1. Les Juifs ayant jeté les fondements du Temple et s'étant mis avec ardeur à le rebâtir, les peuples voisins, et particulièrement les Chouthéens que Salmanassar, roi d'Assyrie, avait amenés de Perse et de Médie et établis à Samarie quand il eut déporté les Israélites, demandèrent aux satrapes et aux fonctionnaires de s'opposer au relèvement de la ville et à la reconstruction du Temple. Ceux-ci, corrompus à prix d'or, vendirent aux Chouthéens leur indifférence et leur insouciance à l'égard des Juifs ; car Cyrus, occupé ailleurs par des guerres, ignorait ces faits et, peu après, périt dans une expédition contre les Massagètes.
[1] Source : 3e Esdras, IV, 70-71 ; II, 15-26. Josèphe a suivi cette compilation comme le prouvent notamment : 1° la mention de la reconstruction du Temple dont il n'est pas question dans l'Esdras hébreu ; 2° celle (§ 26) d'un prétendu fonctionnaire Belsemos (Beeltethmos), alors que dans Esdras (IV, 7 et 17) [hébreu] signifie « gouverneur » et désigne Rehoum (Rathymos). Mais tandis qu'Esdras et le compilateur placent les événements sous Artaxerxés, Josèphe, soucieux de l'ordre chronologique, a remplacé ce nom par celui de Cambyse. Il a ajouté également les renseignements authentiques sur la fin de Cyrus et de Cambyse.
Lorsque Cambyse, fils de Cyrus, eut pris le pouvoir, les habitants de Syrie, de Phénicie, d'Ammannitide, de Moabitide et de Samarie lui écrivirent une lettre ainsi conçue : « Maître, de la part de tes esclaves, Rhathymos, qui inscrit tous les événements, Sémélios, le greffier et des juges du conseil de Syrie et de Phénicie. Il faut que tu saches, ô roi, que les Juifs qu'on avait déportés à Babylone sont venus chez nous, qu'ils reconstruisent leur ville misérable et rebelle et ses places, travaillent aux murailles et relèvent le Temple. Sache cependant que, ces travaux achevés, ils ne voudront ni payer de tributs ni être des sujets obéissants : ils voudront tenir tête aux rois et aimeront mieux commander qu'obéir. En les voyant à l’œuvre et si fort occupés à leur Temple, nous avons jugé bon de t'écrire, Ô roi, au lieu de mépriser ce danger, afin que tu consultes les livres de tes pères ; tu y verras que les Juifs furent des rebelles et les ennemis des rois, et que leur ville, pour cette raison, fut changée en un désert et l'est encore. Nous avons jugé bon de te prévenir aussi, car tu l'ignores peut-être, qu'une fois la ville rebâtie et ceinte de nouveau de remparts, la route te sera fermée vers la Cœlésyrie et la Phénicie. »
2. Cambyse, ayant pris connaissance de cette lettre, comme il était d'un naturel méchant, inclina à y ajouter foi et répondit en ces termes : « Le roi Cambyse parle ainsi à Rhathymos, qui inscrit les événements, à Belsémos, à Sémélios, greffier, et à tous leurs collègues et habitants de Samarie et de Phénicie : Ayant lu la lettre que vous m’avez envoyée, j'ai fait examiner les livres de mes ancêtres ; on y a trouvé que cette ville a toujours été l'ennemie des rois, que ses habitants ont fomenté des rébellions et des guerres, et j'ai vu que leurs rois, puissants et violents, ont levé des tributs sur la Cœlésyrie et la Phénicie. En conséquence, j'ai donné l'ordre d'interdire aux Juifs de rebâtir leur ville, afin de ne pas laisser croître encore le mauvais vouloir dont ils ont été de tout temps animés à l'égard des rois ». Dès qu'ils eurent lu cette lettre, Rhathymos, Sémélios le greffier, et leurs collègues sautèrent aussitôt à cheval et partirent en toute hâte pour Jérusalem à la tête d'une troupe nombreuse ; là ils défendirent aux Juifs de bâtir la ville et le Temple. Et les travaux furent suspendus jusqu'à la deuxième année du règne de Darius, roi des Perses, pendant les neuf années suivantes : car Cambyse, après six années de règne pendant lesquelles il conquit l'Égypte, mourut à Damas, sur le retour.