12e siècle
Sur l’Esprit de Dieu.
Je le sentais, lorsqu’il était présent chez moi, je m’en ressouvenais après que ses visitations avaient cessé ; quelque-fois j’avais un pressentiment de son entrée, mais je n’ai jamais pu sentir quand il entrait ou qu’il sortait. Je confesse ignorer absolument d’où il venait, ou comment il se retirait ; par quelle voie il s’introduisait en moi, ou bien me quittait ; et rien d’étonnant en cela, car ses traces ne sont point connues. Vous me demanderez maintenant comment je pouvais savoir qu’il était là puisqu’il est impossible de connaître aucune de ses voies ! Sa présence était vivante et puissante ; elle réveillait mon âme engourdie, elle touchait, adoucissait et blessait mon cœur, lorsqu’il avait été dur, insensible et déréglé. Elle arrosait les endroits secs de ce cœur, illuminait ceux qui étaient ténébreux, ouvrait ce qui était fermé, enflammait ce qui était froid, redressait ce qui était tortueux, aplanissait ce qui était raboteux, tellement que mon âme bénissait le Seigneur, et que tout ce qui était en moi louait le nom de sa sainteté. Je n’avais aucun signe de la présence du Seigneur par aucun de mes sens ; je ne comprenais qu’il était avec moi que par le battement de mon cœur ; j’apercevais la force de sa puissance par l’expulsion de mes vices et la suppression de mes affections charnelles, j’admirais la profondeur de sa sagesse par le discernement et la conviction répandus dans les volontés mêmes de mon cœur ; je faisais l’épreuve de l’excellence de sa grâce dans les petits progrès de mes affections et de ma conduite ; je jugeais de l’attrait de sa beauté par le renouvellement de mon homme intérieur ; et la contemplation de toutes ces choses jointes ensemble, me faisait trembler devant sa majestueuse grandeur. Mais comme, à son départ, toutes ces sensations s’engourdissaient et se refroidissaient, précisément comme lorsqu’on retire un vase bouillant de dessus les flammes, j’avais alors un signe de son éloignement. Mon âme sera triste jusqu’à ce qu’il revienne ; mon cœur est encore enflammé de son amour. Oh ! que ce soit encore là la preuve de son retour !
Tant que je vivrai, cette parole : Reviens ! me sera familière. Aussi souvent qu’il me laissera, aussi souvent le rappellerai-je, afin qu’il me rende la joie de son salut. C’est-à-dire qu’il se rende lui-même à moi. Rien ne m’est agréable tant qu’est éloigné celui qui seul est plaisir ; et je le prie qu’il ne vienne pas à moi avec parcimonie, mais plein de grâce et de vérité, selon son ancienne coutume.