Sonnets Chrétiens


Livre Quatrième — Sonnet XXVII

Sur la Mort d’une Fille Unique
Apostrophe

Ainsi, de tes beaux ans je vois finir le cours,
Doux objet de mes vœux ! Ainsi la mort cruelle,
Couvrant d’un noir bandeau ta brillante prunelle,
Change en autant de nuits le reste de mes jours.

Quoi ! t’en vas-tu sitôt ? t’en vas-tu pour toujours ?
Trois ans ont-ils borné ta carrière mortelle ?
Et t’enfuis-tu de nous, toi si jeune et si belle ?
Reviens, mon cher enfant, mon trésor, mes amours !

Mais pourquoi rappeler, par un transport extrême,
Ta sainte âme, qui vole à la gloire suprême ?
Mon cœur, ayons plutôt ce sentiment pieux :

C’est par l’ordre d’en-haut que la mort t’a ravie ;
Et Dieu veut, en m’ôtant la moitié de ma vie,
Que l’autre ne respire ici-bas que les Cieux.


4 : L’affliction est une nuit. (St. Augustin) C’était la pensée de l’Eglise de Babylone. 5 : Ce qui peut arriver en tout temps, n’arrive pas avant le temps. (Pétrarque) Vous n’avez pas eu le temps de jouir de votre fille : vous le ferez pleinement dans le Ciel ; et dès à présent vous le pouvez voir par les yeux de l’Espérance. (St. Chrysostôme) 12 : Vous n’avez fait que rendre le dépôt. N’en soyez plus en peine : Dieu ne vous l’a repris que pour le mettre dans son dépôt éternel. (St. Chrysostôme)

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