1 Mais citons les paroles de l’Ecriture qui nous montrent Dieu faisant la séparation des peuples ; les voici : « Interroge ton père, et il t’apprendra ; interroge tes ancêtres, et ils te diront : quand le Très-Haut divisait les nations, quand il séparait les enfants d’Adam, il marqua les limites des peuples selon le nombre des fils d’Israël. Jacob est devenu le partage du Seigneur ; Israël est devenu son héritage. »
Quant aux Septante, ajoutai-je, c’est ainsi qu’ils traduisent : « Il marqua les limites des peuples selon le nombre des anges du Seigneur. »
J’ai adopté votre sens, parce qu’il n’affaiblit en rien mon raisonnement. Voyons quel est le véritable Jacob, le véritable Israël. 2 Si vous voulez être de bonne foi, vous avouerez que nous autres gentils que Dieu a appelés, par le mystère de la croix si abject et si honteux, nous que les démons et leurs suppôts livrent aux supplices sans autre motif que celui de notre foi, de notre soumission et de notre piété, et poursuivent jusqu’à la mort par votre propre ministère, que vous ne leur refusez jamais ; vous avouerez, dis-je, qu’il n’est point de tourments que nous ne supportions plutôt que de renier, je ne dis pas de cœur, nais seulement de bouche, le Christ qui nous a appelés au saint préparé par son père ; vous conviendrez dès-lors que nous sommes bien autrement fidèles à Dieu que vous autres, qui cependant en avez reçu tant de bienfaits. 3 N’a-t-il pas déployé pour vous toute la force de son bras ? Ne vous a-t-il pas visités dans tout l’éclat de sa gloire, quand il vous a rachetés lie l’Egypte ? N’a-t-il pas divisé pour vous les eaux de la mer ? Ne vous a-t-il pas ouvert un chemin à travers ses abîmes ? N’a-t-il pas frappé de mort, dans ce chemin miraculeux, ceux qui vous poursuivaient avec tout l’appareil de leur puissance et dans des chars magnifiques ? N’a-t-il pas refermé sur eux la mer qu’il avait affermie sous vos pas ? Ne sommes-nous pas plus fidèles que vous, aux yeux desquels il a fait briller une colonne de feu, et qui, seuls de tous les peuples, avez vu s’allumer tout exprès pour vous un flambeau qui ne pouvait ni décroître ni s’éteindre ; vous, qu’il a nourris d’un pain tout particulier, du pain même des anges, quand il fit pleuvoir sur vous la manne du ciel, afin que vous n’eussiez pas même besoin de vous occuper de votre nourriture ; vous, pour qui les eaux de Mara oublièrent leur amertume et devinrent si douces à boire ; 4 vous enfin, sur qui, bien avant les temps marqués, découlèrent toutes les grâces des mystères à venir, par une faveur toute particulière de ce Dieu, envers qui vous vous êtes toujours montrés si ingrats ! N’avait-il pas, ainsi que je l’ai déjà dit, placé sous vos yeux le signe de celui qui devait être mis en croix, lorsque des serpents vous couvrirent de leurs morsures ; lorsqu’Amalec était vaincu par la figure que formaient les bras étendus de Moïse, et par le nom que portait celui qui fut surnommé Jésus ? Aussi Dieu voulut-il que le nom de Jésus se retrouvât partout, dans vos livres, et frappât sans cesse vos oreilles. C’est lui, vous disait-il, qui doit effacer de dessus la terre le souvenir d’Amalec. 5 Or, tout le monde sait que le nom d’Amalec subsistait encore après le fils de Navé. Tout ici était donc symbolique et annonçait Jésus crucifié, par qui les démons seraient chassés de toutes parts, dont le nom seul les ferait trembler, et serait également redoutable à toutes les puissances et principautés ; tandis qu’on verrait chez tous les peuples, dans ceux qui croient en ce même nom, des hommes vraiment pieux et pacifiques ; n’est-ce pas, Tryphon, ce qu’attestent les Ecritures et ce que démontrent tous les passages que j’ai cités ! 6 Vous désiriez vous nourrir de chair, et il vous tomba une si grande quantité d’oiseaux que vous ne pouviez les compter. Pour vous, l’eau a jailli des rochers ; sur vos têtes s’est étendu un nuage qui vous mettait à l’ombre contre l’ardeur du soleil, vous défendait contre la rigueur du froid et vous suivait partout, présentant comme l’image et la figure d’un nouveau ciel. Les courroies de vos chaussures ne se sont pas brisées ; vos chaussures elles-mêmes ne se sont pas usées non plus que vos vêtements ; ils se renouvelaient sur le corps des plus jeunes.