Deuxième siècle
Sa lettre aux Romains, à l’occasion de son prochain martyre.
… Je crains que vous n’ayez pour moi une compassion trop tendre. Si vous m’aimez d’une affection véritable, ne me laisserez-vous pas aller jouir de mon Dieu ?… Je connais mes intérêts : le prix de la victoire est Jésus-Christ ; en faut-il davantage pour m’animer ? C’est aujourd’hui que je commence à être disciple du Seigneur. Tout ce qu’il y a de créé dans le monde visible m’est devenu indifférent ; mon unique désir est de posséder mon Sauveur. Que je sois consumé par le feu, que je meure de la mort lente et cruelle de la croix ; que je sois mis en pièces par les tigres et par les lions affamés ; que mes os soient dispersés, mes membres meurtris, mon corps broyé ; que les démons épuisent sur moi leur rage, je souffrirai tout avec joie, pourvu que je jouisse de Jésus-Christ. Eh ! que me servirait-il de posséder toutes les grandeurs et tous les biens de la terre ? Il m’est plus glorieux de mourir pour mon Dieu, que de régner sur tout le monde. C’est celui qui est mort pour moi que je cherche ; c’est celui qui est mort pour moi que je veux. Si, étant arrivé auprès de vous, j’allais me laisser intimider par l’appareil du supplice, soutenez mon courage. Rappelez-vous seulement ce que je vous mande à cette heure où je vous écris dans une pleine liberté d’esprit. Je ne tiens plus à la terre, et je ne me regarde plus comme vivant parmi les hommes. Souvenez-vous dans vos prières de l’Eglise, qui, dépourvue de pasteurs, tourne ses espérances vers Celui qui est le souverain pasteur de toutes les Eglises. Que Jésus-Christ daigne en prendre la conduite durant mon absence ; je la confie à sa providence et à votre charité.