Σκότος, mot le plus employé de ce groupe, est d’usage très fréquent dans le N.T., soit sous sa forme attique, soit sous celle du dialecte commun, σκοτία. Il est l’exact opposé de φῶς ; voir l’exemple pathétique de la réplique d’Ajax dans Sophocles (Aj. 394) : « ἰώ. σκότος ἐμὸν φάοςa » ; comparez Platon, Rep. 7.518 a ; Job 22.11 ; Luc 12.3 ; Actes 26.18.
a – « Ô ténèbres, ma lumière… »
Γνόφος est une forme dorique de δνόφος, il se trouve une seule fois dans le N.T., Hébreux 12.18, et là en relation avec ζόφος (texte byzantin), ce même rapprochement se rencontre dans la Septante (Deutéronome 4.1 ; Exode 10.22 ; Sophonie 1.16). On le traduit ordinairement par tempête (étymologiquement νέφας, νέφος, γνόφος et ζόφος dérivent probablement d’un même mot) ; il est souvent uni à νεφέλη (Joël 2.2 ; Psaumes 96.2 ; Ézéchiel 34.12), et à θύελλα (Deutéronome 4.11 ; 5.22).
Ζόφος se rencontre quatre fois dans le N.T. (2 Pierre 2.4,17 ; Jude 1.6,13), cinq fois si on tient compte de la leçon byzantine de Hébreux 12.18 ; il n’existe pas dans la Septante, mais deux fois dans la version de Symmaque (Psaumes 10.2 ; 90.6). Le ζόφος est une sorte d’émanation du σκότος ; d’où l’expression ὁ ζόφος τοῦ σκοτούς (Jude 1.13) ; il appartient à la région du crépuscule où meurt l’astre du jour, en contraste avec la lumière et la vie de l’Orient où le soleil renaît chaque jour. Ἠερόεις, le nuageux, est l’épithète qui chez Homère s’apparie avec ζοφός. Il peut revêtir un caractère plus sombre encore, car une obscurité profonde règne dans les régions souterraines d’où le soleil est absent : le nigra Tartara de Virgile (Æn. 6.134) ; le opaca Tartara d’Ovide (Met. 10.20) ; le κνεφαῖα Ταρτάρου βάθη d’Eschyle (Prom. Vinct. 1029). C’est du ζόφος que dans la mythologie perse Ahriman naît, comme Ormuzd de la lumière (Plutarch, De Is. et Osir. 47). On comprend donc avec quelle pertinence le mot est employé dans le N.T. pour parler de cette région ténébreuse, où aucune lumière ne luit.
Ἀχλύς apparaît une seul fois dns le N.T., Actes 13.11 ; jamais dans la Septante, quoiqu’une fois dans la version de Symmaque (Job 3.5). Galen le définit comme plus épais que ὀμίχλη et moins que νέφος. Luc, le médecin bien-aimé, choisit soigneusement ses mots : ἀχλὺς καὶ σκότος qui tombe sur le sorcier Elymas, est le signe extérieur de l’obscurité spirituelle qui l’envahit par suite de sa résistance à la vérité ; un brouillard obscur recouvre son sens de la vue. L’Odyssée et les Actes sont séparés par un intervalle de temps de deux millénaires ; pourtant leur usage du mot est étonnamment semblable : le poète se sert du verbe ἀχλύειν (12.406) pour décrire l’obscurité qui s’étend sur la mer alors qu’un noir nuage intercepte le soleil. Ἀχλύς est également employé par Homère pour parler du voile qui recouvre les yeux des mourants (Il. 16.344).