Il suffirait de Deutéronome 6.13 : « Tu craindras l’Éternel ton Dieu, tu le serviras lui seul et tu jureras par son nom, » pour montrer que le serment peut et doit être considéré comme un acte religieux, comme un culte rendu à Dieu. Mais ce passage n’est pas le seul de son espèce. Voyez encore Deutéronome 10.20 ; Ésaïe 65.10 ; Jérémie 4.2. — Le serment n’est pas seulement une affirmation rendue plus solennelle par le fait qu’on s’est mis en la présence d’un Dieu vivant (L’Éternel vit !), tout puissant, qui sait tout, qui est saint et qui ne peut manquer de punir le mensonge (Juges 11.10) ; il est aussi parfois une invocation positive du juste jugement de Dieu sur celui qui ne dit pas la vérité. Cette importance tout particulièrement redoutable du serment résulte de la formule ordinaire, qui commence par le mot : Si… ou Si… non (Im ou Im lô, אם ou אם לא), et qui se trouve sans rien de sous-entendu dans 2 Samuel 3.35 : Qu’ainsi me fasse l’Éternel et qu’ainsi il y ajoute, si je prends aucune nourriture avant que le soleil soit couché ! » Voyez 1 Samuel 14.44. Mais le caractère du serment se montre d’une manière particulièrement claire dans Josué 22.22 : « Le Fort, le Dieu, l’Éternel, le Fort, le Dieu, l’Éternel le sait lui-même et Israël le connaîtra ! Si c’est par révolte que cela s’est fait, ne nous sauve pas aujourd’hui ! Au contraire que l’Éternel nous en redemande compte ! » Lorsque le serment est ainsi une sorte de provocation adressée à la justice divine, il est appelé une imprécation (אלה Alah), ou un serment d’exécration (שבעת אלה, Schevouath alah.) (Nombres 5.21 ; Deutéronome 29.13,19 ; Proverbes 29.24 et sq.). Comparez aussi 1 Rois 8.31 et sq.
Dès les temps les plus anciens, le serment apparaît dans la vie privée sous forme de promesses solennelles (Genèse 24.2 ; 50.5, 25), et spécialement de traités et d’alliances (Genèse 21.23 ; 31.53). Quand la loi fut venue, les promesses accompagnées d’une invocation revêtirent le plus souvent la forme de vœux (§ 134), de serments de disculpation (Exode 22.10), ou d’adjurations par lesquelles les juges pouvaient contraindre les assistants à dire ce dont ils avaient été témoins (Lévitique 5.1 § 99). Voyez aussi Nombres 5.19 et sq. § 104).
Régulièrement, on jurait par l’Éternel : Jéhovah vit ! חי יהוה — « Ton âme vit ! חי נפשכ.ֻ », et tant d’autres serments de cette nature n’étaient pas d’un usage théocratique, si nous pouvons ainsi parler ; on ne s’en servait que lorsqu’on cédait à des émotions personnelles. Il était d’usage d’accompagner le serment de diverses cérémonies. Voyez Genèse 21.28 ; Abraham met à part sept brebis pour qu’elles lui servent de témoignage qu’il a creusé tel ou tel puits. D’après Hérodote 3.8, les Arabes, après avoir conclu un traité, dressaient sept pierres qu’ils marquaient avec le sang des parties contractantes. Le mot même de נשבע, jurer, qui vient du mot שבע, Shéba, sept, indique la haute antiquité de pareilles coutumes. Parfois on fait mettre sous sa cuisse la main de celui de qui on veut obtenir un serment (Genèse 24.2 ; 47.29), sans doute parce que la cuisse est considérée comme la source de la vie physique. Le plus communément on levait la main droite vers le ciel ; en arabe le même mot signifie main droite et serment (Genèse 14.22 ; Deutéronome 32.40 ; Exode 6.8). Devant les tribunaux, le juge adjurait les témoins ou les parties, qui répondaient par les mots de Amen ! (Nombres 5.22 ; Deutéronome 27.16 et sq.), ou de : Tu le dis ! (Matthieu 26.63).
Le faux serment est un grave péché, car de cette façon on témoigne du mépris pour le nom de l’Éternel (Lévitique 19.12), que l’on a pris en vain (Exode 20.7). L’histoire des Gabaonites montre combien l’on respectait le serment : les principaux de l’assemblée craindraient de faire venir sur le peuple la colère de l’Éternel, s’ils ne remplissaient pas des engagements accompagnés de serment, lors même que ces engagements se trouvent être contraires à la volonté de Dieu. Tout serment prononcé à la légère est mauvais (Lévitique 5.4 et sq.), et il faut un sacrifice pour le délit pour en être lavé. — Si, d’après Lévitique 5.19, l’Israélite qui par un faux serment avait réussi à se faire déclarer innocent d’une faute qu’il avait réellement commise, en était quitte pour offrir un simple sacrifice et pour réparer le tort qu’il avait pu faire, en y ajoutant la cinquième partie de la valeur, — la douceur de cette punition provient probablement de ce que, dans les cas prévus par cette loi, le coupable s’était dénoncé lui-même librement et volontairement.
[Dans le reste de l’A. T.. nous trouvons en fait de passages relatifs au serment, Psaumes 15.4 : « Il jure à son dommage et n’en change rien, » qui correspond à Lévitique 5.4, et à 1 Rois 8.31, — et Ézéchiel 17.16 et sq., dont nous reparlerons à propos de Sédécias. — Rien de plus curieux que le mélange de sévérité et de relâchement moral que présente l’enseignement de Maimonides sur le serment Voyez dans Herzog mon article intitulé Kol Nidre VIII, 24.]