’onction, en dépit de la tradition, je ne pense pas qu’elle se renouvelât chacun des sept jours. Tout ce qu’on peut citer en faveur de cette opinion, c’est le passage Exode 29.36, où nous voyons l’autel des holocaustes recevoir l’onction sept jours durant.
Dès le huitième jour, les nouveaux-consacrés débutaient dans leurs fonctions par des sacrifices offerts pour leur propre compte, que suivaient d’autres sacrifices pour le compte du peuple (Lévitique 9.1). C’était sans doute aussi en ce huitième jour qu’était faite pour la première fois l’offrande pour le gâteau, dont parle Lévitique 6.13 et sq.
[Dans le lieu saint, faire chaque matin et chaque soir brûler l’encens sur l’autel d’or, laver et préparer les chandeliers, les allumer le soir, changer les pains de proposition le jour du sabbat ; dans le parvis des prêtres, entretenir sur l’autel d’airain le feu qui ne devait jamais s’éteindre, enlever les cendres de l’autel, offrir l’holocauste du matin et du soir (Lévitique 6.1 et sq.), prononcer sur le peuple après le sacrifice quotidien la bénédiction rapportée Nombres 6.23,27, faire diverses aspersions avec le sang, ranger et consumer sur l’autel diverses parties des victimes ; enfin, les jours de fête et quand on allait en guerre (2 Chroniques 13.12), faire retentir les trompettes d’argent (Nombres 10.8-10 ; 31.6), ce qui figurait, ainsi que nous le verrons § 150, l’intercession sacerdotale en faveur du peuple, — telles étaient les principales fonctions des prêtres.]
L’A. T. lui-même connaît parfaitement la valeur et le but de ces ordonnances (δικαιώματα σαρκός). « Celui qui dit de son père et de sa mère : Je ne l’ai point vu ; et qui n’a point reconnu ses frères, ni même connu ses enfants ; car ils gardent tes paroles et ils gardent ton alliance, — ce sont ceux-là qui enseigneront tes ordonnances à Jacob et qui feront fumer le parfum sur ton autel, etc. » (Deutéronome 33.9-10) Au premier abord, la sacrificature est une affaire de descendance charnelle et de pureté extérieure ; mais quand on y regarde de plus près, ce qui fait le prêtre, c’est l’entière consécration à l’Éternel, c’est le sacrifice de tout ce qu’on a de plus cher ici-bas, dès qu’il s’agit de la gloire de Dieu. « Je serai sanctifié par mes proches (Querôvaï, קרבי, désignation significative des prêtres), et glorifié par tout le peuple. » Lévitique 10.3. Comparez Malachie 2.5 et sq.
Pour demeure, nous l’avons dit, les prêtres de la famille d’Aaron reçurent treize des villes lévitiquesm ; pour revenu, ceci est nouveau, ils avaient la dixième partie de la dîme payée aux Lévites par tout le peuplen, plus une partie des sacrifices et les prémices. Cela suffisait à leur entretien, mais les prêtres en Israël étaient pourtant beaucoup moins bien dotés que la plupart de ceux des autres nations.
m – Voyez Josué 21.4, 10 ; 1 Chroniques 6.39 et s. (passage qui n’est pas franc de corrections et d’interpolations), et surtout Nombres 18.8 et s.
n – Ceci avait le double avantage de montrer la supériorité des prêtres sur les Lévites (Hébreux 7.7), et de rendre l’entretien des prêtres en partie dépendant du plus ou moins de conscience des Lévites.
[Nous trouvons dans Psaumes 16.5, une belle paraphrase de la belle parole Nombres 18.20 : « L’Éternel, s’écrie David, est la portion de mon héritage, tu étends mon lot ! Les cordeaux me sont échus dans des lieux agréables. » Tel était bien l’esprit qui aurait dû animer tous les prêtres. Voyez encore Deutéronome 10.9 ; 18.1 ; Ézéchiel 44.28.]