1 Mais veuillez me dire, mes amis, quel sens vous donnez au mot Israël ? Comme tous se taisaient, je repris la parole : Je vais vous dire à cet égard mon sentiment. Il ne convient pas, je pense, de vous le taire ou de me laisser trop préoccuper par cette idée que vous le connaissez, mais que vous cherchez toujours par envie ou par une ignorance volontaire à vous abuser vous-même. Je vous dirai donc simplement et sans détour toute ma pensée. Et le maître que je sers n’a-t-il pas dit qu’un homme étant sorti pour semer, une partie du grain tomba sur le chemin, une autre parmi les épines, une autre dans un endroit pierreux, une autre enfin dans une bonne terre ? 2 Il faut donc parler dans l’espérance que cette bonne terre est quelque part. Car notre maître, celui dont je vous parle, viendra, plein de force et de puissance, redemander à chacun de nous ses propres dons. Il ne condamnera point l’économe qui aura placé partout l’argent qu’il a reçu, et qui se sera bien gardé de l’enfouir sous aucun prétexte, parce qu’il savait que le maître était sévère et qu’il devait venir un jour réclamer ce qu’il a confié.
3 Le mot Israël signifie homme qui triomphe de la force ; car Isra veut dire homme qui triomphe, et ël, force. Et voilà ce que devait faire le Christ après s’être fait homme, comme l’annonce mystérieusement la lutte de Jacob contre le Verbe, qui alors ne lui paraissait qu’un homme, parce qu’il exécutait les ordres de son père, mais qui était Dieu en sa qualité de premier-né de la création ? 4 Quand il se fut fait homme le démon, ainsi que je l’ai déjà rapporté, s’approcha de lui et, par le démon, j’entends cette puissance ennemie que nous appelons serpent ou Satan. Le démon tenta Jésus, il essaya de l’abattre, il lui demanda de l’adorer ; mais c’est le Christ qui l’abattit, qui le terrassa, lui montrant sa perversité, puisque, contrairement à l’Ecriture, il voulait se faire adorer comme un dieu, poussant jusque-là la trahison et la perfidie. Le Christ lui répondit : Il est écrit : « Tu adoreras le Seigneur ton Dieu ; tu ne serviras que lui seul. »
Le démon se retira terrassé et confondu par cette parole. 5 Le Christ devait comme languir et dessécher dans les larmes et les souffrances lors qu’il serait mis en croix, et voilà ce qu’il prédit d’avance quand il toucha la cuisse de Jacob, qui se sécha aussitôt. Il avait toujours eu ce nom d’Israël qu’il donna à Jacob. Il le bénit donc de son propre nom, et par là, il nous annonçait que tous ceux qui par lui recourent à son père sont cet Israël qu’il a béni. Mais vous ne comprenez pas tous ces mystères et vous ne préparez pas votre esprit à les comprendre ; et parce que vous êtes enfants de Jacob selon la chair, vous vous flattez que vous serez tous sauvés. Je vous ai assez longuement prouvé que c’était trop vous abuser vous-même.