1. A l'époque où Titus César s'établissait devant Jérusalem pour l'assiéger, Vespasien, embarqué sur un vaisseau marchand, avait passé d'Alexandrie à Rhodes. De là, voyageant sur des trirèmes et visitant les villes placées sur le trajet, qui le recevaient avec joie, il parvint d'Ionie en Grèce, ensuite de Corcyre à l'extrémité de l'Iapygie : de là il acheva par terre son voyage.
Cependant Titus quitta Césarée, ville du littoral, pour se rendre à Césarée de Philippe, où il séjourna longtemps et donna des spectacles divers. Beaucoup de prisonniers périrent alors, les uns jetés aux bêtes féroces, les autres forcés à lutter par nombreuses troupes, comme des ennemis, les uns contre les autres. C'est là aussi que Titus apprit la capture de Simon, fils de Gioras, qui fut opérée comme je vais dire.
2. Ce Simon, pendant le siège de Jérusalem, se tenait sur la ville haute ; quand l'armée romaine pénétra à l'intérieur des murs et se mit à ravager toute la ville, il groupa autour de lui ses plus fidèles amis, et aussi des scieurs de pierre, munis des outils de fer nécessaires à leur travail. Il réunit les provisions qui pouvaient suffire à leur nourriture pour un grand nombre de jours et descendit avec sa troupe dans un des souterrains dont l'entrée échappait aux regards. Tant qu'ils trouvèrent devant eux l'ancienne galerie, ils s'y avancèrent ; quand une masse de terre s'opposait à leur progrès, ils la minaient, espérant pouvoir, en continuant leur marche, émerger dans un endroit sûr et se sauver. Mais l'expérience ne réalisa pas leur espoir, car les mineurs avaient à grand peine fait un peu de chemin que déjà la nourriture, bien que ménagée avec soin, était presque épuisée. Alors Simon crut pouvoir tromper les Romains en les effrayant. Revêtu d'une tunique blanche, à laquelle était agrafé un manteau de pourpre, il sortit de terre à l'endroit où se trouvait autrefois le Temple. Tout d'abord, ceux qui le virent furent saisis d'effroi et restèrent immobiles ; puis ils s'approchèrent et lui demandèrent qui il était. Simon refusa de le dire, mais ordonna aux soldats d'appeler leur chef. Ceux-ci coururent aussitôt le chercher et Terentius Rufus, à qui le commandement avait été remis, arriva. Il apprit de Simon toute la vérité, le fit enchaîner et garder et prévint César des circonstances de sa capture. Par une juste punition de sa cruauté envers ses concitoyens, qu'il avait si affreusement tyrannisés, Dieu livra Simon à ses ennemis les plus haineux ; ce n'est pas la violence qui le fit tomber entre leurs mains ; il se livra de lui-même au châtiment, lui qui avait tué cruellement un grand nombre de Juifs sous la fausse accusation de vouloir passer aux Romains.
C'est qu'en effet la méchanceté n'échappe pas à la colère de Dieu ; la justice n'est pas faible ; avec le temps, elle poursuit ceux qui ont transgressé ses lois et inflige aux scélérats un châtiment d'autant plus dur qu'ils croyaient échapper à ses coups, parce qu'ils n'avaient pas été punis sur-le-champ. Simon le reconnut bien quand il fut tombé au fort de la colère des Romains. Sa sortie de terre eut pour effet de faire découvrir aussi en ces jours-là un grand nombre d'autres factieux dans les passages souterrains. Quand César fut de retour à Césarée du littoral, on lui envoya Simon enchaîné ; le prince ordonna de le réserver aussi pour le triomphe qu'il se préparait à célébrer à Rome.